En se rendant, le vendredi dernier (juste deux semaines après les présumés tentatives de sabotage du gouvernement Ukrainien), en Crimée pour superviser les grandes manœuvres russes dans la péninsule, Vladimir Poutine serait-il en train de marquer définitivement son appartenance à la « mère-patrie » ? Ce déplacement du dirigeant nationaliste russe est en tout cas, plein de significations et prouve à suffisance, la détermination des autorités russes à apporter leurs propres solutions à la crise ukrainienne qui perdure. Pourtant, ces exercices militaires qui surviennent deux semaines après les présumées tentatives de sabotage de Kiev, sont condamnés par le Président Ukrainien, Petro Porochenko, lequel redoute une invasion russe à grande échelle. Une crainte que partage aussi le Pentagone. Mais pourquoi la Crimée constitue-t-elle l’épicentre d’une telle manœuvre militaire le long de la frontière entre les deux pays ?
A Sébastopol, sont basés des milliers de soldats russes et l’essentiel de la Flotte maritime russe de la Mer Noire. Ainsi en Crimée, il est prévu que la flotte auxiliaire de l’armée russe s’exerce au ravitaillement des navires et sous-marins de guerre, aux opérations de remorquage, aux réparations techniques en mer. Au total, 2 500 soldats et 350 véhicules seront concernés pour démonter la puissance de feu de l’armée russe. Ce qui provoque l’inquiétude de Kiev à qui la partie russophone du territoire échappe depuis la crise. Une situation qui risque d’être définitive si jamais les termes des accords de Minsk II, arrachés par la Communauté internationale, venaient à être appliqués. Simplement, parce que ceux-ci lient intimement la réforme constitutionnelle concernant la décentralisation des régions russophones à leur statut spécial. Un piège que Kiev a bien compris et s’oppose à sa mise en application pour empêcher qu’à terme, ces régions ne réclament purement et simplement leur indépendance pour rejoindre la Fédération de Russie. Et quand l’on sait que d’ores et déjà, la majorité des populations du Donetsk, du Lougansk et du Donbass (d’ailleurs majoritairement favorables à Moscou) détiennent le passeport russe, il y a de quoi parier qu’un jour ou l’autre, les perspectives pour l’Ukraine de réintégrer dans son giron ces régions séparatistes, sont de plus en plus incertaines. Un pessimisme d’autant plus justifié que malgré la signature des accords de Minsk (il y a plus d’un an), entre cette ancienne république soviétique et la Russie, aucun apaisement conséquent des combats entre belligérants ne s’est réellement produit. D’où, l’état de blocage du processus politique de réconciliation enclenché entre eux. L’escalade de la violence n’a jamais cessé dans l’est de l’Ukraine. Une réalité que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui supervise la mise en œuvre du cessez-le-feu, a toujours fait part et montré sa préoccupation face à d’autres escalades de la violence dans cette partie russophone de l’Ukraine.
A ce jour, aucun des points majeurs des accords de Minsk portant sur les aspects militaires tels que le cessez-le-feu immédiat et complet, le retrait des armes lourdes, de façon à créer une zone neutre de 50 km de large, n’est complètement mis en œuvre. Un enlisement qui, naturellement, favorise le basculement à terme des républiques russophones (de facto indépendantes) dans la Fédération russe à qui, tout les lie, historiquement, linguistiquement et économiquement !
Gaoussou M. Traoré