C’est encore moi Maha, le blablateur, avec mes questions aux Maires, restées sans réponse.
Comme je suis à la retraite, j’ai tout le temps devant moi et j’écoute bien sûr RFI. Aujourd’hui, ils ont fait l’éloge de la petite reine.
La terre va mal, il faut trouver des solutions alternatives à la forte consommation de pétrole. Nous nous entêtons à ignorer le soleil, le vent et toutes les énergies propres pour nous laisser vider les poches par les détenteurs du système énergétique actuel. A RFI ils ont parlé du vélo avec des trémolos dans la voix. Ce vélo qui a été l’originalité du Burkina, qui a transporté royalement nos femmes avec leur bébé au dos, sans léser le budget familial, en rendant son utilisateur plus sain et vigoureux. Si on crevait, on mettait soi-même le patch et hop, en selle !
« La révolution du vélo est en marche » a dit la speakerine ! Mais au Mali c’est plutôt sa mise en bière et ses funérailles qui se préparent. Nos voisins du Nord ont compris que la voiture est une grosse bouffeuse de combustible et qu’elle nous pourrit l’atmosphère et le budget familial. Un grand projet, commencé il y a longtemps en Hollande, invite les citoyens à laisser les voitures pour les transports en commun et mieux les vélos. Moi, je suis un citoyen docile et j’écoute les conseils de nos voisins du Nord mais là, je crois que l’affaire du vélo, à Bamako, au Mali n’est pas à point. Pourtant, j’ai encore présent à l’esprit le sympathique souvenir de cet Ambassadeur d’Allemagne qui traversait le Vieux pont, aujourd’hui Pont des Martyrs, en vélo, pour aller à son Ambassade, à Badalabougou-Est, chaque matin ; c’était dans les années 80 ! Aujourd’hui, poussé par cette campagne de promotion de la bonne vieille bicyclette, j’ai voulu faire moi aussi mon heure d’exercice physique recommandée par mon médecin. Mal m’en a pris !
J’ai pédalé courageusement sur la route de Djikoroni, au milieu des gaz d’échappement des voitures cracheuses de monoxyde de carbone, évité des milliers de féroces motos chinoises qui rugissaient à mes côtés et dont les propriétaires me regardaient avec compassion : « ce vieux toquard, il va où ?». Le policier m’a interpelé, sans aucun égard, sans même me demander son cadeau pour le thé. Et mes frères, les piétons qui osaient s’exclamer : « tièkoroba i té bò an yè sa ! ».
Je voulais simplement faire une promenade écologique mais, en rentrant à la maison, couvert de poussière des pieds à la tête, j’ai abandonné mon vélo rouge à mon petit fils et, après une douche régénératrice, je me suis posé mes éternelles questions.
Pourquoi si le Nord reconnaît ses erreurs et revient à des transports écologiques, nous, les gens du Sud, nous nous entêtons à acheter les Mercédès, délaissées par eux, au lieu de sortir nos petites reines ?
Pourquoi dans les villes du Nord les cyclistes sont les rois en ce moment et on leur construit et trace des pistes cyclables pour vélo spécialement dans toutes les rues de la ville alors que dans le Sud, les cyclistes sont les parias du goudron !
Est-ce que, après nos grands travaux pour le cinquantenaire de l’Indépendance, les nouvelles routes auront des voies pour nos petites reines ? Rien de plus sûr ! Alors que le citoyen des pays industrialisés fait son mea culpa sur la destruction et l’exploitation de la nature et trouve des solutions écologiques et saines, nous, qui avons encore des espaces libres et peu contaminés, des habitudes saines, nous ne voyons pas le danger de ces pièges que nous tend la société de consommation et ses méfaits, dont la contamination de la nature, du corps et de l’esprit.
Que Dieu nous sauve ! Mais en attendant, au moins, Messieurs les Maires, aidez-nous, en prévoyant des pistes cyclables, à préserver notre santé et nos familles. Que nous puissions, nous, amateurs de sport, inconditionnels d’un Mali écologique et vert, amis des bons Maliens qui n’ont pas de bagnole et qui ont une famille à nourrir avec un tout petit salaire qui n’augmente jamais, que nous puissions, dis-je, circuler dignement et sûrement sur nos vélos, dans les rues de nos villes, sans courir le risque d’être insultés et renversés par un insolent pollueur, conducteur de voiture ou de moto. Que nos familles, qui nous voient partir chaque matin, n’aient plus le cœur serré en pensant que notre vie ne vaut même pas l’injonction obligatoire du port du casque.
Mahamane Sidibé