Goonga Tan : L’Algérie de Tebboune : un pays en perte de repères

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SeIdina O Dicko

Un isolement diplomatique croissant

Dans une vidéo largement relayée sur les réseaux sociaux, le président algérien Abdelmadjid Tebboune affirme que notre pays ne pourra compter que sur ses “frères algériens”. Une déclaration qui révèle en mettant en scène, à contrario, l’isolement grandissant de l’Algérie sur la scène internationale.

Tebboune a multiplié les tensions diplomatiques avec la France, le Maroc, le Mali et, par ricochet, avec l’Alliance des États du Sahel (AES) et donc la Russie. Il s’inquiète également de l’avancée des forces du maréchal Haftar en Libye, alors que certains de ceux-là lui fournissent de l’assistance matérielle et diplomatique. De plus, il intervient activement dans la situation à Gaza et en Palestine contre Israël, soutenu par les États-Unis. Sa politique extérieure semble ainsi marquée par des contradictions et une multiplication des fronts.

L’Algérie, par ailleurs, s’emploie à réactiver un projet de route entre Tindouf en Algérie et Zouerate en Mauritanie, alors que le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad se tournent vers le Maroc pour un accès à l’Atlantique. Un contre-pied qui illustre le désarroi algérien face à une Afrique qui ne lui est plus aussi favorable.

Soutien aux rébellions et tensions frontalières

Tebboune accuse le Maroc d’avoir des ambitions expansionnistes sur le Sahara malien, tout en soutenant lui-même des mouvements régionaux contestataires. Il s’insurge de plus contre la reconnaissance par la France de la marocanité du Sahara occidental et prévient Macron d’une “grave erreur”.

Cependant, il oublie que les velléités des rebelles maliens du nord n’ont rien à voir avec celles du Front Polisario qu’il soutient. Historiquement, l’Algérie doit une dette au Mali, qui l’a soutenue durant la guerre d’indépendance. Pourtant, Tebboune semble aujourd’hui prêt à jouer un jeu dangereux au Sahel, à coups d’interventions et de manœuvres déstabilisatrices.

Un échec diplomatique retentissant

Autrefois puissance influente en Afrique, l’Algérie a subi un échec cinglant en ne parvenant pas à obtenir un siège au Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine lors du 38? sommet panafricain. Malgré une campagne diplomatique intense, la dégringolade de l’influence algérienne est flagrante. Le journal Al-Arab souligne que l’Algérie persiste à utiliser des stratégies diplomatiques désuètes des années 70 et 80, refusant de s’adapter à une Afrique en pleine mutation. Alger a non seulement perdu son rôle de médiateur au Sahel, mais s’est aussi mis à dos plusieurs nations africaines.

Une répression accrue des opposants internes

Sur le plan intérieur, le pouvoir de Tebboune durcit sa répression contre les opposants. L’ancien diplomate Larbi Zitout, fondateur du mouvement “Rachad”, a révélé l’implication de l’Algérie dans la guerre en Syrie aux côtés de Bachar Al-Assad. Classé “organisation terroriste” en 2021, son mouvement est aujourd’hui traqué par le pouvoir algérien. Si Tebboune se permet d’indexer ses adversaires, le Mali n’a-t-il pas lui aussi le droit de défendre ses intérêts contre l’ingérence algérienne ? L’Algérie semble aujourd’hui prise à son propre jeu, récoltant les fruits de son activisme déstabilisateur.

Une Algérie marginalisée

Le rapprochement du Mali avec le Maroc, notamment par des accords de coopération militaire, est une preuve supplémentaire de l’affaiblissement de l’Algérie sur le continent. L’isolement du pays est d’autant plus marquant que la diplomatie algérienne peine à convaincre, enfermée dans un discours obsolète.

Face aux positions contradictoires du gouvernement algérien, il devient difficile d’envisager un retour à des relations harmonieuses avec ses voisins. L’Algérie, autrefois moteur de l’unité africaine, parait aujourd’hui prisonnière de ses propres contradictions et d’une politique inefficace.

Vers un changement de cap ?

Cependant, la nomination du général Mohamed Amaga Dolo comme ambassadeur du Mali à Alger pourrait marquer un tournant. Connaissant bien les réalités du nord du Mali et ses liens avec l’Algérie, il pourrait être un acteur-clé dans une tentative d’apaisement.

Néanmoins, le Mali reste sur ses gardes. Les déclarations inamicales et souvent trompeuses du ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, rappellent que toute négociation doit se faire avec prudence.

L’Algérie et la France : un duel dangereux

Les tensions entre la France et l’Algérie connaissent une nouvelle escalade. La France menace de réviser les accords franco-algériens de 1968 et refuse l’entrée de l’épouse de l’ambassadeur algérien au Mali sur son territoire. En retour, Alger s’insurge contre les accusations françaises concernant “l’argent sale” de sa classe dirigeante.

Toutefois, ce climat d’hostilité n’est pas bénéfique à l’Algérie. Le Mali et l’Algérie partagent une histoire et une géographie communes qui devraient prévaloir sur les tensions actuelles. Espérons que l’Algérie saura en tirer les conclusions nécessaires pour un retour à la stabilité et à la coopération constructive, plutôt qu’à la confrontation permanente.

Seidina Oumar DICKO

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