Il est six heures du matin, il fait un froid glacial dans les rues de Rome, ma ville d’adoption. En effet, depuis quelques jours, l’automne s’était discrètement retiré de la cité pour disparaître dans le néant de l’univers. Parmi les rebelles du temps n’ayant pas accepté le nouveau venu, l’hiver 2016, je fais partie. Oui il s’en est allé comme la paix le fut au Mali et comme toujours, seuls ses nostalgiques espèrent en son retour avant sa saison prochaine. Oui, l’espoir ne dort jamais dans les cœurs de qui savent que tout peut changer, même les saisons avant l’heure. Surtout bénis sont ceux dont la foi en la paix est assez solide pour soutenir que sa saison transcende le temps.
La veille, ma valise a reçu mes contrôles répétitifs non pas moins de celle d’une nouvelle mariée qui rejoint son mari. Tout est enfin prêt. Le départ est imminent. Je me traîne hors de l’appartement, sans oublier de jeter un coup d’œil de sécurité à l’intérieur.
Je fonce à l’aéroport dans une épreuve de stress et d’excitation, comparable à celui d’un époux qui attend impatiemment, dans la chambre nuptiale, la nouvelle mariée. Chemin faisant, des choses et en nombre taraudent mon esprit, en soif de curiosité sur comment mon amour, ma patrie a changé. Là dessus, les rapporteurs éloquents n’avaient jamais manqué de me faire des commentaires élogieux sur les nouveautés. « Tu verras comment le pays a changé, tu seras agréablement surpris. Bamako a retrouvé sa coquetterie d’antan. Le Nord se porte de mieux en mieux, le calme revient, la paix aussi. Le processus de développement est enclenché, tout bouge. »
Ça semblait être de l’aspirine qu’on s’efforçait de faire avaler à un enfant en lui faisant croire à un caramel. Même si le sage disait qu’un éléphant blanc sans trompe, trompe un mouton, je n’avais pas l’air d’être ce mouton. Et c’est dans un scepticisme cartésien que j’embarque dans ce Boeing qui me portera vers la destination vérité.
Il est 23h quand le tarmac de l’aéroport International Modibo Keita est balayé par cet oiseau géant. Le pilote annonce le temps… mais qui a le temps de l’écouter, trop concentré à repenser au programme du séjour.
En ordre de course, j’entame ma descente de l’avion. Entretemps, un vent chaud m’accueille par son souffle loin d’être cordial. Etant enfant, n’avez-vous jamais tenté d’ouvrir, en cachette, la marmite de maman posée sur le feu et être surpris par la vapeur chaude ? L’effet est comparable.
« Bienvenu à Bamako monsieur le poète », me hurle un ami. Dans une cacophonie, les amis m’entrelacent l’un après l’autre. Je suis dans le hall d’arrivée. Les nouvelles se demandent et se redemandent, les fous rires s’entremêlent de temps à autre concédant peu d’espace au silence.
Enfin, nous prenons la direction de la maison. A l’entrée de Bamako, j’observe tristement un nuage de fumé venant des tas de pneus en combustion, polluant tout l’atmosphère. Plus loin, nous nous plongeons dans un nuage de poussière réduisant dangereusement la visibilité. « Mon Dieu ! Où suis-je ? » « À Bamako », me répond ironiquement un ami. Le bitume est dans un état piteux, et le chauffeur use de ses prouesses pour éviter ou contourner les innombrables poches au milieu de la route. Vu mon désenchantement, un autre ami rigole : « Tu n’as rien vu encore ». « Ne me dites pas que rien a changé ici ? ». Un rire ironique comme réponse, me fait comprendre que je devrais attendre le prochain voyage pour cela.
Après plusieurs années d’absence, je retrouve les choses comme dans le grenier de la grand-mère, les mêmes choses à la même place.
Pourquoi sommes-nous si loin en retard ? À qui la faute ? Nous sommes tous coupables. Nous construirons ce pays que par une conjugaison des efforts.
Alors, voulons-nous le changement ? Changeons d’abord. Voulons-nous combattre la corruption ? Commençons d’abord par nous. Voulons-nous un État de droit ? Comportons nous en bon citoyen. Voulons-nous la justice ? Pratiquons-la, défendons-la. Voulons-nous la paix ? Vivons-la.
Voulons-nous la démocratie ? Que ses principes intègrent notre mode de vie ! Ainsi, nous aurons la clarté de ne pas confondre la liberté et le laisser aller. Voulons-nous un Mali prospère ? Bâtissons-le, en exerçant notre devoir de citoyen. Sachons que le Mali, c’est aussi “moi”.
Rêvons-nous un Mali : grand, fort, envié, développé… ? Cela n’est nullement une illusion ; il est possible d’atteindre ces objectifs en une dizaine d’années, si seulement nous acceptons de mettre la nation au-dessus de nos intérêts, nos devoirs au-dessus de nos droits. Tant que nous continuerons à avoir uniquement des ambitions personnelles, politiciennes, claniques : dépourvues de patriotisme, d’intégrité morale, nos problèmes resteront entiers.
Si nous avons assez d’être parmi les derniers du monde, en terme de développement ; le devoir du travail et du sacrifice nous appelle.
Il est de notre responsabilité d’être au rendez-vous de l’honneur, celui du Mali et celui de l’Afrique.
Une opinion peut certes être utile, dans la mesure où elle comporte une analyse éclairée, un caractère sensibilisateur, une piste de solution aux problèmes. Cependant, dans une société comme la nôtre, où chacun est en partie le problème, la solution ne pourra être que notre bon exemple.
Pour un Mali meilleur, ensemble nous arriverons : par l’instruction, le sens du devoir et du sacrifice. Marcel Banou, Médiateur culturel/Auteur de trois jeunes, trois continents un rêve Rome/Italie
Les Maliens comme leurs dirigeants sont des ignorants pleins d’arrogance. C’est la raison pour laquelle le pays n’avance pas. Chacun est bouffi de son petit orgueil et croit tout savoir et ne pas devoir apprendre de qui que ce soit. Avec de tels comportements. on ne construit rien de solide.
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