L’article 50 de la constitution confère au Président de la République des pouvoirs exceptionnels en cas de menaces sur les institutions, l’intégrité territoriale et d’interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics. A l’analyse cet article fait ressortir certains scénarios de choses qu’il convient d’examiner tout en invitant la classe politique, d’être à l’avant-garde du combat politique.
D’abord, à la première lecture, l’article 50 serait une mesure dissuasive .car sa mise en mouvement peut être envisagée lorsqu’il y a simples menaces et non une interruption effective du fonctionnement des pouvoirs publics. La mise en mouvement relève de l’appréciation souveraine et exclusive que le Président peut faire de la situation et il est tenu simplement d’informer les autres
institutions et la nation qui ne peuvent aucunement l’empêcher d’agir. Mais une lecture approfondie de l’article laisse présager la porte ouverte à une éventuelle
et même possible dictature légale car la durée de l’application des mesures n’est pas précisée et dépendra de la seule volonté du Président de la République. Si l’Assemblée Nationale se réunit de plein droit, il n’est pas précisé qu’elle peut ratifier ou censurer les mesures gui relèvent du domaine de la loi.
A la limite et suivant la nature des troubles, la dictature légale peut se transformer à volonté en dictature de fait selon le scénario ci-après : dissolution préalable de l’Assemblée Nationale, mise en mouvement de l’article 50, ajournement des élections pour forces majeures et le Gouvernement se retrouve seul face à la Cour suprême qu’il peut dissoudre. A partir de ce moment, rien ne peut arrêter le tout-puissant Président, seul maître à bord, naviguant Son bateau comme il peut, comme il veut et où il veut, piétinant les droits du titre premier de la Constitution.
Ensuite, pour le contrôle des mesures prises en vertu de l’article 50 ; si les mesures sont du domaine de la loi, (voir article 70 de la Constitution) le parlement peut toujours les ratifier. Mais la Cour constitutionnelle pourra-t-elle contrôler leur conformité à la Constitution ? Dans tous les cas, il s’agit de mesures prises en période de confusion des pouvoirs exécutif et législatif, les institutions ne fonctionnant plus. En réalité, l’article 50 permet au Président de la République de parer à une éventuelle insuffisance des institutions face à une situation donnée et la logique du droit voudrait qu’on aboutisse à une révision constitutionnelle. Si les mesures relèvent du domaine réglementaire (article 73 de la Constitution), et en cas de violation des droits, la section administrative de la Cour suprême pourra rétablir l’équilibre a posteriori.
Enfin, il semble que le pouvoir constituant malien de 1992 s’est largement inspiré de la Constitution française du 4 Octobre 1958 (article 11) or le Général De Gaule avait exigé pour son retour au pouvoir la rédaction d’une nouvelle Constitution pour remettre les Français au travail et les pleins pouvoirs pour lui permettre de gérer la crise algérienne. La combinaison des articles 44, 49 et 72 peut constituer une mesure dissuasive et prévenir les coups d’Etat militaires.
Il appartient à la classe politique d’en tirer toutes les conséquences et surtout de rester vigilante parce que l’année 2012 est un véritable test pour la vitalité et le dynamisme de notre exemplaire et stable démocratie.
Bréhima KONATE