Le procès en diffamation intenté par deux des héritiers de Dr Faran Samaké et Tiécoro Diakité contre Amadou Seydou Traoré dit Amadou Djicoroni, dont les débats au fond ont été renvoyés au 30 novembre, a vite pris l’allure d’une tribune idoine pour élucider les circonstances dans lesquelles le premier président de la République du Mali, Modibo Kéïta, a trouvé la mort dans les mains de ses geôliers au Camp Para. Il ne pouvait en être autrement puisque deux des 13 héritiers déclarés de Dr Faran Samaké, se fondant sur une ordonnance rendue le 5 février 1979 du tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako, estiment que leur père n’est nullement impliqué dans la mort du père de la nation.
Curieusement, ce sont deux de ses héritiers qui ont porté plainte pour diffamation contre Amadou Seydou Traoré. Et les autres ? Ont-ils donné leur accord ? Ou bien existe-t-il un désaccord au sein de la famille Samaké sur la procédure à suivre !
Plus de 30 ans après, les Maliens, surtout les jeunes, veulent savoir les conditions de la disparition rocambolesque du fils de Daba Keïta. Comme d’ailleurs en témoigne la forte mobilisation observée lors de l’audience de consignation le 2 novembre dernier au tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako.
Il y a des questions qui gênent, voire qui embarrassent les différents régimes qui ont eu à gérer notre pays de 1968 à nos jours. Qui expliquent leur étrange silence. Par exemple des questions du genre : pourquoi Dr Faran Samaké, psychiatre de son état, a été choisi pour suivre Modibo ? Qui peut contester la thèse selon laquelle Dr Faran Samaké était le médecin traitant de Modibo Kéïta ? Aucun médecin n’avait accès à l’ancien président. Personne ne peut le nier.
Pourquoi il n’y a pas d’enquête indépendante depuis 1977 sur la mort de Modibo Kéïta? Pourquoi en absence de toute autopsie, le général Moussa Traoré affirmé que Modibo est mort d’un problème de poumon ? Si le comité militaire qui a arrêté et emprisonné Modibo pendant 9 ans, sans jugement ni inculpation, n’a pas pu ouvrir une enquête, pourquoi les régimes démocratiques d’Alpha Oumar Konaré et d’Amadou Toumani Touré n’ont pas franchi le Rubicon ? Faut-il rappeler que ces derniers ont fait des gestes notables pour réhabiliter ”Le père de la nation”.
Alpha Oumar Konaré a construit un Mémorial Modibo Kéïta. Et, depuis l’avènement de la démocratie, le président de la République vient se recueillir chaque 16 mai sur la tombe du ”premier président”, au cimetière d’Hamdallaye. La requête de l’Union soudanaise Rda pour l’organisation les ”funérailles nationales de Modibo Kéïta” a été classée sans suite pour le moment. Et cela, pour ne pas heurter la sensibilité des victimes du régime socialiste de la première République, notamment les proches de Fily Dabo Sissoko et ses compagnons. Déjà, certains commencent à se signaler pour tenter de dévier le débat en cours. Il ne s’agit nullement de savoir ce que son régime a fait comme mal ou du bien.
Mais, de permettre au peuple tout entier de connaître les vraies circonstances de la mort du président Kéïta. ”…Les quelques jours que l’ex-président Modibo passa à Bamako et les circonstances de sa mort le 17 mai 1977 sont entourées d’un épais brouillard même pour les membres du Comité Militaire de Libération Nationale, à l’exception de ceux qui avaient le devoir de le suivre de près et de le soigner. Parmi, ces quatre, trois sont morts. Mais le général Moussa Traoré et sa conscience le général Filifing sont à même de dire qui a rédigé le communiqué annonçant le décès, en traitant l’ancien président de simple instituteur. ”
Voilà l’avis de Colonel Youssouf Traoré qui a été membre du Cmln. Donc, c’est le général Moussa Traoré qui détient la vérité. Et s’il pouvait la dire.
Par Chiaka Doumbia