Le délestage en cours au Mali est sans précédent 64 ans après son accession à la souveraineté nationale et internationale. Le fait inédit en est qu’il est survenu au moment de la pleine explosion de l’ère numérique avec son corollaire du développement des réseaux sociaux, accessibles à tous. Ce faisant, mieux que la presse classique, ce sont les internautes qui savent mieux parler du phénomène. Au début de cette coupure interminable d’électricité, les premières réactions étaient des posts de quête d’information, où les uns et les autres voudraient s’assurer si la coupure concernait seulement leur zone d’habitation ou de travail. « C’est coupé chez nous depuis telle heure…C’est la même chose partout ? » … « Venue à telle heure, le courant est parti depuis telle heure… », tels étaient les types de messages qu’on pouvaient lire sur les différentes pages Facebook. Puis quelques mois après le ton a haussé subitement. Ce faisant, les posts sont devenus plus courts, plus poignants et plus irritants. « A quand la fin de ce calvaire ? », « Qu’avons-nous fait au bon Dieu pour mériter un tel sort ?», « SOS ! nous souffrons dans l’obscurité », « Au secours EDM dessèra ! », s’indignaient les internautes en boucle.
Ironie du sort, dans ce brouillamini la cheffe du département de l’Energie et de l’Eau a fait une sortie hasardeuse sur le plateau de l’ORTM pour dénoncer des présumés auteurs de détournements de citernes comme cause de la situation de délestage avant de tenir la promesse à son temps que « dès demain il y’aura des améliorations dans la desserte de l’électricité partout au Mali ». Et curieusement, vingt heures après cette sortie, les consommateurs n’ont senti aucune amélioration. Pour les internautes « Tane Kôrôba a contribué à détériorer la situation ». D’où une salve de posts ironiques sur les réseaux sociaux. Tels : « C’est quand le demain de Mme le Ministre ? », «En attendant de retrouver les citernes, nous sommes dans le noir », « vivement les citernes de Tane ! »…
Autant le délestage dure, autant les réactions se multiplient. Des plus virulentes au plus comiques. Ces propos sont devenus à la limite des calmants pour soulager la souffrance de la canicule et des coupures d’électricité. Cependant certains sont sortis de leur gong pour lancer des piques à l’endroit des autorités. C’est ce qui a obligé un Procureur de la République à la faveur d’une conférence publique à donner des indications sur la conduite à tenir dans la protestation afin de ne pas avoir maille à partir de la justice. Il a dit que les consommateurs ont le plein droit de protester contre les coupures de courant, mais qu’ils ne doivent pas faire des gestuelles déplacées pour s’adresser directement au ‘’Prince du jour’’. Depuis lors, les internautes ont varié leur discours. En cas de coupure de longue durée d’électricité, ils tenaient des déclamations ironisées, telles : « Depuis telle heure nous sommes dans le noir, mais nous ne sommes pas fâchés et nous ne ferons pas de gestuelles », « Pas de courant, mais nous sommes contents ! ».
Par la suite, ils ont même arrêté d’appeler le chat par son nom, ainsi le courant prendra plusieurs appellations. ‘’Invitée’’ pour certains, ‘’Tchiè Djan’’ pour d’autres et ‘’Jolie’’ pour la plupart. Lorsqu’il est prématurément coupé, d’aucuns ne s’empêchent pas d’affirmer que : « Jolie n’est pas une sainte compagne, elle fait le tour de plusieurs quartiers en une seule nuit ». C’est-à-dire qu’elle découche. En attendant son retour, le rendez-vous est pris pour la prochaine parution pour une autre chronique sur le délestage. Tchiao !
Moustapha Diawara
Patience….. Les centrales nucléaires arrivent …..