Histoire de la Librairie Populaire : La mise au point d’Amadou Djikoroni

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Suite à votre livraison n°979 du 3 août 2007, où il est question de la Librairie populaire du Mali, je vous prie de publier cet article comme une mise au point à l’adresse de M. Amadou Touré.rn

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C’est en 1961 que le gouvernement a attribué au bureau exécutif de la jeunesse de l’US-RDA le « Soudan Club », actuel Carrefour des jeunes. C’était un établissement jusque-là interdit aux indigènes que nous étions. A l’intérieur, il y avait un petit meuble contenant quelques centaines de vieux romans aux feuilles jaunies (300 environ) et de vieilles revues. La jeunesse a décidé de transporter le meuble et son contenu à la permanence du parti (actuelle Primature) et de m’en confier la gestion.

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J’étais sous le coup d’une révocation de la fonction publique pour mes opinions indépendantistes (1958-1961). J’avais subi cette sanction, du seul fait que j’avais décidé de lutter contre le référendum gaulliste de 1958. J’étais pourtant un militant avéré au sein de l’US-RDA. Je conserve encore le document que j’ai reçu du bureau politique national en février 1954 pour me féliciter pour mes activités à Garalo (cercle de Bougouni).

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J’avais persisté sur mes positions et me suis engagé avec ceux qui créèrent le Parti africain de l’indépendance et qui me firent l’honneur de m’élire secrétaire général de cette formation dont l’option était : indépendance nationale et socialisme. Durant ma révocation, j’avais jugé que la meilleure activité à laquelle l’enseignant que j’étais depuis plus de 18 ans pouvait s’adonner, c’était de créer la première librairie tenue par un Soudanais : la « Librairie de l’Etoile noire », les jeunes avaient pensé que la meilleure utilisation de mon expérience était de me confier cette charge.

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J’ai accepté le principe d’autant plus que l’Histoire venait de me donner raison car le Mali avait arraché son indépendance. Mais aussitôt m’est venue l’idée d’agir pour apporter une contribution plus importante à l’éducation de la jeunesse et du peuple malien. Mes relations avec les éditeurs français étaient excellentes puisque j’étais rigoureux dans la gestion et que je payais au comptant toutes mes commandes.

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Sans participation de l”Etat

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J’étais vice-président du Mouvement soudanais de la paix. Je me suis porté volontaire pour représenter le Mali au Conseil mondial du Mouvement de la paix à New Delhi en Inde en mars 1961. Ce qui m’a permis de passer par Paris et de visiter Pékin, Moscou et Berlin-Est pour y concrétiser des contacts que j’avais noués auparavant pour obtenir un pactole de 52 000 000 (cinquante-deux millions de F CFA) dont 36 000 000 fournis par le CDLP (Centre de diffusion du livre et de la presse), une société de librairie qui était propriété du Parti communiste français. Les sommes m’étaient prêtées avec des délais de remboursement convenables.

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Je fais remarquer au passage que les engagements que j’avais pris avec les amis qui m’ont aidé à l’époque, n’impliquaient ni la responsabilité de la jeunesse, ni celle du gouvernement. Et je les ai tous honorés sans aucune participation de l’Etat.

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Ces opérations ont abouti à mettre une croix sur toutes les solutions qui visaient à la fermeture de ma librairie et à l’acquisition de ses stocks par la petite bibliothèque de la jeunesse. Aussi toutes les propositions de rachat ont-elles été abandonnées. Et la Librairie populaire de la jeunesse a été inaugurée le 17 octobre 1961 par une délégation de la jeunesse conduite par feu Halidou Touré. Ce n’était pas encore une société d’Etat. J’ai attendu de recevoir les fonds conclus et les stocks promis pour faire d’une pierre deux coups.

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C’est en janvier 1962 qu’après avoir fermé ma librairie personnelle qui s’appelait « Librairie de l’Etoile noire », j’ai fait don à l’Etat malien, de cette institution économique et culturelle avec à son actif :

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– 52 000 000 (cinquante-deux millions de F CFA) ;

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– des stocks de livres et diverses fournitures scolaires et de bureau ;

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– un véhicule.

