Pour une nation en construction, la question identitaire relève plus de la médiocrité intellectuelle que de la réflexion profonde.rn
A l”entame du processus électorale de 2007, moi qui avais voté pour ATT en 2002, ai pris la décision de marquer ma dissidence. Après constat et analyse, je suis arrivé à l”affirmation concluante qu”Amadou Toumani Touré n”est pas à la hauteur, qu”il a failli lamentablement à établir au Mali ce que je considère comme les prolégomènes à l”exercice de la haute fonction exécutive : une autorité affirmée sans autoritarisme, une bonne gouvernance, la lutte contre la corruption endémique, l”incivisme et l”impunité et enfin, la rupture d”avec le copinage et l”affairisme qui menacent les fondements de la nation.
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Cette prise de position que je croyais naturelle dans une démocratie a indisposé quelques pieds nickelés qui, sous le joug de l”asservissement et incapables d”indépendance intellectuelle, ont cru bon de déclencher une guerre haineuse personnelle par des insinuations malveillantes et des rumeurs démontrant, si besoin est, leur nanisme mental. En temps normal, c”est avec mépris que j”accueille ce genre d”individus. Parce que, depuis ma tendre enfance et les conseils de mon grand-père, je me suis tracé une ligne de conduite : je ne polémique jamais avec les saltimbanques et les troubadours.
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Cependant, il y a quelques temps, à Montréal, dans une assemblée ou étaient présents deux de mes amis, un compatriote, usant de perfidie, a lancé la petite phrase suivante : « Il reste à vérifier si Ousmane Sow est un vrai Malien. Puisque des Sow, il y en a en Guinée, au Sénégal, en Mauritanie, au Burkina, etc. » Juste pour les fins d”esprit, j”apporterai une simple information quant à la fiabilité génétique de ma « malianité » s”il y a des imbéciles qui veulent perdre leur temps en enquête : mon arrière-grand père, Amadou Oumar Samba Sow était un capitaine de la cavalerie de Sékou Ahmadou. Pour ceux qui connaissent un brin l”histoire du Grand Macina puis la petite histoire du Kounari et du Guimbala, je n”ai plus besoin de poursuivre.
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Si j”évoque en entrée cette histoire que je considère somme toute comme une anecdote, c”est pour poser plus globalement la question de l”identité malienne. Mes amis de la Côte d”Ivoire diront plus crûment : « C”est quoi un Malien ? » . En réalité, de par mon éducation, mon itinéraire et mes convictions personnelles, j”ai développé une allergie naturelle aux questions identitaires. Je considère le nationalisme, le chauvinisme et l”identification raciale comme un refuge pour crétins en mal de reconnaissance sociale. Sans se lancer dans un débat philosophique ou sociologique sur le sens de l”identité (des experts plus éminents et savants ont pondu des milliards de lignes sur le sujet), j”aimerai juste m”étendre sur le sujet pour démontrer sa vacuité.
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Je veux savoir, de manière rationnelle et claire, ce qui englobe l”identité malienne. Est-ce le simple fait de vivre sur un territoire commun tracé par le colon et identifié comme tel à l”ONU ? Y a-t-il au Mali, un « nous » majoritaires et un « eux » minoritaires ? Que recouvrent ce « nous » inclusif et ce « eux » exclusif. Sachant qu”une identité nationale se définit toujours par rapport à d”autres, intérieure ou extérieure, quelle serait donc cette identité rivale ou ennemie qui mériterait une flambée de patriotisme poussée à la limite du ridicule ? Dirions-nous que le fait majoritaire manding est absorbant de l”identité malienne ou que l”ensemble des faits minoritaires parcellise cette définition ?
