Chronique du web : L’insupportable tragédie humanitaire de la migration

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Depuis maintenant plusieurs années, les drames liés à la migration font partie de notre quotidien. A chaque jour suffit son lot de tragédie humanitaire relatée voire retransmise en direct par les grands médias internationaux qui, à la limite, nous agressent par des images insoutenables. Disons-le tout net : malgré les efforts des Etats et des structures onusiennes, notamment le Haut-Commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR), de documenter l’horrible tragédie humanitaire qui se déroule sous nos yeux, on ne saura jamais, avec précision, le nombre de victimes tombées sur les chemins de la migration. Rien que pour  le début de cette année, les européens estiment que quelque 2 005 personnes sont mortes ou portées disparues en tentant de traverser la Méditerranée. Ces personnes-là, rappelons-le avec force, ce ne sont pas que des chiffres ; ce sont des êtres humains partis de chez eux, chassés par la guerre, la misère, les effets collatéraux des changements climatiques ou simplement mus par une farouche volonté d’aller à la découverte d’autres prairies prétendument plus vertes. Comme un boxeur qui a pris un coup au foie, j’ai été sonné, la semaine dernière, par ces images de plusieurs dizaines de migrants morts de soif dans le désert nigérien et qui ont tourné en boucle sur les réseaux sociaux.

Morts détroussés et abandonnés par des passeurs, ces criminels sans foi ni loi qui construisent leur prospérité sur le drame de nos familles. Oui, j’utilise à dessein la formule « nos familles » puisque, à la différence des boat-people asiatiques des années 70 et 80, ceux qui meurent de soif, de faim, de maladie, d’insolation, de froid ou qui sont simplement assassinés par les réseaux de criminels dans le Sahara ou en Libye, sont nos enfants, nos frères, nos sœurs… Parfois, volontairement ou non, nous avons financé leur aventure par nos maigres ressources espérant qu’ils trouveraient une vie meilleure de l’autre côté de la mer et aideraient, en retour, à changer la nôtre.

De vie meilleure, voilà ce qu’il en est : la peur, la soif, la faim, la détresse… et au bout du compte, la mort. Une mort parfois lente, longue et toujours douloureuse. Une mort dans des camps de rétention en Libye qui rappellent, aux dires des « survivants »,  ceux d’Europe de l’Est au siècle dernier que, par décence, je me refuse à nommer. Une mort par noyade, scénario effroyable, où la quête d‘une vie meilleure  s’achève dans le ventre de prédateurs marins ou du menu fretin. Je ne puis me faire à l’idée de quelque passivité individuelle ou collective face à ce drame humain insupportable qui m’interpelle fortement et qui devrait nous interpeller tous.

De la volonté, il nous en faut ! Il nous faut prendre le taureau par les cornes et œuvrer énergiquement à tarir la source de cette migration illégale : s’attaquer aux causes profondes, briser les circuits, démanteler tous les réseaux et jeter en prison, pour la fin de leurs jours, ceux qui ont entretenu ces réseaux criminels. Et c’est pour cela que je suis de ceux qui applaudissent des deux mains la création du G5 Sahel et se réjouissent de son partenariat stratégique avec l’Union européenne. Certes, le G5 Sahel ne sera pas la panacée, mais il sera une réponse localement circonscrite des pays de départ pour traiter à la base la question de la migration. S’il réussit le challenge d’anéantir les circuits criminels qui ont fleuri dans le Sahel, il aura remporté une victoire importante dans sa mission, plus vaste, de lutter contre le terrorisme qui, ne l’oublions jamais, se nourrit, en partie, de traite humaine et de trafics en tous genres.

Aux Etats partie de créer les conditions réelles de fixation de leur jeunesse dans les vastes terroirs longtemps abandonnés au désespoir et à l’impasse. Sans cette condition à minima, le discours sur l’émergence clamé par les politiques continuera de sonner creux, élargissant davantage l’abysse entre les peuples du Sahel et leurs gouvernants. Il est aussi et surtout attendu de ces derniers qu’ils mettent en œuvre des stratégies novatrices de politiques migratoires qui pourraient bénéficier de l’expertise européenne. Je suis convaincu que l’Europe accepterait volontiers de traiter la question migratoire en amont plutôt que de recevoir sur ses côtes ces milliers de personnes en détresse dont elle ne sait que faire.

L’Italie, pour ne parler que de ce seul pays, se sent asphyxiée et abandonnée et menace ouvertement de bloquer ses ports aux bateaux transportant les migrants. Selon de nombreux médias européens, le pays a secouru plus de 12 000 migrants entre dimanche et mardi au large de la Libye, et pas moins de 5 000 pour la seule journée du lundi dernier. Rythme infernal qu’aucun pays européen, y compris l’Allemagne de Mme Merkel, ne pourrait supporter et qui sonne comme une vengeance post mortem du Guide libyen, Mouammar Kadhafi, assassiné par un certain Nicolas SARKOZY dans une aventure qui ressemblait plus à un mano a mano d’ego qu’à une entreprise politique mûrement réfléchie et aux implications maîtrisées. Au nom de tous ces migrants morts dans le désert ou dans la Méditerranée ou qui, après mille tribulations ont du regagner la case-départ, humiliés et plus pauvres que jamais, Dieu rendra sûrement un jugement que nous espérons implacable.

Serge de MERIDIO

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