Détourner des fonds destinés à soigner des malades de la tuberculose, du paludisme ou du sida n’est pas le même que détourner les fonds pour organiser un séminaire. La portée morale ici est grave et nul ne doit la sous-estimer. Sévir et sévir avec l’exemplarité requise est donc nécessaire le cas échéant.
Mais dans l’affaire du Fonds mondial, les leçons doivent être tirées pour corriger certaines faiblesses à l’avenir. Parmi ces faiblesses, le manque d’anticipation. Les précédents célèbres de certains pays auraient dû nous mettre la puce à l’oreille. Le scandale de l’Ouganda avait été suffisamment médiatisé pour que nous ne réalisions pas les effets dominos des audits du Bureau de l’Inspecteur principal du Fonds mondial qui, répétons-le, est totalement indépendant du Secrétariat de ce Fonds.
Il y a aussi, mais ce mal est incurablement malien, les mésententes au sein des équipes et des programmes et elles sont propices à toutes sortes de délations. Plus grave, elles empêchent l’espèce de cohésion que sait montrer un pays comme le Sénégal chaque fois qu’il est menacé de l’extérieur. Enfin, le manque de promptitude dans la réaction qu’il s’agisse de récuser les résultats d’audit ou de leur donner suite. Ici, il faut reconnaître que la suite n’a pas tardé.
Mais n’est-ce pas aussi un problème. Car il est surréaliste qu’un an après le satisfecit public délivré au programme Sida, l’on puisse nous dire autre chose. De la même manière, le cas précis du laboratoire de l’Inrsp tel qu’évoqué, il y a quelques semaines par notre confrère l’Essor, indique que les malentendus sont possibles et qu’ils peuvent être gérés avant l’irréparable, c’est-à-dire la médiatisation avec ce qu’elle implique pour l’honneur des citoyens et du pays.
ATT a donc, une fois de plus, le rôle le plus difficile et le plus ingrat : mener cette douloureuse affaire à son terme. Il ne doit, ce faisant, faire de cadeau à personne. Y compris à Oumar Ibrahim Touré s’il est inculpé ou si sa fonction gêne la manifestation de la vérité. Mais de la même manière, il doit veiller à ce que la justice ou le diktat du bailleur ne lèsent personne. Sinon, il ouvre la boîte de Pandore.
Adam Thiam