L’Assemblée Nationale va examiner ce 19 avril au cours d’une plénière, le projet de loi portant modification de la loi électorale. Le texte adopté, selon le communiqué du Conseil des ministres du 21 mars 2018, propose des innovations comme « La suppression du vote par anticipation des membres des Forces armées et de sécurité́, le choix du nom de famille comme fondement de l’ordre alphabétique observé pour l’inscription des électeurs sur les listes électorales, la fixation de la durée de résidence minimum pour être inscrit sur la liste électorale de la commune du lieu de résidence, la précision apportée aux opérations d’inscription sur les listes électorales, l’extension au représentant de l’Etat dans le District, à l’Ambassadeur et au Consul des autorités chargées de notifier la décision de rejet de l’inscription sur les listes électorales aux intéressés, le remplacement de la carte NINA par la carte d’électeur, la précision des informations figurant sur le bulletin de vote, la fixation d’un nombre minimum d’électeurs que doit comprendre un bureau de vote, la consultation des représentants des partis politiques pour la création de bureaux de vote, la possibilité́ donnée à la majorité́ et à l’opposition de proposer des assesseurs, la réglementation plus stricte du vote par procuration, le recentrage des niveaux de centralisation des résultats au cercle et au District ».
Le texte de loi passera-t-il sans grande modification ? Difficile d’y répondre. Il se dit que les modifications apportées à la loi ont fait l’objet de consensus, même si les travaux au niveau du ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation ont été boudés par la convention de la majorité présidentielle. Et la principale formation de cette majorité, le Rassemblement pour le Mali avait rejeté de nombreuses modifications comme la confection d’une nouvelle carte d’électeur biométrique en lieu et place de la carte Nina. Il faut donc s’attendre à un débat houleux à l’hémicycle mais il ne faut pas se faire trop d’illusions. Nous vivons dans une démocratie de façade.
L’alinéa 3 de l’article 142 de la loi n°2016-048 du 17 octobre 2016 portant loi électorale qui stipule que « le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour du scrutin, il est procédé à un second tour le deuxième dimanche suivant », doit être modifié afin de permettre aux deux candidats qualifiés pour le second tour de battre campagne en toute sérénité. Le Mali est la seule démocratie de la sous région où la campagne électorale pour le second tour dure moins de 48 heures. Cela n’est pas normal mais ne gêne nullement ceux qui aspirent au pouvoir. Sinon de 2002 à maintenant, des réflexions auraient dû amener les acteurs politiques à revoir cette disposition législative.
La campagne électorale pour le second tour va commencer le 9 août pour se clôturer le lendemain, selon le chronogramme de l’élection du président de la République de 2018, publié par le ministre de l’administration et de la décentralisation.
En 2013, le 1er tour de l’élection présidentielle a eu lieu le 28 juillet. Le 2 août, le ministre de l’administration a proclamé les résultats provisoires du 1er tour. Cinq jours après, c’est-à-dire le 7 août, la Cour constitutionnelle a rendu son verdict définitif. Les deux candidats qualifiés pour le second tour, Ibrahim Boubacar Kéïta et Soumaïla Cissé, n’ont eu que 48 heures pour battre campagne. En 2002, la Cour constitutionnelle a proclamé, le 9 mai un peu tard dans la soirée, les résultats définitifs du scrutin du 28 avril pour un second tour qui a eu lieu le 12 mai.
Avec des dispositions législatives pareilles, il est difficile d’organiser un débat télévisé entre les deux candidats au second tour. L’histoire du Mali retient un seul débat télévisé dans le cadre de l’élection du Président de la République, ayant opposé en 1992 Alpha Oumar Konaré à Tiéoulé Mamadou Konaté. En 2002, le général Amadou Toumani Touré a refusé l’offre de débat de Soumaïla Cissé. De même, en 2013, le candidat du Mali d’abord, Ibrahim Boubacar Kéïta, a décliné la proposition de débat de Soumaïla Cissé.
Par Chiaka Doumbia