En espace de 48 heures, les événements se sont succédé avec une certaine rapidité depuis l’annonce de la nouvelle de l’évasion du désormais très célèbre présumé terroriste, Béchir Simoun. Ce jeune de nationalité tunisienne avait perpétré, faut-il le rappeler, un attentat contre l’ambassade de France, le 5 janvier dernier. Depuis cette date, il séjournait dans une cellule de la Sécurité d’Etat après un bref passage au commissariat du 3ème arrondissement, puis à la Brigade anti-criminalité.
Les deux agents de la Sécurité d’Etat, dont l’un était allé s’occuper de son épouse à Kati, alors qu’il était censé être de garde, ont été mis à l’arrêt de rigueur. De même que les cinq éléments du génie militaire qui assuraient la garde la même nuit.
Le mardi 1er mars, le président de la République monte au créneau. Il signe un Décret qui relève de ses fonctions le Directeur général de la Sécurité d’Etat, le Colonel – major, Mamy Coulibaly. Son intérim sera assuré par son adjoint, le Contrôleur général, Hildebert Traoré. Le gouvernement met tous les services de sécurité en état d’alerte maximum sur toute l’étendue du territoire. Il appelle tout citoyen ayant aperçu le fugitif d’informer la Brigade de gendarmerie ou le commissariat de police, le plus proche.
Le mercredi 2 mars, Béchir Simoun est arrêté à l’entrée de la ville de Gao au poste de contrôle aux environs de 4 heures du matin. Ce suppose que le présumé terroriste n’a pas directement pris la route après son évasion. Et qu’il a dû faire un bref arrêt quelque part. Malgré son intelligence, il n’a pu détourner la vigilance de nos éléments de services de sécurité qui ont réussi à l’arrêter au symbolique poste de Gao (ce poste est l’un de rares sur l’axe Bamako -Gao où l’on contrôle les pièces d’identité des passagers).
On ne comprend pas trop cette évasion, à la fois spectaculaire et étonnante. Et cela malgré la promptitude avec laquelle le président ATT a agi à travers le limogeage du Directeur général de la sécurité d’Etat, le Colonel -major, Mamy Coulibaly.
Des mystères entourent cette histoire. Et les interrogations ne manquent pas.
Comment le Tunisien a pu s’échapper d’un lieu tel que la S.E? La situation géographique de la SE (dans l’enceinte d’un camp militaire) permet-elle à Béchir de fuir aussi facilement ? Pourquoi s’est-il évadé la veille de son premier interrogatoire devant le juge d’instruction ? Y a-t-il eu une action de sabotage ?
Une évidence : une telle opération ne peut pas se faire sans avoir des complicités au sein de ce service hautement stratégique pour la bonne marche de notre pays. Cela pourrait s’expliquer par plusieurs raisons.
Primo : Béchir n’est pas un habitué des locaux de la SE pour pouvoir connaître les coins et les recoins.
Secundo : Arrivé à Bamako le 30 décembre 2010 (selon une source policière), l’homme n’est pas censé trop maîtriser la capitale.
Tertio : avec la publicité qui a entouré son arrestation, il pourrait difficilement passer inaperçu surtout à une heure tardive de la nuit. Plus étonnante, il a réussi à regagner à Gao sans être appréhendé à un poste de contrôle (or il en existe plus d’une trentaine).
Cette action a eu le mérite de révéler au monde entier les graves dysfonctionnements de la puissante Sécurité d’Etat. Or, pour la bonne marche de l’Etat et de ses institutions, elle devrait plus efficacement jouer son rôle, surtout dans un monde en pleine mutation avec toutes ces menaces transfrontalières.
Cette évasion spectaculaire est une preuve supplémentaire que la S.E (elle est pour le Mali ce que la Cia est pour les Etats-Unis d’Amérique) est un bien gros morceau pour être confié à n’importe qui.
Il faut l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Et le président ATT doit reprendre urgemment les choses en main. Car, il y va de la sécurité de ce pays. Car la patrie est en danger.
Chiaka Doumbia
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