Les corps éventrés, les intestins sanguinolents gisant par terre. D’autres alignés, le cou tranché au couteau, d’autres encore émasculés. Voilà quelques unes des images atroces, choquantes, insoutenables que nous avons reçues à L’Indépendant et qui témoignent de la cruauté, de la barbarie, de la sauvagerie, disons le mot , de la bestialité avec laquelle les bandits armés et leurs tout-nouveaux alliés, les terroristes d’AQMI, ont traité les militaires maliens qui ont eu le malheur de tomber entre leurs mains, après les attaques traîtresses à l’arme lourde lancées contre les localités de Ménaka, Aguelhoc, Tessalit, Léré, Niafunké.
Attaques traîtresses parce que les bandits armés, qui se sont rendus coupables de telles atrocités, avaient été accueillis en frères dans le besoin lorsqu’il y a quelquesa mois, ils fuyaient la Libye transformée en enfer terrestre pour trouver l’asile et la paix sur leur terre d’origine. Plus par calcul que par lâcheté, ATT s’était porté à leur secours en leur offrant argent, vivres, médicaments, matelas et couvertures pour qu’ils ne meurent pas du froid glacial des nuits du désert.
L’Algérie voisine, probablement dans le même état d’esprit que le chef d’Etat malien (soulager de la détresse ces mercenaires en débandade pour éviter qu’ils ne recourent à la violence pour assurer leur survie) avait envoyé sur leur site d’accueil un aéronef bourré de vivres, de tentes etc. La seule chose que l’on peut reprocher au président ATT et dont un grand nombre de nos compatriotes ne se privent pas en ces jours troublés, c’est de n’avoir pas été assez avisé pour faire désarmer ces aventuriers avant qu’ils ne franchissent les frontières nationales. Le Niger l’a bien réussi. Pourquoi pas le Mali?
Il reste que le fait pour les autorités maliennes de n’avoir pas été assez clairvoyantes pour permettre à ces bandits armés de pénétrer sur le territoire national équipés d’armes de guerre dit-on sophistiquées et de moyens de mobilité décrits comme "impressionnants" ne les absout en rien des crimes odieux qu’ils viennent de commettre dans les diverses localités citées plus haut.
Ces crimes ne sont ni plus ni moins que des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Ils sont donc passibles de poursuite devant la Cour pénale internationale (CPI).
Cette institution des Nations Unies, créée le 1er juillet 2002, est chargée de promouvoir le droit international et de juger les individus ayant commis un génocide, des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre.
Si la Convention de la CPI reconnaît qu’"il n’y a pas, pour les crimes contre l’humanité, une définition généralement admise", elle n’en donne pas moins la description suivante : "une violation délibérée et ignominieuse des droits fondamentaux d’un individu ou d’un groupe, inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux".
L’article 7 du Statut de Rome, son acte fondateur signé le 17 juillet 1998, dresse une liste (non exhaustive) se rapportant aux crimes contre l’humanité. Le meurtre est le premier de ces crimes. S’y ajoutent "tous autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale".
Ces cas de figure s’appliquent parfaitement aux militaires maliens fauchés dans les camps de fortune de Ménaka, Aguelhoc et autres. Faits prisonniers par les assaillants, ils ont été froidement assassinés par égorgement ou décapitation comme des bêtes et vidés de leurs boyaux. Il n’y a pas "d’acte plus inhumain" et on devine bien "les grandes souffrances" qu’ils ont subies avant de rendre l’âme.
La motivation raciale de ces crimes est évidente : c’est parce que ces militaires étaient du sud et avaient la peau noire qu’ils ont été assassinés dans les pires conditions et leurs corps sauvagement mutilés.
La Convention de la CPI décrit le crime de guerre comme "une violation des lois et coutumes de guerre d’une gravité particulière". Sont listés comme relevant des crimes de guerre "l’assassinat ou le mauvais traitement des prisonniers de guerre, le pillage de biens publics ou privés, la destruction sans motif des villes et villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires".
A Ménaka, Aguelhoc, Tessalit, Léré, Niafunké, les bandits armés et leurs complices, les terroristes d’AQMI, ne se sont pas contentés d’assassiner et de mutiler les prisonniers noirs, ils ont pillé les garnisons, emportant tout ce qui pouvait l’être, vidé les boutiques d’innocents commerçants des vivres et toutes denrées qu’elles contenaient, volé le bétail (chameaux, chèvres, chevaux, moutons) les véhicules 4X4, l’argent, les bijoux des femmes, tout ce qui leur tombait sous la main. Ils se sont comportés comme des pillards, ce qui est inscrit au demeurant dans leur ADN.
Longtemps le Mali a cru pouvoir régler la question du banditisme armé dans le septentrion par le dialogue. Mais cela n’a jamais abouti à un résultat tangible. Chaque répit procuré par le dialogue n’a jamais servi qu’à permettre aux bandits armés de gagner du temps et de mieux se préparer pour les prochains rezzou. Car ils ne connaissent que çà, ces gens-là : attaquer, tuer, piller sous le prétexte d’une "indépendance de l’Azawad" à laquelle ils sont les derniers à croire tant elle est chimérique. De toute façon inacceptable pour le peuple malien dans son écrasante majorité. Aussi loin que l’on remonte dans l’histoire, Tombouctou et Gao (donc Kidal qui n’a été érigée en région administrative que par pure nécessité de déconcentration) ont toujours fait partie intégrante du Mali. Par moments, elles ont même constitué le coeur de l’empire et son foyer de rayonnement. Elles continueront probablement à faire partie du Grand Mali jusqu’à la fin des temps annoncée par la Torah, la Bible et le Coran.
Avec les attaques lâches, perfides et les actes criminels perpétrés par les bandits armés et les terroristes d’AQMI, le Mali tient une formidable opportunité d’instruire un dossier auprès de la CPI. Les têtes pensantes du fameux MLNA sont connues.
Ces individus sans vergogne narguent à longueur de journée l’Etat malien sur internet. Certains d’entre eux ont été députés et le sont probablement encore, d’autres hauts fonctionnaires dans les ministères ou diplomates dans les ambassades du Mali.
D’autres enfin sont devenus des hommes d’affaires prospères ayant pignon sur rue dans les beaux quartiers de Bamako. L’un d’entre eux est même l’objet d’un mandat d’arrêt international pour trafic de drogue lancé contre lui par un Etat voisin. Le Mali traîne jusqu’ici le pied pour lever son immunité parlementaire afin qu’il puisse être entendu et au besoin poursuivi par cet Etat demandeur.
Les identifier, les neutraliser, les extrader à La Haye et les juger n’est assurément pas une tâche au-dessus des capacités de la CPI. D’autant que celle-ci ne s’intéresse pas à la main qui a commis le crime mais à la personne qui a poussé cette main au crime.
Saouti Labass HAIDARA
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