Quand on dit que le problème touareg au Mali a sa source dans la décolonisation française opérée par la Ve République dont le père est le général De Gaulle, des officiers de cette époque et même de maintenant rétorquent avec arrogance que le Mali (qui est vaste et représente deux fois la superficie de la France), incapable de résoudre ses problèmes internes, accuse gratuitement l’ancienne métropole de les fomenter.
Dans la foulée de la décolonisation de l’AOF et de l’AEF, non réussie par la IVe République (1946-1958), le général De Gaulle arrivé au pouvoir en 1958 pour la seconde fois, avait cru trouver la bonne solution pour les régions sahélo-sahariennes en s’appuyant sur l’Organisation commune des régions sahariennes (OCRS) imaginée et créée par des prédécesseurs dont le jeune ministre des Colonies Max Lejeune.
Cette OCRS, dans l’esprit de son promoteur, devait englober une large partie du Sud de l’Algérie, du Niger, du Mali et de la Mauritanie mais les muscles que montra l’Algérie, qui venait d’imposer à la France sa volonté d’indépendance, fit reculer de plusieurs pas les autorités françaises.
D’ailleurs, au départ, le projet était conçu dans le sens d’une institution de collaboration économique visant la mise en valeur des richesses du sous-sol saharien mais il n’eut pas un bel avenir politique et économique et resta comme un document fossile aux mains des cadres touareg qui en ont accès.
Mais la mauvaise foi de ceux-ci est évidente car l’organisation ne visait aucun but politique et nulle part il n’y est question des touareg du Mali, du Niger ou de la Haute Volta et c’est par escroquerie intellectuelle que les touaregs de ces pays s’y réfèrent pour poser des revendications politiques.
C’est bien sous l’influence de l’ancienne métropole et des promesses mirobolantes que celle-ci, en cas d’autonomie, agita à ses yeux que la minorité touareg allée à l’école française, fit prendre les armes par une partie de la population contre l’Etat malien en 1963. Les complications des relations politiques et idéologiques entre la France et le Mali ont déteint sur ce conflit qu’on aurait pu éviter dès 1960 comme au Niger ou en Haute Volta.
Il est vrai que depuis cette date, les gouvernements de ces pays tous issus du RDA, ont choisi de coopérer avec la France et de rester dans son giron en toute chose. Le Mali, au contraire, dirigé par l’US-RDA, fit le choix contraire à la grande colère des dirigeants français. La création des sociétés et entreprises d’Etat (SEE) contraire à la logique libérale prônée par la France, ajoutée à celle de la monnaie nationale, finit par mettre le feu à la case anciennement commune entre les deux pays.
La première rébellion, celle de 1963, fut sciemment mal expliquée par les Occidentaux et décrite comme une révolte contre la faim et la misère comme si le reste du Mali vivait dans l’opulence à côté des misérables peaux claires du désert. Il faut savoir qu’en 1960, le Mali ne disposait que de 6 régions et que celles de Tombouctou et de Kidal n’existaient pas encore ; la couverture administrative et militaire faisait cruellement défaut et c’est ce qu’exploitèrent les dirigeants français de l’époque.
Les récits de vie et de voyage faits par certains fonctionnaires dont des vétérinaires et des maîtres d’école font ressortir assez clairement que les conditions d’existence des populations de Kidal étaient identiques à celles de certaines régions comme le Sahel occidental ou du Centre comme le Macina.
Malgré tout, l’Etat malien fut accusé dans cette affaire de favoriser le développement des régions du Sud aux dépens de Kidal. La faible défense présentée par le gouvernement malien en ces temps où la communication existait si peu ou en tout cas aux mains des grandes agences du Nord, eut sans doute comme conséquence de mettre en orbite les rébellions futures de 1991 et de 2012.
Aujourd’hui, la population de Kidal est tellement mélangée que c’est par pure fanfaronnade que quelques grandes familles soi-disant nobles et aristocratiques, s’en proclament les chefs. L’accueil fait à l’armée nationale le 14 novembre 2023, où il y avait plus de têtes noires que de têtes blanches ou brunes, montre avec éloquence que cette population était enfermée selon les règles de l’omerta et obligées de soutenir la CMA et ses suppôts.
Facoh Donki Diarra
Ecrivain