Chronique du vendredi : Les dits et les non-dits du 8 juin

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Les rideaux se tirent sur le 8 juin, un moment-clé de la communication présidentielle. Le président, une fois de plus, a parlé. Et même très longuement cette fois-ci. Fascinant les uns par un bilan impressionnant par ses réalisations physiques, agaçant les autres dans son rôle d’arbitre joueur pendant que l’heure des comptes n’a pas encore sonné et que pour eux, le pays pouvait faire deux fois plus, si l’efficience était davantage recherchée. Laissons à chacun assumer ses responsabilités et ses péchés et revenons à la « causerie du président » où nous retiendrons trois points. D’abord la question « gênante » de Chahana Takiou sur le départ du Premier ministre.

 Elle peut avoir embarrassé le président parce que l’intéressé lui-même était là. Mais on n’attend rarement d’une telle question une réponse sincère, mais une réponse interprétable et l’interprétation, notre jeune confrère ne s’en est pas privé. Tous ceux qui l’ont lu hier savent maintenant que pour lui si le président n’a renouvelé, séance tenante, sa confiance à son Premier ministre, c’est que celui-ci n’en a plus pour longtemps. Un point de controverse peut-être mais nous sommes en démocratie et la question comme l’interprétation de Takiou sont saines et normales. Ce qui par contre est moins sain et moins normal, c’est depuis huit mois les rumeurs insistantes de remaniement qui ne peuvent pas ne pas avoir d’impact sur le rendement du gouvernement.

Or il ne s’agit pas d’un épiphénomène mais d’une tendance lourde. Car et sous Ag Hamani et sous Issoufi Maïga, nous avons eu les mêmes rumeurs paralysantes. La presse les relaie conformément à sa mission mais ce n’est pas elle qui les crée. Un autre aspect qui a retenu notre attention, c’est la promesse du premier sac de ciment pour 2011 et nous supposons que le président parle là du ciment de la firme indienne Wacem.

Une bonne nouvelle à l’analyse de l’hémorragie de devises que coûtent à notre économie les importations systématiques d’un produit aussi stratégique que le ciment. Le produire chez nous est non seulement faisable, susceptible de baisser les prix au grand bonheur des consommateurs, mais porteur d’emploi et de croissance. Pourtant, ce n’est un secret pour personne, encore moins pour le président, que ce projet commence à accuser un retard préjudiciable non seulement aux prévisions d’exploitation mais à la viabilité tout court du projet. Et cela à cause d’imbroglios, de peaux de bananes et de luttes d’intérêts indignes d’une République qui respecte sa parole et ses partenaires.

L’équidistance vis-à-vis des acteurs de notre économie est louable certes mais c’est d’abord l’intérêt du Mali et du seul Mali qui doit primer. Le président en est l’ultime garant. Tout le reste est accessoire. Le dernier point que nous aborderons est celui du dossier énergétique évoqué par ATT, justement à la faveur de la crise à l’Edm à propos de l’avenir du secteur. Là-dessus, toute analyse attentive de la situation révèle une série de non-dits à purger. Le talent et l’engagement de Ousmane Issoufi Maïga peuvent certes atténuer ou retarder le clash entre le gouvernement et Edm mais ils ne pourront pas les éviter.

Car, dans le fond, ce qui se profile à l’horizon et qui ne peut pas plaire aux travailleurs d’Edm passés, ces derniers quinze ans par toutes sortes de laboratoires, c’est la privatisation de la gestion de leur « boîte » et son impact sur le bien-être de ces employés. Une dimension syndicale tout à fait légitime mais dont les éclats de voix ou d’obus peuvent être amoindris par une meilleure communication, mais in fine, c’est l’investissement dans le secteur de l’énergie et de l’eau qui propose des solutions durables à la crise.

A cet égard, le président doit avoir été heureux de s’entendre confirmer, dans la foulée de sa prestation, l’engagement saoudien pour Taoussa et le volet hydraulique dans le Nord du Mali. Il y a déjà Felou et Gouina dans le portefeuille de l’OMVS. Le très controversé projet d’alors -Sopam- enverra ses premiers volts en fin d’année, semble t-il, comme Balingué, laissant à rechercher les moyens pour l’important barrage de Kenié. Il y a des problèmes comme partout et à chaque moment. Mais si l’on tient l’inventaire de ce qui a été réalisé et on oublie c’est l’architecte lui-même -ATT- qui le présente, il faudra bien reconnaître qu’au bout du compte, les lignes bougent et que le titre, il y a peu, de notre confrère de l’Aube « un bilan en béton » n’est pas pure invention.

Adam Thiam

 

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