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Et c’est seulement en février 1962 que l”Assemblée nationale du Mali a consacré l”acceptation de mon don par le vote d”une loi portant création d”une société d”Etat dénommée Librairie populaire du Mali. L”Etat devait selon cette loi, verser à cette société un capital de 25 000 000 (vingt cinq millions) de F CFA. Jamais aucun centime de ce montant n’a été versé à la société jusqu’au coup d’Etat du 19 novembre 1968.

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Néanmoins en 1965, alors que l”Etat n”avait pas encore versé un seul franc du capital annoncé, la Librairie populaire du Mali qui avait déjà bien prospéré sur les dons que je lui avais faits et aussi grâce au travail des agents, a racheté la société française Ferre qui comprenait :

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– La salle du Soudan Cinéma ;

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– Une librairie, la Librairie papeterie du Soudan ;

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– Une imprimerie (Soudan Imprimerie) ;

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– Des bureaux ;

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– Un logement et des dépendances ;

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– Des magasins de stockage ;

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– Une cour suffisamment grande pour de nouveaux investissements.

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C”est cet ensemble qui deviendra les Editions imprimeries du Mali (Edim) sans aucune participation financière de l”Etat.

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En 1966, toujours sans apport de l”Etat, la Librairie populaire du Mali a acheté l”immeuble Salim qu”elle a démoli pour ériger à sa place l”immeuble qui fut son siège et celui de la Librairie nouvelle SA en face du Centre Djoliba, Avenue Modibo Kéita. Pour cette construction également l”Etat n”a fourni aucune aide.

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Donc ni l’Etat malien, ni le bureau politique de l’US-RDA, ni la Tchécoslovaquie, ni les USA n’ont participé au capital de la Librairie populaire du Mali.

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A la date du coup d”Etat, la Librairie populaire du Mali qui jouissait d”une santé économique remarquable (on peut requérir l”avis d”un des contrôleurs d”Etat de l”époque, le Dr. Oumar Makalou ou M. Yamadou Diallo) possédait des immeubles et des stocks importants dans toutes les régions du Mali. Le Comité militaire a trouvé dans nos caisses, nos comptes en banque et CCP le 19 novembre 1968, une somme de 2 640 000 000 (deux milliards six cent quarante millions de francs maliens). Ce jour-là, le directeur du complexe Librairie-Imprimeries-Ocinam que j’étais, n’avait en poche que 400 francs maliens et en banque 6000 francs.

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J’habite dans la maison paternelle à Bolibana depuis 1934 et encore aujourd’hui ; je vis dans des chambres en banco que j’ai construites en 1951. Durant tout le temps pendant lequel j’étais aux affaires (de 1961 à 1968) je n’ai pas bougé de là. Et ma famille n’a pas eu à évacuer un logement de l’Etat après le coup d’Etat de Moussa Traoré en 1968. M. Amadou Touré connaît ma modeste maison pour m’y avoir rendu visite plusieurs fois. Je ne possède aucun terrain ni aucun immeuble dans le district de Bamako. Et je n’en suis pas malheureux. Bien au contraire. Je suis fier de ne m’être pas enrichi comme bien d’autres l’auront été après moi, à la tête des sociétés que j’ai dirigées.

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S”agissant de l”apport de l”Etat à la Librairie populaire, on ne peut mentionner qu”une somme de 25 000 000 francs maliens de soutien en 1981, car il ne peut s”agir de capital après 20 ans d”existence d”une entreprise qui était même déjà en danger.

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Contrevérités

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Je ne sais pas où M. Amadou Touré a puisé ses informations, mais je ne peux m’abstenir de remarquer que sauf pour motif de paresse intellectuelle ou autre raison moins admissible encore, il lui était loisible d’aller à la source, et ne pas se contenter de soi-disant « témoignages » pour parler d’un sujet aussi concret en affirmant des choses qui relèvent de l’affabulation.

