A la lecture du communiqué du Conseil des ministres du mercredi 15 juin 2011, les plus sceptiques se sont rendus compte d’une évidence : le président de la République, Amadou Toumani Touré est décidé à aller au bout de sa volonté de réviser la Constitution du 25 février 1992.
Enclenché depuis 2008 par la mise en place d’un comité d’experts présidée par Daba Diawara, le processus de réformes conduit par le Comité d’appui à la réforme institutionnelle entre maintenant dans sa phase décisive sous l’égide du Ministère de la Réforme de l’Etat. ”Ces réformes, dont j’ai pris l’initiative, sont souhaitables et nécessaires. Il ne s’agit pas de remettre fondamentalement en cause les institutions actuelles, mais de les adapter au rythme et aux exigences actuelles. Le processus ainsi mis en marche revêt un intérêt particulier car il concerne l’avenir de la nation et le devenir de notre système démocratique. J’invite, en conséquence, les forces politiques, la société civile et l’ensemble de nos compatriotes à porter ensemble ces idées novatrices et à développer les arguments nécessaires pour faire connaître et adhérer au Projet de révision constitutionnelle qui vise essentiellement à conforter le cadre juridique et la pratique de la démocratie dans notre pays”. Ces quelques phrases sont extraites du discours tenu le 19 avril dernier au Centre international des conférences de Bamako, par le président de la République, Amadou Toumani Touré. C’était à l’occasion de la grandiose cérémonie de présentation du Projet de réformes politiques pour la consolidation de la démocratie au Mali.
Parmi les innovations majeures, il y a la création du Sénat, d’une cour de comptes, la modification portant sur la nationalité malienne pour les futurs candidats à l’élection présidentielle, les réaménagements des pouvoirs du président de la République et ses relations avec le gouvernement, la réorganisation des institutions comme les Cours suprême et constitutionnelle, le Conseil économique, social et culturel, l’institution d’un contrôle de constitutionnalité par voie d’exception, le réaménagement des délais et du calendrier des élections présidentielles. ‘’Une assise juridique nouvelle est donnée aux candidatures indépendantes avec l’inscription du droit des groupements politiques à concourir avec les partis politiques à l’expression du suffrage…. Une meilleure assise juridique est donnée aux mesures de discrimination positive favorisant l’accès des femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives’’, peut-on lire dans le communiqué du Conseil des ministres. Ils sont nombreux à apprécier le maintien en l’état de l’article 30, relatif au mandat du président de la République. ATT a rappelé qu’il avait donné comme consigne présidentielle aux experts de la Commission Daba, de ne pas toucher à cet article qui fait l’objet de toutes les convoitises.
Une révision constitutionnelle est-elle opportune ?
Constitue-t-elle une priorité dans le contexte actuel ? Les insuffisances constatées ici et là militent-elles en faveur d’une révision ? Est-il nécessaire de renforcer les pouvoirs du président de la République ? Le bicaméralisme est-il nécessaire ? Entre partisans et opposants aux réformes, la réponse à ces interrogations varie d’un camp à un autre. Pour le président ATT et les militants de la Réforme, il faut reconnaître que la Constitution de 92 avait révélé au fil du temps certaines insuffisances. Donc, il paraissait normal qu’on puisse faire cette retouche pour un meilleur ancrage et une consolidation de notre démocratie. Ce travail a été essayé par le président Alpha Oumar Konaré. Malheureusement, celui-ci n’a pas réussi. Après l’adoption du projet de loi par l’Assemblée nationale, le président Konaré a, de façon surprenante, renoncé à son projet avant la tenue du référendum. Même si certains soutiennent que le projet avait été déclaré non conforme à la Constitution, les raisons profondes du recul du président Konaré demeurent toujours un mystère.
Parmi les opposants à la Réforme, on note la Coordination du mouvement démocratique (Co.mo.de). Dirigée par Pr. Ali Nouhoun Diallo (un homme de grande conviction), celui-là qui était président de l’Assemblée nationale du Mali au moment où le président Alpha Oumar Konaré avait pris l’initiative de toiletter la Loi fondamentale de notre pays, la Comode a multiplié les sorties contre la révision de la Constitution qui, selon lui, ne serait pas cohérente pour un président en fin de mandat.
Il y a certainement un secret détenu par les président ATT et Alpha pour entreprendre des réformes à la fin de leur mandat. L’avenir nous situera sur ce mystère !
Par Chiaka Doumbia