«Zou déçoit ses propres partisans pour n’avoir pas assisté à l’Assemblée constitutive du parti CNAS». C’est Info Matin (21 juin) qui s’offusque que le Premier Ministre de la transition, Soumana Sako, n’ait pas pris part au baptême du parti Convention Nationale pour une Afrique Solidaire (CNAS). Le fait peut en effet paraître bizarre et incongru pour le citoyen lambda, car cette nouvelle formation politique est censée être la rampe de lancement vers Koulouba pour «Zou». A préciser toutefois que Sako ne figure nulle part dans les instances de ce parti, ni comme cadre ni comme membre de sa direction.
Il n’en réclame pas la paternité comme un Soumaïla Cissé qui est le fondateur de l’URD. Personne, à part peut-être l’intéressé lui-même, ne peut dire avec précision, à l’heure actuelle, pourquoi Sako n’était pas présent à Niamakoro pour le lancement de CNAS. Mais ce qui est sûr, c’est que ce jour-là, il n’était même pas au Mali. A l’analyse, cette absence de «Zou» est une bonne chose. Elle prouve qu’il ne fait pas de ce parti sa chose personnelle, son patrimoine propre. Dans un Mali où les leaders politiques nous ont habitués à s’identifier à leur parti, où, pour parler, par exemple, on dira le RPM d’IBK, le CNID de Mountaga Tall, le Parena de Tiébilé Dramé, le MPR de Choguel Maïga, Yelema de Mara. Dans ce Mali donc, on a l’impression que ces partis ne survivraient pas à leur illustre fondateur. De fait, le MIRIA est quasiment mort avec Mamadou Lamine Traoré, l’UFD avec Demba Diallo, le BDIA avec Tiéoulé Mamadou Konaté, le Barica, avec «Gaucher», etc. En réalité, il n’y a qu’un seul parti qu’on identifie à personne en particulier : c’est l’Adema-PASJ, qui est resté vivant et vivace malgré le départ (décès, démissions, retraites) de la plupart de ses pères fondateurs. Mieux, quoi qu’on dise de lui, il demeure le parti le plus fort, le plus représentatif, le mieux implanté, mais aussi le plus hétéroclite car regroupant des hommes et des femmes de divers horizons. Bref, un véritable faiseur de roi. Il est alors heureux qu’un autre parti, la CNAS, en l’occurrence, suive ses traces. Et qu’on en finisse enfin avec ces partis unipersonnels à responsabilité unique. Ce ne serait que justice pour ces nombreux hommes et femmes qui triment continuellement et péniblement sans être cités.
A propos de justice, «le premier Magistrat de la République», Amadou Toumani Touré aurait déclaré (Indépendant, 21/06) que «la justice n’est pas faite pour être aimée, mais pour être respectée». Le chef de l’Etat aurait eu encore plus raison s’il avait déclamé que la justice doit être aimée et respectée. Et expliquer aux Magistrats devant lesquels il s’exprimait que si la justice, au Mali, n’est ni aimée ni respectée, c’est que le système de distribution de la justice est malade agonisant. Et la faute en incombe en très grande partie à ces Magistrats qui rendent la justice au faciès, selon l’épaisseur du portemonnaie, ou la longueur du carnet d’adresses. Les juges, dans une large proportion, aiment l’argent. Bien qu’étant un des corps les plus et mieux payés de la République, ils ne crachent jamais ni dans la soupe ni sur quelques bakchichs. Et dans un pays, pauvre parmi les plus pauvres, où il y a plus de 90% de paumés qui n’ont pas les moyens financiers d’être satisfaits d’une décision de justice, ce serait rêver que de croire que la justice sera aimée, a fortiori, respectée. Tout au plus, elle continuera d’être crainte par ces plus de 90% de paumés, et instrumentalisée par les moins de 10% qui jouissent, souvent indûment, des richesses et ressources du pays. En maintenant la majorité dans son état de dépendance et de dénuement.
Pour échapper au dénuement et à la dépendance, il paraît que le meilleur moyen est de travailler pour générer des revenus. Et pour cela, il faudrait d’abord trouver du travail. Le président du parti CARE a, semble-t-il, la panacée. Cheick Boucadry Traoré, fils de… : «Nous avons un ambitieux programme de lutte contre le chômage et un plan d’action pour l’emploi salarié» (Indépendant, 21/06). Sans trop oser croire que l’ex-fiston national prend ses désirs pour des réalités, il faut quand même reconnaître que cela ressemble fort à un slogan de campagne, vu qu’il est candidat pour la prochaine présidentielle.
Car, pour avoir beaucoup voyagé, Cheick Boucadry Traoré a certainement constaté que même dans les pays les plus riches, les plus industrialisés, où la création d’emploi est permanente, où existent des activités à haute intensité de main d’œuvre, le chômage est chronique et récurrent. Alors, casse-tête des pays du G 20, donc cauchemar des Nations du «G faim». M. Traoré, vous serez quand même entendu. Les Maliens ont cette patience. Après tout, n’ont-ils pas écouté et voté pour un certain Maribatrou qui promettait de tuer tous les moustiques de Bamako et d’éradiquer définitivement le paludisme ?
Cheick Tandina