L’An de grâce 2020 vient d’ouvrir des pages toutes nouvelles du grand livre du Temps. Partout, la nouvelle année a été accueillie dans la joie, l’allégresse et avec faste. De ceux qui se battent contre une méchante maladie qui leur sera malheureusement fatale cette année même à ceux qui croquent la vie à pleines dents, en passant par ceux très nombreux à l’avenir incertain, ceux qui dorment le ventre creux, ceux qui bravent les intempéries à la recherche de leur pitance quotidienne…, tout le monde entend, très légitimement, être de la nouvelle aventure. Personne ne voudrait se contenter de miettes du festin. C’est qu’au-delà du simple passage à une année nouvelle, 2020 est le départ d’une nouvelle décennie. Qui voudrait rater un tel rendez-vous ?
Si le but d’une résolution, c’est d’être heureux en se réalisant à travers l’accomplissement de ce qui vous tient à cœur et qui détermine votre bien-être, il faut tout de suite admettre que sa concrétisation ressemble, à bien des égards, au parcours du combattant. Mais, ne nous arrêtons pas sur les difficultés ; elles sont faites pour être surmontées.
Quid des pays ? Il suffit de faire analyse de contenu sommaire du discours de circonstance de ceux qui nous dirigent pour pénétrer au cœur des résolutions qu’ils nourrissent pour les Etats dont ils ont la charge. Parfois, ces discours sont des professions de foi qui regorgent de keywords comme « développement », « prospérité », « paix », « éducation », « formation », « technologie », « défi », « enjeux », « avenir », etc.
On croirait, à s’y méprendre, des mauvais élèves réunis dans une salle d’examen, en l’absence de surveillants, qui ne se sont pas privés de communiquer tant les copies sont semblables.
Que souhaiter au Mali, notre cher pays, englué dans une crise sécuritaire qui menace même les fondements de son existence ?
Le modeste chroniqueur que je suis voudrait soumettre quatre résolutions aux Maliennes et Maliens et souhaiter que chacun s’investisse, à fond, dans la concrétisation de la résolution qui lui parle.
Paix, sécurité, réconciliation nationale et stabilité
Dans le contexte actuel, ce socle détermine notre survie voire notre existence même en tant que pays, en tant que nation, en tant que peuple. Si l’on parle du Mali, c’est parce que nous sommes un territoire, un peuple et nous avons en commun le sentiment d’appartenir à un ensemble socio-politique, économique, culturel… aux caractéristiques façonnées et forgées par plusieurs siècles d’une riche histoire commune. Le pays est un legs auquel nous tenons comme à la prunelle de nos yeux. Il nous arrive, comme en ce moment, de malmener ce vieux pays, de le chahuter, de le balloter d’un bord à un autre… Certains voudraient même le dépecer pour s’y tailler des baronnies, un pays romantique ou virtuel. Mais nul n’aura raison, ni ne gagnera quoi que ce soit à vouloir tourner le dos à cette construction qui nous vient des temps immémoriaux. Les tentations séparatistes et irrédentistes qui ont favorisé l’intrusion du terrorisme dans notre espace n’ont aucune raison d’être au moment où, ailleurs, de grands ensembles se construisent. Notre salut réside en notre foi et en notre détermination de faire front commun pour bouter l’ennemi dehors. Je souhaite vivement que nous consacrions nos intelligences et nos énergies à ce combat, le seul qui vaille. MINUSMA, Barkhane, EUTM… partiront et nous laisserons face à nos responsabilités historiques.
Education, la formation, la recherche et la technologie
En la matière, il y a eu trop de discours, trop de temps perdu et trop de ressources gaspillées sans résultats satisfaisants. Regardons du côté du Japon, de la Corée du Sud, de l’Europe du Nord… du Rwanda pour trouver des sources d’inspiration afin de bâtir un modèle d’éducation et de formation digne de nos ambitions. Les bricolages successifs que nous tentons ne sont pas la réponse adaptée aux besoins de notre société en pleine mutation dans un environnement mondialisé. Il nous faut être plus ambitieux et plus volontaristes dans nos objectifs pour avoir une infime chance d’être ancrés à la marche du monde. Le slogan de notre éducation doit se décliner en ces quelques mots : Tout pour l’excellence !
Développement par le travail national et recherche de partenariats dynamiques
Les Soudanais dont nous sommes les fiers héritiers étaient de gros travailleurs, d’honnêtes travailleurs ; des gens qui se réalisaient à la sueur de leur front, qui se distinguaient par leur probité morale. Des gens qui avaient honte d’être pris en défaut. Leur seule religion était le labeur. Il est temps de réinventer le travail, de le célébrer et de l’honorer dans toutes ses dimensions. Ce sont nos efforts mis bout à bout qui feront le Mali. Personne d’autre ne fera ce pays à notre place. En 2020, convertissons-nous à la religion du travail ; tournons le dos à la facilité, à la fatalité, aux charlatans, aux chemins de traverse et à la vaine chicane. Armés d’une telle mentalité, notre pays croulera sous les partenariats les plus profitables à son développement socio-économique et culturel. Pour compter et non pas être simplement compté dans la décennie qui commence, le Mali devrait avoir le travail comme seule boussole, en harmonie avec les pères fondateurs de notre nation.
Rayonnement à l’international
Notre horizon ne devrait plus être de l’Atlantique aux mines de sel du Sahara, mais bien au-delà. Notre horizon devrait être le monde. A l’image du laboureur s’adressant à ses enfants dans la fable (La Fontaine), « Creusez, fouiller, bêchez ; ne laissez nulle place Où la main ne passe et repasse ». Dit autrement, en s’abreuvant à la source de la Geste du Mali, « Que les agriculteurs s’adonnent au travail de la terre ; Que les commerçants sillonnent les contrées les plus lointaines ; Que les preux guerriers versent le sang pour défendre la Patrie… ». Le Mali doit redevenir ce phare qui éclaire le monde. Individuellement et collectivement, nous avons l’obligation de nous inscrire dans la lignée du Grand bâtisseur, de l’Empereur au sceptre doré, du Grand navigateur, des célèbres universités de Sankoré, Djenné… Tel se conçoit le Mali de cette nouvelle décennie.
Serge de MERIDIO