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Quand il parle de « conseil d’administration » concernant la Librairie populaire, il ignore qu’à cette époque, il n’y avait pas ce genre de structure à la tête des sociétés d’Etat. Il y avait plutôt des « comités de gestion » avec participation des syndicats et du groupe politique. Option politique oblige.

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Quand il parle de réunion de conseil d’administration du 15 juillet 1961 pour une société d’Etat créée en février 1962 par une loi de l’Assemblée nationale, il semble qu’il ne se soit même pas donné la peine de lire le document de création.

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Quand il parle d’apport financier du Centre culturel américain, M. Amadou Touré ignore que celui-ci était viscéralement opposé à la politique de diffusion de la Librairie populaire du Mali. Les livres marxistes notamment donnaient des migraines aux conseillers culturels américains qui étaient tous opposés au travail que nous faisions. Donc, jamais un seul dollar n’est entré dans nos caisses.

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Quand il parle de dotation financière du bureau politique de l’Union soudanaise RDA, il ignore que jamais le parti US-RDA ne s’est impliqué dans la gestion des sociétés d’Etat autrement qu’à travers l’action des militants travailleurs membres du groupe politique lequel n’a qu’une influence morale. M. Amadou Touré, manifestement, n’a aucune idée de la façon dont les affaires étaient organisées sous la Première République.

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Quand il parle de librairies privées pouvant intervenir dans une opération de création de la Librairie populaire en 1961, il ignore qu’à cette époque, seules existaient deux librairies françaises opposées à tout système étatique du genre. D’ailleurs elles ont fini par fermer ; c’est pourquoi nous avons pu en acheter une : la Librairie Ferré dont je parle plus haut. Je fais grâce à M. Amadou Touré de ses insinuations au sujet du manque de transparence à l’époque.

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J’arrête ici les remarques pour signifier à M. Amadou Touré que je comprends que ceux et celles de la génération actuelle, qui piquent une crise dès qu’on évoque la rectitude morale des dirigeants et des cadres de la Première République, sont presque tous, comme le dit si justement le Pr. Dialla Konaté, des « loups pour le Mali ».

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Quand on ne voit même pas la rupture qui s’est produite dans ce pays aujourd’hui, c’est le signe évident d’un état préoccupant pour quelqu’un qui prétend donner des leçons. Oser afficher avec autant d’assurance son ignorance feinte ou réelle de la situation actuelle nous rappelle la fameuse mise en garde du Recteur Capelle qui a dit : « Il n’y a rien de plus terrible que l’ignorance en action ! »

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Eclairer les faits

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Il est vrai que le cas du Mali n’a rien d’exceptionnel car les ouvriers français ont toujours dit au sein des partis et syndicats de gauche, qu’il y avait dans leur pays des docteurs, des agrégés d’université, de soi-disant intellectuels bardés de diplômes et qui étaient de véritables analphabètes politiques. Nous devons être tolérants pour les nôtres qui souffrent en plus de ce que le président Modibo Kéita désignait par l’expression « aliénation mentale », le plus profond et le plus tenace des maux que nous ont légués quatre vingt ans de domination coloniale et qui se manifeste par « le manque de personnalité et la paresse intellectuelle ».

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Loin de moi toute idée de panégyrique du passé ou de noircissement outrancier du présent. Le Mali de toutes les époques, contient dans la grande majorité de son peuple, des femmes et des hommes de très grande valeur. Les débats d’aujourd’hui doivent nous permettre d’éclairer les faits, les enjeux, de dessiner des perspectives heureuses pour l’avenir, d’armer les forces de progrès et d’engager les meilleures actions pour le bénéfice du peuple. Le négationnisme et la volonté acharnée de détruire n’y seront d’aucun apport. Dommage pour ceux dont l’essentiel des activités consiste à pérorer pour se satisfaire de la situation actuelle en insultant le passé.

