Il a fallu de peu pour qu’il me soit arrivé de jeter à l’eau tous mes bienfaits des trente jours du mois de carême. En toute franchise, à la veille du Korité j’ai fais un tour au « Thiapalodromme » de notre quartier. J’étais vraiment décidé cette fois –ci à combattre la gueule de bois qui me rendait bizarre depuis quelques jours. Plutôt, depuis que mes deux oreilles m’ont permis d’entendre que « dans aucun pays du monde la Cour Constitutionnelle ne proclame les résultats ». J’ai pleuré, oui, pas à cause des réformes constitutionnelles qui sont en cours, mais pour la mémoire de mon défunt Professeur de Droit Constitutionnel à l’ENA, Karim Traoré.
Lui qui a consacré toute sa vie afin que ses étudiants, voire tout le peuple malien puisse saisir à sa juste valeur l’importance des attributions de la Cour Constitutionnelle d’une part et la suprématie de la Constitution d’autre part. Pour cela, en sa qualité de docteur de troisième cycle en droit public, il a refusé tous les postes juteux ainsi que toutes les opulences de cette vie sur terre afin que le savoir qu’il donnait à ses étudiants ne soit pas estropié. Dans cette mission, il n’a jamais eu peur de se mettre devant toute une salle remplie du palais de la culture « Amadou Hampaté Bà » pour gloser la jurisprudence du conseil constitutionnel français et des chapitres de nos constitutions de la première à la troisième république. Et quand il constatait que son travail ne produisait pas l’effet escompté chez ses apprenants, il ne se privait aucunement de faire redoubler toute une promotion. C’est lui qui donnait plus de cinq cent zéro cinquante. Pourtant, jamais ses sujets traités en entier ne pouvaient dépasser une page pour l’étudiant. Ceux –ci tournaient toujours sur les attributions de la Cour Constitutionnelle, les procédures d’une réforme constitutionnelle et la hiérarchisation des sources du droit.
Pourquoi nos intellectuels, plutôt nos professeurs des bureaux climatisés ont attendu la mort de ce monument du droit constitutionnel pour reformer, amender, tripatouiller et déformer (à la télé même) les dispositions de cette matière, qui lui était si cher.
Lorsqu’on dit publiquement que la « Cour Constitutionnelle n’a jamais proclamé les résultats d’une élection » l’on a fait que réveiller Karim de sa tombe.
C’est pourquoi, moi je veux volontiers qu’on interdise à toutes les Cours Constitutionnelles des différents pays du monde de proclamer les résultats des élections. Dans ce cas comme disait le grand frère « Salif Sanogo » l’on aiderait l’homme déraisonné à atteindre son but, lui qui veut toujours transformer les choses à son raisonnement.
Vraiment l’occasion est bonne de boire un coup à la mémoire de l’émérite Professeur Karim Traoré, qui a laissé notre constitution orpheline, maintenant à la merci de tout le monde.
Moustapha Diawara