L’avenir politique au Mali: Politiquement turbulent

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Le gouvernement représentait un trop gros enjeu pour que sa formation soit accueillie sans récriminations.
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rnIl est des empreintes qui ne s”effacent pas facilement. Pendant plus de quatre ans, la vie politique malienne s”était inscrite dans la logique du consensus, tel que l”avait proposé, puis mis en œuvre le président Touré. Ce modèle malien si particulier avait eu le mérite de solder les contentieux partisans apparus entre 1997 et 2002, d”apaiser les rapports entre les grands acteurs de la scène publique et de mobiliser un maximum d”énergies sur le développement socio-économique du pays.
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rnLa limite du système – et nous l”avions indiqué à plusieurs reprises – était qu”il suspendait momentanément des questions importantes comme celle du rôle et de l”importance des partis ; ou encore comme celle de la sincérité d’implication des acteurs partisans auprès du président de la République. Ces interrogations non élucidées réapparaissent logiquement en ce début de second mandat et le chef de l”État sera certainement amené à leur accorder une attention accrue. Attention qui devra se diriger autant envers les formations qui s”opposent à lui qu”à celles qui l”accompagnent.
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rnL”ombre du consensus que nous évoquions plus haut a sans doute plus pesé sur l”attitude de l”opposition que celle-ci ne le reconnaîtra certainement. Ce ne serait pas faire injure au RPM et au PARENA que de souligner qu”ils sont, par essence, des partis de pouvoir, habitués à l”exercice de responsabilités publiques importantes et à la visibilité institutionnelle. Le premier à cause de son extraction de l”Adema qui fut aux affaires pendant une décennie. Le second pour avoir été membre de gouvernements d”ouverture. Il était donc assez logique que les directions des deux formations aient pris le temps de réflexion pour se déterminer sur l”opportunité de renouer avec l”expérience de participation à l’exercice du pouvoir. Une interrogation identique s”est d”ailleurs posée au SADI qui possédait un représentant au sein de la précédente équipe gouvernementale.
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rnLe parti du Bélier a très rapidement exprimé son refus de venir aux affaires, position partagée un peu plus tard par les Tisserands. Une double cohérence est donc désormais instaurée. D’une part, le gouvernement mis en place intègre dans sa composante partisane uniquement les représentants de formations issues de l”ADP, alliées politiques affichées du chef de l”État. D’autre part, l”opposition s”épargne le laborieux exercice d”équilibre auquel s”étaient livrés le CNID entre 1993 et 1994 ainsi que le RPM dans les dernières années du précédent quinquennat, exercice qui consistait à concilier participation au gouvernement et opposition parlementaire.
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rnTROIS FERS AU FEU –
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La mise au clair est plutôt logique et elle est saine dans une large mesure. Il faut se rappeler qu”un second mandat présidentiel constitue aussi une longue bataille de succession, dans laquelle chacun choisit la position qui lui semble la plus profitable à tenir. L”opposition, de toute évidence, estime que les opportunités ne lui manqueront pas au cours des prochains mois pour être audible, que ce soit sur les difficultés des ménages, les remous catégoriels ou la question du Nord.
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rnLe FDR s’est d’ailleurs empressé de faire très fort en fin de semaine dernière en émettant des réticences quant à l”aptitude du Premier ministre à "conduire l”approfondissement de la démocratie" et en exprimant ses "doutes" sur la composition du gouvernement. L”opposition dégage là deux angles de tir qu”elle ne se privera certainement pas d”utiliser d’abondance dans le futur proche. Pour faire bonne mesure, le Front a mis un troisième fer au feu. Regrettant que les partis aient été méprisés dans la constitution du gouvernement et que le fait partisan ait été "malmené", il a exprimé "sa solidarité agissante aux cadres et militants des autres partis politiques du Mali" et les a conviés "au sursaut salvateur".
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rnL’incitation à la contestation ne saurait être plus explicite et le procédé est de bonne guerre. L”opposition tente d’exacerber les états d”âme qui se font entendre dans le camp présidentiel depuis l”installation du gouvernement. Il faut reconnaître que les frustrations étaient inévitables au sein de l’Alliance pour la démocratie et le progrès. En raison d”abord de la longue gestation de l”équipe, ainsi que nous le soulignions la semaine passée. Entre juin et septembre, les prétentions des uns et des autres ont eu le temps de s’aiguiser, les ambitions de se cristalliser et le nombre de postulants de gonfler au-delà de l”imaginable.
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rnEnsuite, la taille même de l”ADP (plus d’une quarantaine de membres) compliquait la sélection de ceux qui seraient retenus dans le gouvernement. Si la part attribuée aux grands et moyens partis (PASJ, URD, MPR et CNID) ne prête pas trop à contestation, la polémique était difficile à éviter en ce qui concerne la distinction des autres, le critère de la représentation parlementaire n”intervenant plus. Enfin le troisième motif de dispute est une antienne devenue traditionnelle et alimentée par les fameuses listes fournies par les états-majors des partis au président Touré et qui n’auraient pas été suffisamment prises en compte.
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rnPersonnellement, ce procédé de présentation de candidature nous a toujours semblé discutable. Hérité de l’ère adémiste, il n’a été que très modérément respecté par le président Konaré au grand dam des barons du PASJ. Dans le cas présent, la méthode aurait eu une chance d’être valide si le président de la République avait par avance indiqué à chaque formation le (ou les) départements qu”il comptait lui attribuer et avait souhaité que des propositions lui soient faites en conséquence. Cette démarche étant proprement inimaginable, les candidatures des partis se rapprochent assez de la loterie. Mais toute frustrante qu’elle soit pour les partis, la tradition des listes n’est pas près d’être remise en cause par les "victimes" elles-mêmes.
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rnEn effet, nous voyons mal une quelconque formation accepter d’abandonner délibérément au chef de l”État la totale liberté de choisir en son sein les personnalités "gouvernementalisables". Les polémiques et les complaintes ont donc encore de beaux jours devant elles. La seule question qui vaille aujourd’hui d’être posée est de savoir si ces récriminations plus ou moins feutrées affaiblissent vraiment le camp présidentiel et si l”opposition peut enfoncer un coin dans la coh
ésion de l”ADP. Dans l”immédiat, la réponse est négative. A notre avis, la situation ne dépasse pas le niveau du malaise passager inhérent à toute formation de gouvernement. Même si, acuité des positionnements oblige, le malaise est plus accentué qu’à l’accoutumée. En fait, ce à quoi il faut surtout prêter attention dans cette atmosphère particulière, c’est l’expectative accrue qui s’est installée par rapport aux premiers actes du gouvernement. Et aux premiers résultats que celui-ci obtiendra.
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rnSi la nouvelle équipe impose dans le court terme des preuves de son savoir-faire, la grogne des déçus retombera d’elle-même. Mais surtout se tempéreront les exigences de l”opinion. Tel est le sens de la recommandation adressée la semaine dernière par le chef de l”État aux nouveaux ministres. En insistant sur "le parler vrai et l”agir en vérité" qui doivent caractériser l’action gouvernementale, le président Touré avait souligné la spécificité du moment : en cheminant sur la difficulté, il importe désormais peu de décrire les obstacles. Il s”agit de les surmonter.
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rnG. DRABO
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