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Je suis de ceux qui sont animés d’un optimisme inaltérable et qui croient qu’il existe au Mali et dans notre diaspora, des forces de changement incarnées par des hommes, des femmes et des jeunes, civils et militaires capables de hisser cette belle nation à la place qu’elle mérite dans le concert des nations. Et dans ce sens je tire mon chapeau pour le Pr. Dialla Konaté que son éloignement du territoire national n’handicape en rien et qui est remarquable pour son punch patriotique.

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Le 19 novembre 1968, l’essentiel de ce qui existait en nature, en espèces ou en banque et CCP (compte courant postal) était le fruit du don qu”en janvier 1962 j’avais personnellement fait à un Etat auquel je croyais, le fruit du travail d’une équipe de patriotes qui ont su faire fructifier les aides évoquées plus haut, au service d’un idéal commun.

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Vingt ans après le coup d”Etat et surtout après avoir mis à terre la société, le régime militaire a décidé dans sa politique de liquidation nationale, de vendre la Librairie populaire du Mali. A la table des négociations le 20 mars 1988 j”ai eu à dire ce qu”était la Librairie populaire du Mali en réplique à un opérateur économique qui demandait que le ministre des Sociétés et Entreprises d”Etat de l”époque, M. Antioumane Ndiaye, prie les prétendants peu nantis comme moi, de se retirer car la Librairie populaire du Mali étant une affaire de gros sous, ils n”y avaient rien à voir.

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Ma déclaration comme quoi personne plus que moi, bien que peu nanti financièrement ce jour-là, n”a le droit de parler de la Librairie populaire du Mali qui était ma création, mon œuvre à moi avec la collaboration consciente, responsable de la brillante équipe de mes camarades travailleurs, qui ont mérité tous les éloges pendant 20 ans de loyaux services ; ces travailleurs qui cumulaient à ce moment-là, 17 mois de retard de salaires, qui risquaient de perdre leurs emplois pour aller grossir les rangs des nombreux déflatés qui traînaient dans la misère.

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Aussitôt, la présidence de la République informée, a demandé à l”Assemblée nationale, par lettre confidentielle n°228/C du 23 mars 1988 de nommer une commission parlementaire spéciale d”enquête pour vérifier mes dires avant une éventuelle réaction du régime militaire qui s’apprêtait à sévir encore une fois contre moi. La dite Commission, conformément à cette directive et en exécution de l”ordre de mission n°10/AN-RM du 20 avril 1988 était composée comme suit :

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– Président M. Moussa Touré, vice-président de l”Assemblée nationale, président du groupe parlementaire UDPM

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– Vice-président : M. Bilal Kéita, député, président de la Commission de l”intérieur, de la justice, de la défense et de la sécurité

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Membres :

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Messieurs  Boubacar Kassé, président de la Commission des affaires étrangères

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– Almamy Koreychi, président de la Commission des finances

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– Sadio Bathily, président de la Commission du développement

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– Mme Diarra Diagossa Sidibé, présidente de la Commission de l”éducation

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– Nouhounzo Diarra, député

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– Sayon Coulibaly, député

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– Ngolo Sangaré, député

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– El hadj Sékou Cissé, 3e secrétaire parlementaire

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– El hadj Oumar Amadou Sow, 2e questeur de l”Assemblée nationale

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– Amadou Tandia, député

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– Bah Coulibaly, député

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– Yacouba Tamboura, député.

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Il est vrai que pour faire diversion, on a emballé l”enquête dans un ensemble concernant cinq autres sociétés d”Etat (CMTR-Emab-Ecibev-Ocinam-Sonetra). A quoi cela a-t-il abouti ?

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Le 20 mai 1988, la Commission déposait son rapport après avoir non seulement procédé à la collecte des documents nécessaires, mais aussi entendu tous ceux qui pouvaient d”une manière ou d”une autre être impliqués dans la gestion de l”unité :

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– le collectif de direction (DG-DGA-chef comptable)

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– les membres des cellules de surveillance et d”éducation civique

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– les responsables du comité syndical

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– le ministre chargé de la tutelle des Sociétés et Entreprises d’Etat

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– le représentant du ministre des Finances et du Commerce

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– une délégation de l”UNTM conduite par M. Bakary Karambé secrétaire général.

