«Il faut trouver la paix, il faut que les Maliens se parlent entre eux, que ce soit les jihadistes ou de l’autre côté, il faut trouver la solution parce que la guerre, ça n’arrange personne. Combien d’années ? Beaucoup de victimes. Donc, on finit toujours par négocier. Il est temps de trouver la solution……Pourquoi pas ? Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa sont des Maliens bien connus. Iyad a été un leader touareg dans le passé. Et le dialogue national l’a mentionné…Ce dialogue a demandé de négocier avec Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa. Donc, moi, je ne suis pas contre… ».
Ces propos sont extraits de l’interview accordée, le 5 avril 2021, à Radio France internationale (RFI) par Ahmada Ag Bibi. Discret et non moins bavard, Ahmada Ag Bibi est un lieutenant d’Iyad Ag Ghaly comme plusieurs responsables du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (Hcua), la composante la plus importante de la Coordination des mouvements de l’Azawad (Cma). Inamovible député du cercle d’Abeibara, il est le cousin de feu Cheick Ag Haoussa, chef militaire du Hcua et ex-chef des opérations militaires d’Ansardine, mort mystérieusement dans l’explosion de son véhicule à Kidal après une réunion au Quartier général de la Minusma. Ahmada Ag Bibi clame à haute et intelligible voix ce que de nombreux responsables signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation pensent tout bas.
L’option privilégiée par Ahmada Ag Bibi n’est pas nouvelle. De la première proposition faite par le Parti pour la renaissance nationale (Parena) de dialoguer avec les « djihadistes maliens » à la présentation du Plan d’action du gouvernement de Transition devant le Conseil national de Transition (CNT), les positions semblent positivement évoluer.
Maintenant, il faut aller au- delà des contacts établis au niveau local. Le gouvernement de transition doit poser les premiers jalons de ce dialogue avec les groupes radicaux. Des relais locaux ainsi que des parrains sous-régionaux et internationaux peuvent aider à créer cette passerelle entre les deux leaders du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et les officiels maliens.
Iyad Ag Ghaly est réapparu publiquement en octobre 2020 autour d’un festin dans la foulée de la libération des otages. Sur les images largement diffusées, le chef rebelle semblait fatigué de plusieurs années de jeu de cache-cache pour fuir les frappes chirurgicales françaises ou américaines. Idem pour son bras droit au centre, Amadou Kouffa. L’un comme l’autre savent que la moindre erreur leur serait fatale à l’image d’Abdelmalek Droukel, tué, en juin 2020, dans la zone de Tessalit, non loin de la frontière algérienne par un commando des Forces spéciales françaises, avec la collaboration d’agents américains.
Les lourdes pertes enregistrées à Aguelhoc, Konna, Diafarabé et Mafouné dans les rangs de leurs combattants accentuent davantage la pression sur Iyad et Amadou mais, aussi, mettent le gouvernement du Mali et ses alliés dans une position confortable pour obliger ces deux visages de la terreur à renoncer à leur chimérique et diabolique plan.
Les velléités d’extension de la violence armée vers les régions de Kayes et de Sikasso n’enregistrent pas de succès probants. Si elles sont bien préparées avec une meilleure coordination, les opérations militaires en gestation dans la zone dite des trois frontières avec l’arrivée d’un bataillon de l’armée tchadienne pourraient infliger une véritable déculottée aux combattants de l’Etat islamique au grand Sahara du psychopathe Adnane Abou Walid al-Sahraoui de son nom de guerre Lehbib Ould Ali Ould Saïd Ould Joumani.
Mais, il ne faut pas se bercer d’illusions. L’élimination des figures comme Amadou Kouffa et Iyad ne mettra pas fin à la terreur. Au contraire, elle pourrait donner naissance à des monstres encore plus cruels.
Par Chiaka Doumbia