Le Soir de Bamako (6 juin 2011) : «Affaire Fonds Mondial, Oumar Ibrahima Touré inculpé et…déféré ? Jusqu’où ira le président ATT». Belle Question intéressante. Mais à première vue, le Chef de l’Etat n’ira nulle part, à part aller, comme tout président africain qui se respecte, mendier quelques sous auprès des Organismes internationaux à New York.
A en croire L’Indépendant du même jour, ATT est aux Etats-Unis «pour la reprise des aides du Fonds mondial au Mali». Aux dires du journal, l’ancien Ministre n’a été arrêté que sous la «pression» des partenaires techniques et financiers, seule condition à la poursuite des subventions faites aux pays africains dans le cadre de la lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Or, c’est à tous les pays bénéficiaires que le Fonds a fermé le robinet. Néanmoins, si l’information était avérée, il faut craindre qu’ATT, une fois que les PTF auraient concrétisé les promesses faites en octobre 2010, de lui donner «11,7 milliards de dollars», ne s’empressent de mettre en liberté son encombrant inculpé, sans jugement. Mais à l’URD, on ne veut pas de cette solution. Le parti de l’ex-Ministre reste confiant et «estime qu’il va y avoir un procès équitable, juste respectant tous les droits de la personne humaine et à un blanchiment par la justice» de son Vice-président (Les Echos, 06/06). Difficile de croire à cela de la part des responsables d’un parti au sein duquel Oumar Ibrahima Touré est perçu depuis quelques années comme un pestiféré, un trouble-fête qui refuse le jeu du lèche-majesté pour réclamer plus de démocratie et de transparence dans le parti. Il est temps, depuis quelques temps, que l’arbre cachant la forêt, l’on avait cru qu’avec ses nombreuses sorties politiques, l’homme avait retrouvé une odeur de sainteté. Difficile de croire en cela aussi. Autrement, l’inculpation du Monsieur se serait faite sans tambours ni trompettes, ni balafons. Et puis, les Magistrats n’auraient jamais décidé d’eux-mêmes de le faire dormir dans une chambre quelconque de l’ACI, aux prises avec les moustiques. Il est vrai que dès le lendemain, Touré, qui est tout de même un ancien Ministre de la République, a retrouvé le confort douillet de sa villa. Contrôle judiciaire, dit la justice, assortie de 13 conditions qui lui interdisent de mettre le nez dehors, de téléphoner ou de bouffer son argent sans l’accord du juge. Il ne sera pas le seul.
En effet, le président ATT, toujours prompt à faire bonne mesure et à séparer le vrai de l’ivraie, a donné son feu-vert pour l’arrestation de forteresse d’un colonel, débarqué vendredi dernier, en Conseil de Ministres, de son fauteuil de Directeur du service social des armées. On lui reproche d’avoir détourné l’argent des pagnes des épouses de militaires. Crime hautement grave depuis qu’ATT a décidé de faire monter les femmes sur tous les piédestaux de la Nation. Même si ces femmes ont déjà porté les pagnes, même si les maris ont déjà payé, il est inconcevable qu’elles soient victimes d’une telle indélicatesse. Question : qui jugera le Colonel ? L’histoire qui n’est pas encore finie, ne le dit. Ira-t-il en prison ? Peut-être.
Toujours est-il que ces derniers temps, il est question pour ATT, selon l’Option du 07 juin, d’humaniser les prisons. Il paraît, aux dires des très sérieux Députés, que les lieux de détention maliens sont des «mouroirs» qui insultent les droits fondamentaux de l’homme. Au cas où l’ancien Ministre de la Santé et le Colonel social venaient à être mutés en ces lieux par le vénérable Sombé Théra, ils ne seraient nullement dépaysés et ne manqueraient de rien. Foi d’ATT. Ah, ces semaines et ces journées nationales, africaines, mondiales ou internationales ! Elles sont toujours l’occasion pour les politiques de tenir des promesses dont la plupart restent à l’état de promesses. C’est pour cela d’ailleurs qu’elles sont faites.
Cheick TANDINA