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Voici ses conclusions concernant la Librairie populaire du Mali :

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« Créée en 1962, elle a pour mission d”assurer sur toute l”étendue du territoire national, la distribution d”ouvrages scolaires, de livres généraux, de fournitures de bureaux, d”articles de sport, de jouets, de disques.  En 1973 elle s”est enrichie d”une fabrique de cahiers.

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Elle a connu de 1962 à 1969, une réelle prospérité, grâce à une saine gestion.  Après ce fut de 1970 à 1988, le véritable déclin.

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I. Période de prospérité

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Malgré l”absence totale de tout apport financier de l’Etat, le capital social n”ayant été versé qu”en 1981 (notez bien la date 1981, c’était 20 ans après la naissance de l’entreprise ; et il y avait 13 ans que j”avais quitté la société).  J”avais fini mes détentions et déportations et j”étais en service à l”IEF de Nioro du Sahel. Précisons que le montant réel du capital annoncé et non libéré par l’Etat était de 25 000 000 de F CFA en février 1962, soit 50 000 000 de francs maliens) la Librairie populaire du Mali est parvenue à s”implanter non seulement à Bamako, mais aussi dans de nombreuses localités à travers le territoire national, et ce, grâce d”une part au dynamisme, à l”engagement, à la détermination de son directeur général de l”époque qui avait foi en son entreprise, et d”autre part à l”inestimable concours de ses partenaires commerciaux notamment Hatier et Hachette, grâce enfin à des donateurs amis (URSS et RPC).

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Pendant cette période la Librairie populaire du Mali sur fonds propres a acquis et construit son siège à Bamako, racheté le complexe Soudan Cinéma dont une aile abrite les Edim.  Elle s”est dotée de magasins de stockage et a acquis des propriétés immobilières et domaniales à Ségou, Diré, Kita, etc. Elle a élargi ses activités au contrôle des Edim et du cinéma qui, désormais, relevaient de sa direction générale.

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II. Période de déclin 1970-1988

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Après cette période qui a vu la Librairie populaire du Mali s”épanouir et élargir son champ d”actions, vint celle de grosses difficultés et le déclin, perceptible dès 1970, qui avait atteint son point culminant en 1982 ; et le versement par l’Etat du capital social ne devait rien changer à la situation qui devenait de plus en plus catastrophique. C”est alors la fuite en avant et le pillage systématique des biens de l”entreprise.  Elle est marquée par :

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– une gestion malsaine

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– la complaisance coupable de l’autorité de Tutelle, des structures de contrôle et du conseil d”administration

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– la prolifération de librairies et papeteries privées mieux soutenues par les services de l’Etat

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– le gel de certaines ressources de la société et leur affectation arbitraire à d”autres organismes

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– l”indifférence coupable du département de tutelle, face aux démarches et efforts visant sinon à circonscrire les dégâts, tout au moins à les limiter

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Il faut noter que durant cette période, la Librairie populaire du Mali fut le théâtre d”une véritable valse de directeurs et de gestionnaires. En effet, dans l”espace de 10 ans, ce sont 13 agents qui se sont succédé à la tête de cette société, rivalisant pour la plupart dans l”art de piller et partant de déstabiliser l”entreprise sous l”œil indifférent sinon coupable des ministères chargés de la tutelle et de leurs services de contrôle…

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Aussi la Librairie populaire du Mali se trouve depuis bientôt deux décennies plongée dans une longue et lente agonie dont elle ne se relèvera jamais plus.

