Kadhafi, un hôte encombrant

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Essayant de camper le personnage du Guide de la révolution libyenne,  le caricaturiste du quotidien français "Le Monde", Michel Plantu, avait fait une esquisse ainsi titrée : "mon colonel, comment on l’appelle déjà : Gedhafi, Gadhafi ou Kadhafi ?". Pour montrer qu’autant il est imprévisible le Guide de la Jamahiriya est tout aussi insaisissable. Il l’a montré, une fois de plus, à l’occasion de la célébration des 50 ans de l’indépendance du Mali.


 L’invité d’honneur d’ATT (qui ne nous a vraiment pas fait honneur) est venu se pavaner comme en territoire conquis. On savait déjà le peu de cas qu’il fait du protocole. Si l’exactitude est la politesse des rois, comme aimait à le dire Louis XVIII, Kadhafi s’en fout comme de l’an quarante. Non content de se faire désirer lors du défilé du Cinquantenaire, ses gorilles ont failli en découdre avec les forces de sécurité maliennes, mettant à mal notre souveraineté nationale. De même, pendant que ses pairs des pays invités logeaient à l’hôtel de l’Amitié avec leurs délégations, Kadhafi a préféré passer la nuit à l’ambassade de Libye.

En  tout cas, les frasques du Guide ne se comptent plus. On l’a vu dernièrement à Paris planter sa tente de bédoin dans un jardin public, jouer à l’ostentation dans une petite ville de province dont les habitants ne rêvaient que de cette manne tombée du ciel. On a même vu un Silvio Berlusconi se jeter presque à ses pieds pour arracher des contrats en Libye. Le pays du Duce Benito Mussolini a même accepté de payer des dommages et intérêts à son ancien vassal en réparation des préjudices causés par la colonisation. Non content de prendre en otage des infirmières bulgares, Kadhafi vient de prendre faits et cause pour son fils esclavagiste, Hannibal, tortionnaire de ses propres domestiques, en exerçant le chantage sur la petite Suisse.

Le Guide de la révolution du 1er septembre 1969, tombeur du roi Idriss Senoussi 1er, a été, certes, ramolli par dix ans d’embargo onusien et le bombardement en avril 1986 par le faucon Ronald Reagan de Tripoli et Benghazi, mais est-il devenu, pour autant, fréquentable ? Même si, par ailleurs, il a cessé de soutenir le terrorisme. Sans doute enivré par les pétrodollars, Kadhafi poursuit son expansionnisme par d’autres moyens. Pays très vulnérable parce que pauvre et sans cesse menacé par l’irrédentisme et le terrorisme, le Mali est l’une de ses cibles privilégiées. Les Libyens ont déjà acheté tous les grands hôtels de Bamako, ils sont dans les hydrocarbures et sont en train d’investir dans les terres de l’Office du Niger. Quelqu’un disait qu’il ne reste plus à ATT qu’à leur vendre le palais présidentiel de Koulouba pour que ceux qui viendront après lui soient des SDF qui dorment à la belle étoile. Après tout, le docteur Faust a vendu son âme à Méphisto. Allons-nous vendre, à notre tour, notre âme au tsariste Kadhafi? Peu s’en faut, en tout cas, vu le ballet aérien organisé entre Bamako et Tripoli.

Difficile de comprendre, quelle que soit notre misère, que nos dirigeants aillent faire des courbettes au pied du Guide pour ramasser quelques miettes tombées de sa table. Nous ne sommes ni le pauvre Lazare et encore moins Job. Alpha a failli déménager à Tripoli à bord de l’avion de Sani Abacha. ATT a emprunté le même chemin. A quelle sauce serons-nous mangés demain si nous continuons à osciller entre le colonialisme algérien et l’impérialisme libyen ? Or, l’impérialisme, disait Lénine, est le stade suprême du capitalisme.

N’y a-t-il donc pas pour le Mali une troisième voie, comme le prônait Kadhafi lui-même dans le "Livre vert", c’est-à-dire une voie intermédiaire qui arracherait des tentacules du monstre ?

Mamadou Lamine DOUMBIA

 

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