Infos ou intox ? Le compte de feu

0

Le week-end dernier a été riche en événements : les loups sortent enfin du bois où ils n’étaient guère pourtant cachés, pour réaffirmer leurs droits à la succession au général ATT. La meute est dirigée essentiellement par trois des cinq ayant les crocs les plus acérés.

Les prétentieux au trône d’Amadou Toumani Touré, enfin, décident de mettre fin au round d’observation. Trois des plus en vue ont mis à profit le week-end dernier pour jauger la foule et mesurer leur cote de popularité. Il s’agit de Soumaïla Cissé de l’URD, «présidant» la cinquième conférence régionale de son parti à Ansongo (7ème région), de Modibo Sidibé, indépendant, trônant devant les clubs et associations de soutien à sa candidature, et d’Ibrahim Boubacar Kéita, grâce à un appel lancé depuis Paris par Synergie Diaspora Malienne Europe. Les trois hommes ont un point commun : aucun n’a officiellement déclaré sa candidature à la prochaine présidentielle. En effet, le premier est seulement investi par son parti, le second est appelé fortement par ses partisans à se déclarer le plus tôt possible. Quant au troisième, toujours légaliste et protocolaire, il attend des assises régulières et officielles de son parti en charge de l’investir. Toutefois, concernant les trois, leur désir de succéder à l’actuel locataire de Koulouba n’est qu’un secret de polichinelle. Tout au plus, les observateurs sont plutôt surpris qu’ils aient attendu tout ce temps pour sortir des bois.

Ils l’ont enfin fait, et leur comportement respectif, et surtout leurs propos, sont assez révélateurs, même s’ils sentent le discours traditionnel du «chercheur de place».

Soumaïla Cissé, candidat battu à plates coutures lors du deuxième tour de la présidentielle de 2002, aurait souligné, à Ansongo, la nécessité pour tous les Maliens de se donner la main, quelles que soient leurs orientations politiques, pour le porter à Koulouba. Apparemment, il aurait reçu à débaucher quelques migrants politiques puisque selon L’Indépendant (21 novembre), un président de conseil de cercle indépendant, des maires, élus locaux et autres notabilités «ont rejoint» Soumaïla Cissé. Le racolage aura donc fonctionné pour « l’enfant de Niafunké », lequel n’a plus qu’à rejoindre Ouagadougou avant de s’entrainer à la luxure de Koulouba dans sa « résidence du bord du fleuve Niger à Badalabougou-Bamako »

A 1300 kilomètres de là, «l’indépendant» Modibo Sidibé succombait aux chants de sirène de ses clubs et associations de soutien, tout en gardant la tête froide et bien droite sur ses épaules. Il faut beaucoup de sueurs, d’actions et d’efforts sur le terrain pour prétendre à Koulouba. «Montrez que vous êtes une grande force», aurait-il demandé à ses affidés, aux dires de Nouvel Horizon (21 novembre). Mais l’ancien Premier ministre n’est pas dupe, il sait que «ses» seuls clubs et associations ne lui suffiront même pas pour sauter un tertre, et que les formations politiques ne seraient pas de trop. Du reste, des partis seraient prêts à le soutenir par une plateforme. Avec tout ce beau monde, il convient, pour le superflic, de quadriller le pays, d’en faire l’état des lieux afin de savoir où ils sont faibles et mal implantés, et de faire un appel à la débauche.

Le troisième bienheureux s’appelle Ibrahim Boubacar Kéita. Si sa candidature se confirme, il en sera à sa troisième tentative d’escalade. InfoMatin : succession d’ATT, la diaspora malienne a choisi IBK. Le confrère rapporte les convictions de SYDIMA Europe pour qui « la situation sociale, économique et sécuritaire du Mali exige le choix d’un homme d’expériences, à l’intégrité indéniable, ayant un sens élevé de l’Etat, etc. ». Outre le fait que l’on ne doit pas trop compter sur les votes des Maliens de l’extérieur pendant que les Maliens de l’intérieur n’ont pas encore de fichier fiable, IBK doit affronter quelques contestataires. En premier lieu, ses anciens camarades de l’Adema partis fonder le MIRIA. Ils ne veulent pas d’un IBK imposé en dehors de tout débat démocratique au sein du parti. Ils en veulent à la direction de leur parti d’avoir choisi IBK sans leur consentement, et sont résolus à mettre en question l’accord du 29 octobre dernier. En second lieu, plusieurs cadres de l’administration qui, tout en reconnaissant les mérites personnels d’IBK, lui reprochent sa trop grande sensiblerie. Ils ne veulent pas d’un chef d’Etat qui pleure à tout va et qui n’a pour seul bâton de commandement qu’un kleenex à essuyer des larmes.

Néanmoins, ces trois hommes croient avoir fait illusion, ce week-end, et vivent déjà dans les nuages. En ignorant que le conte de fée pourrait très tôt se transformer en compte de feu.
Cheick Tandina

Commentaires via Facebook :