Après le discours du Président de l’Assemblée nationale, Pr. Dioncounda Traoré, le 4 octobre dernier lors de la rentrée parlementaire, le compte à rebours a commencé avec le Projet de code des personnes et de la famille envoyé par le président de la République, Amadou Toumani Touré, en seconde lecture.
En effet, l’honorable Traoré a annoncé quelques innovations majeures sorties de leurs longues et laborieuses négociations avec les représentants du Haut conseil islamique du Mali. De nombreuses dispositions du texte ont été clarifiées, précisées ou reformulées. Comme changements majeurs, selon le président de l’Assemblée Nationale, il faudra noter essentiellement la reconnaissance du mariage religieux, la suppression de l’adoption – filiation et la reformulation de l’article 748 sur les droits de succession.”Il faut dire que ce texte consensuel, tout en gardant sa substance, a véritablement gagné en clarté et devrait, c’est mon souhait être voté par l’Assemblée nationale au cours de cette session”, a-t-il souligné.
Ces propos de Dioncounda Traoré ont été mal accueillis par une frange importante de la société civile, notamment les organisations de défense de droits de l’homme qui appellent à un rejet pur et simple des amendements islamistes. La démarche de l’Assemblée Nationale, estiment-elles, qui n’est pas démocratique, a exclu les autres composantes de la société. Entre temps, Radio France Internationale à travers son émission publique ”Appels sur Actualité” a ouvert le débat en donnant la parole à ses auditeurs. Comme elle a l’habitude de le faire. Parmi toutes les interventions, une seule aurait choqué les associations islamiques, notamment le Haut conseil islamique.
Me Kadidia Sangaré, avocate, non moins présidente de la Commission nationale des droits de l’homme, C.n.d.h, aurait déclaré que les associations islamiques n’ont pas dit toute la vérité à leurs militants lors des manifestations et autres meetings en août 2009. En guise de protestation, une marche ”pacifique” sur le Barreau malien et la C.n.d.h. était prévue. Même si elle n’a finalement pas eu lieu, ce mode d’expression est-il le mieux indiqué, surtout de la part d’autorités religieuses?
Et pourtant, elle n’est pas la première à faire une telle déclaration. Dans son discours prononcé le 5 octobre 2009 lors de la rentrée parlementaire, le président de l’Assemblée nationale, Pr Dioncounda Traoré avait estimé qu’il faut ”endiguer les effets de l’intox et des dénigrements injustifiés et calomnieux distillés à propos du code par certaines personnes qui n’en ont probablement pas lu une seule ligne.” Quelques jours auparavant, le président de la République, Amadou Toumani Touré avait mis les pieds dans les plats pour affirmer que ”la désinformation et l’intoxication ont pris le pas sur le code réel”. Personne n’a protesté, à plus forte raison de marcher sur la Présidence.
La marche avortée sur le Barreau et la C.n.d.h. n’est ni plus ni moins qu’une manœuvre visant à museler tous ceux qui oseraient émettre des opinions contraires à celles des associations islamiques. Ce qui parait inquiétant. Les religieux, quel que soit leur foi, sont censés savoir mieux que quiconque que la vérité absolue n’appartient à aucun mortel, aucune créature humaine, mais à Dieu et Dieu Seul. N’est-il pas temps, avant qu’il ne soit trop tard, que ceux qui se sont battus avec la conviction qu’il fallait instaurer l’expression plurielle dans notre pays, se lèvent afin d’opposer une résistance farouche à tous ceux qui veulent porter atteinte à l’exercice des libertés fondamentales ? Dans un pays où l’on peut se parler, il faut éviter de semer la graine de la haine. Personne n’y a intérêt, y compris ceux qui manipulent dans l’ombre les manifestations. Donc, faisons attention !
Par Chiaka Doumbia