Qui est de mauvaise foi ?
Au niveau de l’enseignement supérieur, les années se suivent et se ressemblent. Les années continuent à se chevaucher. Il est même devenu difficile de les démêler. L’université malienne se trouve de nos jours dans une situation singulière du fait du manque de confiance entre les syndicats d’enseignants et le gouvernement.
Depuis le 19 mars dernier, le Syndicat national de l’enseignement supérieur (Snesup) observe une grève illimitée. Donc, les étudiants des facultés, instituts et autres écoles supérieures (il s’agit des établissements publics) sont contraint de se reposer sans le vouloir. Ils estiment être pris en otage par la grève illimitée des enseignants. Les cours à titre de l’année universitaire 2010-2011 n’ont pas démarré ou ont commencé à peine dans certaines facultés ou écoles supérieures.
A une situation déjà tendue par le non-respect par le gouvernement de ses engagements, est venue s’ajouter la contestation liée à l’Assurance maladie obligatoire (Amo), une initiative présidentielle qui a du mal à être acceptée par une partie des travailleurs.
Alors, question : entre le gouvernement et le Snesup, qui est de mauvaise foi ? Libre choix à chacun de répondre selon son camp. Mais il y a quand même une évidence : c’est que tout le monde, y compris les autorités, reconnaît la justesse, voire la légitimité des revendications des enseignants du supérieur. Abdou Mallé et ses camarades estiment qu’ils ont été floués par l’ancien Premier ministre, Modibo Sidibé, qui n’a pas honoré tous ses engagements.
C’est vrai, les relations entre le Snesup et l’ancienne équipe gouvernementale n’étaient pas au beau fixe. On se souvient qu’il a fallu l’arbitrage du président de la République, Amadou Toumani Touré, pour trouver l’année dernière un arrangement de dernière minute.
‘’L’Etat est une continuité’’, dit-on. Ce qui fait que Mme Cissé Mariam Kaïdhama Sidibé hérite de cette patate chaude de la crise universitaire. Face à une nouvelle donne, c’est-à-dire la démission du gouvernement intervenue le 30 mars, le Snesup devrait prendre acte. Mieux, il doit jeter du lest en suspendant son mot d’ordre de grève illimitée. Ce qui pourrait donner le temps au nouveau Premier ministre de prendre connaissance de leurs revendications.
Comme cela n’est pas le cas, il revient donc à Mme Cissé Mariam Kaïdhama Sidibé de prendre son courage en main pour rencontrer les responsables du Snesup. Faut-il le reconnaître, la situation semble dépasser la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Mme Siby Ginette Bellegarde.
Mais au-delà du gouvernement, il faut un dialogue franc et constructif entre les organisations de la société civile, des confessions religieuses et les institutions de la République pour trouver une solution définitive à un problème qui n’a que trop durer. Comme l’a souligné le président de l’Assemblée nationale, il faut un sursaut patriotique et salvateur pour la réhabilitation de l’école malienne, l’université notamment.
Qui est en train de perdre dans l’étrange bras de fer en cours ? En tout cas ni le gouvernement ni le Snesup n’en sortent gagnants. Mais ce sont les étudiants qui constituent les plus grands perdants dans cette affaire. Les enfants des pauvres, ceux qui n’ont pas les moyens d’envoyer les leurs dans de grandes universités à l’étranger.
Pour le moment ni la société civile ni les leaders religieux, encore moins le groupe de contact des partis politiques ne semblent intéressés par la question. Peut-être faut-il attendre que la crise ait atteint le sommet de la gravité pour ce faire ? Et pourtant, tout comme l’année dernière, la situation commence à polluer l’atmosphère et à menacer la stabilité du pays. Les étudiants de la Faculté de la médecine ont déjà donné l’alerte à travers des marches pacifiques.
Par Chiaka Doumbia