Monstre hybride originaire de l’Egypte ancienne le, Sphinx, dans la mythologie grecque, se présente sous l’aspect d’un lion ailé à buste et tête de femme. Cet animal fabuleux éprouvait un malin plaisir à jouer à un jeu mortel en soumettant une énigme aux voyageurs se rendant à Thèbes, les dévorait s’ils n’arrivaient pas à la résoudre. Ironie du sort, c’est justement Œdipe le fils du roi de Thèbes, Laïos, qui trouva la bonne réponse et le Sphinx mourut.
Aujourd’hui encore la statue monumentale du Sphinx trône à Gizeh tout près du Caire au milieu de la sépulture de ceux qui ont fait la grandeur de l’Egypte antique. Prenant exemple sur le héros de la mythologie grecque, Sigmund Freud nous parle du "complexe d’Œdipe", un phénomène psychique qu’il avait observé en lui-même : "j’ai trouvé en moi des sentiments d’amour envers ma mère et de jalousie envers mon père. Sentiments qui sont, je pense, communs à tous les jeunes enfants". La psychanalyse était née.
A défaut de faire un petit séjour dans un hôpital psychiatrique pour savoir s’ils sont atteints de la dengue ou de delirium tremens, la plupart de nos hommes politiques actuels doivent, en tout cas, passer chez le psy pour savoir s’ils n’ont pas perdu le nord. La plupart d’entre eux n’ayant pas de boussole à bord d’un bateau ivre, c’est la navigation à vue, l’errance dans l’immensité, la dérive et bientôt le choc contre un iceberg comme ce fut le sort du "Titanic" en 1912 au large de Terre Neuve. Démagogie, tartufferie, roublardise, vagabondage, trahison, ils n’ont plus rien à envier au Sphinx qui, lui, se contentait de dévorer les passants. Ce n’est pas pour rien qu’on appelait François Mitterrand "le sphinx de l’Elysée". Impénétrable sous sa carapace de tortue, aguerri dans le combat politique et rusé comme le lièvre dans les contes, il s’amusait malicieusement à jeter des peaux de banane sous les pieds de ses adversaires.
Le même théâtre granguignolesque nagère joué par des matamores a illuminé les feux de la rampe lors de la création du PDES. Avec une marraine et un président d’honneur fantômes, les rideaux étaient loin d’être tirés. Le cas Ahmed Sow, dont on n’a vu nulle part le nom sur la liste du bureau provisoire du parti relève, à coup sûr, de l’énigme du Sphinx. Que s’est-il donc passé pour qu’on relègue dans les bas-fonds le père du programme pour le développement économique et social (PDES) sur la base duquel ATT a été réélu en 2007. Celui-ci lui a d’ailleurs été reconnaissant en lui attribuant un portefeuille ministériel dans le gouvernement Modibo Sidibé. Mais voilà que patatra les visages pâles (les oreilles rouges) s’en mêlent. On dit que ceux-ci voulaient son scalp comme les peaux rouges savent si bien le faire pour délit de favoritisme lorsqu’il était à la tête d’une institution de l’Union européenne.
Qu’à cela ne tienne, ATT le sort du gouvernement. D’aucuns susurrent qu’il dirige aujourd’hui un organisme de financement international qui peut rendre d’immenses services au Mali. N’empêche qu’il est allé à l’ermitage. Tout se passe comme s’il avait déjà son avenir politique derrière lui. Certains affirment qu’on lui a dit de se rapetasser, de se faire plus discret, en clair de se faire hara kiri. La meilleure manière de se faire oublier et pour toujours, c’est d’être motus et bouche cousue. Assurément, ce grand commis de l’Etat et technocrate bon teint ne mérite pas un sort aussi triste. Car que sera le PDES sans Ahmed Sow? Heureusement des analystes chevronnés de la scène politique malienne affirment que ce haut cadre est le jockey caché du parti présidentiel, c’est-à-dire l’arme secrète sinon fatale pour la conquête de Koulouba en 2012. Et on sait ce que cela veut dire. Entre les mains des Allemands, les fusées de Von Braun ont failli anéantir l’Angleterre pendant la deuxième guerre mondiale tandis que Harry Trumeau utilisait la bombe atomique pour détruire Hiroshima et Nagasaki. Incontestablement, Ahmed Sow est le seul responsable du PDES capable de tenir la dragée haute à ses concurrents dans la course à la magistrature suprême, les autres n’étant que des recrues, des néophytes, des amateurs et des nains politiques. En attendant, le bavard impénitent, le bouillant Ahmed Diané Séméga joue bien son rôle d’épouvantail en ramenant les troupes et en chassant le loup de la bergerie. Et il le fait nettement mieux que le garde-champêtre Younoussi Touré à l’URD. Qu’en pense Seydou Cissouma, le conseiller à la communication d’ATT et dixième vice-président du parti ?
Mamadou Lamine DOUMBIA