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Malgré la compression massive de l”effectif qui est passé de 286 agents à 94 les arriérés de salaires sont impressionnants : plus de 13 mois de salaires impayés soit une somme totale de 36 millions (36 000 000 F). Outre cette somme, la Librairie populaire du Mali dissoute laisse à l’Etat malien environ 880 071 000 F de dettes. Cependant, il convient de signaler, à son actif qu’elle laisse aussi à l”Etat :

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– un immeuble (son siège actuel),

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– le complexe Soudan-Cinéma – l”actuel siège des Edim,

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– une fabrique de cahiers,

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– des magasins de stockage

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– des acquisitions domaniales à Ségou, Diré, Kita, etc. » (fin de citation)

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Bamako le 20 mai 1988

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La Commission parlementaire

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Ce rapport se passe de commentaires car il établit de manière irréfutable que :

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1. Le seul et vrai capital social de la Librairie populaire du Mali a été le don que j”ai fait à mon pays et que par la suite je me suis mis à faire prospérer jusqu”au jour où le Comité militaire nous a braqués pour faire main basse dessus

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2 . Ma gestion a été plus qu”honorable

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Aussi dès que Moussa Traoré a pris connaissance de ce rapport et contrairement à la perspective de sévices qui me menaçait, il a pris la décision de donner des ordres afin que la Librairie populaire du Mali soit vendue à moi et au groupe qui s”était formé autour de moi et qui comprenait M. Alpha Oumar Konaré, Amadou Baï Diallo, Almamy Ibrahima Nafo et Karamoko Touré.  C’était tout à son honneur. C”est ce qui a donné naissance à la Librairie nouvelle SA dont j”ai été le premier président du conseil d”administration (1988-1992).

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Quelles que soient les appréciations des uns et des autres sur le Mali politique et social d”alors, il reste incontestable que cette nation était respectée du monde et figurait parmi celles phares d”alors du continent, avec de façon absolument exhaustive, des Maliens aux affaires dans tous les rouages politiques, économiques, culturels, militaires et religieux du pays.

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Je suis de ceux qui eurent la chance d”assumer le rôle combien exaltant, de pionniers de la reconstruction nationale, de ceux qui eurent l”honneur d”extraire des carrières les premières pierres et de les transporter à pied d”œuvre. J”ai été un de ceux qui pétrirent les premiers mortiers, de ceux qui posèrent les fondations et entreprirent dans l”enthousiasme, la construction du Mali  nouveau. Aucune génération n”a été gratifiée de cette chance avant nous ; aucune autre génération n”aura cette chance après nous. C”est pourquoi nous estimons avoir été gâtés par l”Histoire.

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Tous ceux de ma génération qui ont activement et sincèrement milité dans les rangs de l’US-RDA et des organisations anticolonialistes (jeunesse et syndicats) ont acquis les qualités de courage, de désintéressement, d’abnégation, de dévouement à la cause, d’honnêteté morale et matérielle, de franchise et de loyauté, de conscience professionnelle, d’honneur et de dignité qui étaient partie intégrante de notre credo. Nous avons appris à donner et à ne jamais prendre, à servir et à ne jamais tenter de nous servir, à produire et à ne jamais exploiter, à lutter et à ne jamais nous débiner, à vivre digne, à ne jamais déchoir et démériter.

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Pour autant nous n”avons pas du tout le sentiment d”avoir accompli une œuvre achevée, parfaite. Bien au contraire, nous savons nos limites et sommes conscients de nos imperfections et de la plupart de nos erreurs et fautes. La critique et l”autocritique étaient de règle dans notre pratique quotidienne…

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Nous accueillons toujours avec modestie et reconnaissance les critiques qui nous sont faites de bonne foi. Mais nous réagissons aux calomnies et accusations mensongères par l”explication, la démonstration avec preuves à l”appui, et toujours dans la courtoisie et la sérénité la plus totale. Nous sommes simplement fiers de n”avoir pas failli à notre devoir de génération.Je souhaite aux générations montantes, la possibilité d”éprouver le même sentiment lorsqu”elles auront atteint notre âge actuel.

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Je reste à la disposition de tout lecteur pour de plus amples explications.

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Sentiments patriotiques.

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Amadou Seydou Traoré

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