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Ne convoiter que de Dieu Seul
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L”identité malienne serait-elle morganatique dès lors qu”il s”agit d”un mariage entre groupe majoritaire historique (manding) et minoritaires éparses ? Cherchons-nous à définir une « malianité » moderne définie par l”appartenance à un idéal commun (bâtir une nation) ou une « malianité » anachronique réduite à un refuge identitaire et animé par une idéologie du ressentiment ? A-t-on un droit acquis au privilège éternel dès l”instant que nos gènes portent une « malianité » indubitable ?
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En matière humaine, j”ai toujours privilégié la valeur intrinsèque de l”individu ; je crois plus en l”individu qu”en la collectivité. Autrement dit, dans mon for intérieur, c”est la somme des individus de valeur qui constituent une société performante. J”ai toujours eu une réaction de rejet face au collectivisme qui, par essence, est dictatorial. Le « nous » impulsif est porteur de tares qui se nomment : populisme, dictature, pensée unique, etc. Le patriotisme aveugle n”a jamais produit de grandes avancées sociales. Quand je le dis, j”espère surtout que des esprits mesquins n”y verront pas un rejet de la nation, un refus d”appartenance au Mali.
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Non, pour moi, l”identité malienne est la somme de nos identités personnelles. Pour moi, il n”y a qu”un seul Malien : celui ou celle qui veut le devenir. Nous sommes Maliens, un point, c”est tout. Ce n”est ni objet de honte ni objet de fierté. Et vraiment, entre nous, je baye aux corneilles quand j”entends des paltoquets proclamer leur nationalité. Qu”y a-t-il à se bomber le torse pour crier : Je suis Malien ; je suis Français ou je suis Guatémaltèque ? Est-ce que le fait de crier « je suis Malien » rend subitement un idiot super brillant ? Transforme-t-il un crétin en génie ?
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Il y a, dans l”histoire de l”humanité, des drames épouvantables liés à l”exacerbation d”une forme de chauvinisme primaire qui ne vise que l”indexation et l”exclusion. Avant d”arriver au fascisme ou au nazisme plus frais dans la mémoire collective, ces incantations ont produit des pogroms et des génocides sur tous les continents. Aujourd”hui encore, l”identité nationale sert de carburant à des mouvements xénophobes ou haineux en Europe et en Amérique. Elle est la base du darwinisme social appelé aussi eugénisme que tentent de défendre des « scientifiques » en mal de crédibilité.
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De grâce, dans un pays du Tiers-monde encore confronté à des crises alimentaires, qu”on ne vienne pas ajouter un débat trop complexe comme celui de l”identité. Et je dirai au zouave monozygote qui interroge ma « malianité » : ATT ne te connaît ni d”Adam ni d”Eve, moi je n”attends récompense que de Dieu. Si tu penses que ton destin est entre les mains d”un humain comme toi, bonne chance. Mais, souviens-toi : tout être humain peut décevoir l”espoir de son prochain, seul Allah ne déçoit jamais celui qui lui fait confiance. Mon pain et mon beurre, je travaille pour l”avoir et je demande à Dieu de me mettre à l”abri du besoin. Ce besoin qui fait perdre toute dignité à certains êtres humains.
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Encore un mot pour finir : mon arrière-grand père, capitaine de la cavalerie du Macina, a fait la guerre à titre bénévole, il faisait partie des officiers qui ont pourchassé El hadj Omar jusqu”aux portes de Deguimbéré. Il vendait ses propres bœufs et vaches pour payer ses armes à son forgeron préféré : Ibrahim Demba Landouré. L”histoire de la Dinaa de Sékou Ahmadou est trop sophistiquée pour qu”un gougnafier puisse la comprendre.
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Et accessoirement, pour descendre plus proche, mon père, feu Sékou Salah, est l”homonyme du saint homme de Wouro Boubou qui lui a personnellement appris le Saint Coran et la voie de Dieu. Tu comprends donc que je n”ai pas besoin de crier sur les toits pour prouver quelque chose. Tu comprends surtout que nous ne sommes pas de la même école de pensée.
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Ousmane Sow
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(journaliste, Montréal)
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