Le président Alpha Oumar Konaré avait tenté une révision constitutionnelle qui n’est pas allée jusqu’à la consultation référendaire. Son successeur, ATT, va-t-il réussir ce pari? Le contexte plaide en sa faveur. Pour peu qu’il soit aidé par ses alliés de la classe politique.
Chat échaudé craint l’eau froide ! " L’adage est bien connu. L’épisode houleux du Code des personnes et de la famille reste vivace dans les consciences. Adopté par une large majorité des représentants du peuple en 2009, le texte qui devrait régir le droit de la famille, les successions et d’autres domaines des relations humaines au Mali a été violemment désavoué. Ce qui a entrainé son renvoi par le président de la République, soucieux de la préservation de la paix sociale, en seconde lecture devant les élus de la Nation. Plus d’un s’était alors légitimement interrogé sur ce cinglant désaveu entre le peuple et ses mandataires chargés de légiférer en leur nom. On avait glosé après sur "des déficits de communication, des incompréhensions sur quelques petits détails". Le Haut Conseil Islamique du Mali avait quasiment brandi un carton jaune non seulement aux députés mais aussi et surtout à toute la classe politique. "Plus jamais ça!" avait-on murmuré. Le président de l’Assemblée nationale, Pr Dioncounda Traoré, le nouveau candidat, au nom de l’ADEMA-PASJ, à la présidentielle de 2012, ne venait-il pas de calmer le courroux du Cherif de Nioro du fait de ce fâcheux épisode ?
L’adoption, par 141 voix pour sur les 147 députés de l’Assemblée nationale, du projet de Constitution devant réglementer la vie institutionnelle malienne dans les années à venir n’est pas dénuée d’appréhensions. Appréhensions ou inquiétudes. C’est bien le mot qui est souvent revenu sur les lèvres de la plupart des députés qui sont intervenus ce mardi 2 août à l’Hémicycle. " Nous avions des inquiétudes ou des réserves, mais après l’adoption des amendements et les explications fournies, nous sommes rassurés et nous allons voter ce texte ", nous ont confié plusieurs élus de la Nation. Si ces professions de foi sont sincères, alors, on peut légitimement affirmer qu’ATT vient réussir au premier test permettant aux députés de donner quitus pour la prochaine étape, le référendum.
Ce premier test s’identifie, volontiers, à une épreuve écrite réussie avec brio. Le candidat ATT, s’apprêtant à décrocher l’examen qui fera de lui l’"un des meilleurs présidents de la République de l’histoire du Mali", va passer bientôt le test oral. En effet, appeler le peuple malien à dire, si oui ou non, il est d’accord avec les innovations apportées à la Loi fondamentale du 25 février 1992 n’est rien d’autre qu’une épreuve orale populaire à laquelle ATT va se soumettre. Etant l’initiateur attitré du projet, un "non" à la consultation référendaire équivaudrait à un camouflet non pas à ATT seul mais aussi aux représentants du peuple qui auront été alors de véritables " godillots et des hommes liges ". Comme s’en démarquait récemment si éloquemment IBK, le leader du RPM. Mais, à analyser de près le projet, il est fort probable que le peuple adhère à cette révision constitutionnelle dans la mesure où l’essentiel des changements apportés ne portent aucunement atteinte aux populations, à leurs intérêts, à leurs valeurs sociétales ou religieuse comme ce fut le cas avec le Code des personnes et de la famille.
Mais, du fait que certains esprits sont souvent réfractaires à toute évolution, préférant l’immobilisme inhibiteur du progrès, il faut que les élus de la Nation, comme les y invitaient, mardi, Alassane Abba de la CODEM et d’autres députés, descendent rapidement sur le terrain pour expliquer les contours de la nouvelle mouture du texte constitutionnel aux populations à la base. Ce travail de restitution parlementaire est, aujourd’hui, plus qu’urgent du fait aussi de l’amorce de la dernière ligne droite de la législature. Plusieurs députés y gagneraient énormément et bonifieraient leurs chances de revenir à Place de la République en juillet 2012 lors des prochaines législatives. Le plutôt sera le mieux !
Bruno D SEGBEDJI