Entre nous – Fin de l’exil doré pour Ibrahim Ag Bahanga : Comme si l’on se moquait de la mémoire des victimes ?

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Il nous est revenu de constater que le tristement célèbre Ibrahim Ag Bahanga est de retour dans son village depuis quelques semaines. Et cela, après une errance entre le Mali, l’Algérie et la Libye. Car, en janvier 2009, pour ne pas connaître un destin tragique (toutes ses bases ont été détruites), il avait fui le territoire malien sous la pression de notre brave armée qui vient de fêter son cinquantenaire.

Isolé, abandonné, ce ‘’vulgaire bandit de grand chemin’’ (l’expression est de notre confrère de l’hebdomadaire parisien, Jeune Afrique), n’avait d’autres choix que de s’exiler. Et, parmi les conditions posées par nos chères autorités pour accepter son retour au pays natal, son engagement à ne plus reprendre les armes, l’incinération de celles-ci au cours d’une cérémonie grandiose comme nous avons l’habitude de voir depuis une certaine flamme de la Paix qui n’a jamais, malgré la symbolique, pu éclairer véritablement les cœurs et les esprits de qui l’on connaît.

Même si ‘’Son Altesse Bahanga’’ avait envoyé une lettre au président de la République dans laquelle il écrit qu’il renoncerait désormais à tout usage de la violence, voilà un homme qui n’est pas digne de confiance. Comme le prouvent à suffisance son passé et ses actes. Depuis fort longtemps, Ibrahim Ag Bahanga a choisi de rompre avec la nation, la république et ses valeurs. Et il doit être traité comme tel.

Avec son retour, on comprend sans difficulté la décision présidentielle de faire venir à ses côtés l’un des meilleurs officiers qui s’est illustré ces dernières années par des actes de bravoure et de patriotisme. Il s’agit du colonel El Hadj Ag Gamou qui vient d’ailleurs d’être distingué Chevalier de l’Ordre national du Mali. N’eût été la farouche détermination de cet officier avec ses hommes, des apatrides comme le tristement célèbre Bahanga et complices auraient mis la ville de Kidal sous tutelle.

Au moment où le Mali des généraux avait perdu toute lucidité dans la gestion de la crise, il a fallu un colonel Gamou pour opposer le niet catégorique à la revendication des bandits armés qui voulaient entrer dans la ville avec leurs armes, soutenus par l’Algérie.

Souillé de sang du fait de ses nombreux assassinats, mutilations, rapts d’innocents citoyens, le multirécidiviste notoire, Ibrahim Ag Bahanga doit être poursuivi, jugé et pendu haut et court. Devrait-on accorder des faveurs spéciales à celui qui délibérément et de façon répétée a choisi de poser contre ses concitoyens des mines anti-personnelles, des actes qualifiés de crimes contre l’humanité ? Est-il besoin de rappeler que les mines antipersonnelles posées par celui qui peut être considéré comme l’un des plus grands criminels de l’histoire récente de notre pays continuent d’ôter la vie à des civils et militaires innocents ? Que dire des morts d’Abeibara (une fosse commune dans laquelle de nombreux innocents reposent, devenue depuis un lieu de recueillement) ? Et de Nampala ? Que dire de ses jeunes soldats, ex-otages qui gardent encore, et pour longtemps, des séquelles de leur détention ? Doit-on laisser impunis des individus qui s’attaquent aux symboles de l’Etat ? Pourquoi cette impunité, la pire des injustices ? Accueillir ce criminel comme un héros ne serait-il pas source de frustrations au sein des forces armées et de sécurité ?

Comme un mépris ou une insulte à la mémoire de ces dizaines de morts et leurs familles ? C’est le comble du ridicule. Un roi doit récompenser le mérite et sanctionner la faute, nous enseigne-t-on dans le film ‘’les rois de Ségou’’ du célèbre réalisateur de l’Ortm, Boubacar Sidibé.

Chiaka Doumbia

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