« C’est peu de dire que nous vivons dans un monde complexe et en perpétuel mouvement où les bouleversements stratégiques, la globalisation et l’interconnexion des situations, l’extraordinaire progrès des connaissances ainsi que l’influence des moyens de communication présents sur notre perception de la réalité et rendent incertain l’art de gouverner.
Ce qui nous impose un effort constant de renouvellement et de reconstruction de nos analyses afin que notre action soit toujours plus efficace, toujours plus cohérente avec nos orientations fondamentales ». C’est ainsi que s’exprimait Souleymane Boubéye Maïga, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale le lundi 14 Novembre 2011. C’était à l’occasion de la conférence inaugurale du « Master en Géostratégie », dans la salle de conférence du Pôle Universitaire « Amadou Hampaté Bâ ». Au cours de sa communication portant sur « La géologie de la bande sahélo-saharienne », il s’est adonné au difficile exercice de définir le concept de ‘’géostratégie’’ et de sa spécificité dans la zone sahélo-sahélienne. Ainsi il a profité de cette tribune pour évoquer la situation du Sahel qui représente pour lui une région importante du point de vue de la sécurité et de la stabilité internationale. Il a jubilé en affirmant que la zone sahélo-sahélienne fait face à quatre grands défis qui renvoient à une série de problématiques et de crises imbriquées les unes dans les autres que sont :
– la vulnérabilité historique et structurelle des Etats due à l’extrême étendue des territoires, au faible peuplement et aux frontières inexistantes ; la faible effectivité de leur souveraineté ; la situation de post conflit non encore stabilisée avec la persistance des revendications identitaires et des rivalités intercommunautaires ; et à un faisceau d’indicateurs économiques négatifs.
– l’explosion de la criminalité transnationale organisée avec le trafic de drogue (selon l’ONU, environ 50 tonnes de cocaïne transitent par cet espace par an), l’immigration clandestine avec des acteurs hybrides qui s’appuient sur des complicités locales disposant de territorialités.
l’accroissement de la menace terroriste marqué par l’enracinement du terrorisme djihadiste incarné par l’AQMI (capacités militaires et capacités de recrutement renforcées grâce aux ressources tirées de la collusion avec des réseaux mafieux et le paiement des rançons), la connexion avec Boko Haram.
Toute chose qui nécessite une réponse globale, multidimensionnelle (sécurité, développement, gouvernance) et multinationale, permettant l’instauration de la sécurité en contenant les facteurs de désordre, premier enjeu de gouvernance (renforcement de nos capacités, adaptation de nos dispositifs pour un engagement durable sans rupture logistique). De même, il faut la mise en œuvre d’une politique de développement visant une récupération sociale du territoire, le déploiement de la puissance publique et une offre de service de base (eau, santé, formation, économie locale), le PSPSDN continue d’apporter une réponse constitutionnelle pour garantir plus de participation, plus de responsabilité et plus d’expression des particularismes sans remise en cause du pacte républicain. La considération de la coopération régionale et internationale jouant un rôle central avec la mutualisation progressive des capacités et une meilleure articulation avec nos partenaires extrarégionaux
Dans sa communication, le ministre Souleymane Boubéye Maïga rappellera que les pays du champ (Algérie, Mali, Mauritanie, Niger) ont tenu une réunion au mois de mai 2011 à Bamako avec la mise en place du CEMOC (Comité d’Etat-Major opérationnel conjoint) et de l’UFL (Unité de Fusion et de Liaison) et que dans le prolongement de la même réunion, les pays du champ et leurs partenaires se sont transportés à Alger pour une nouvelle conférence en septembre 2011. Il a aussi informé qu’à Washington les pays du champ ont évoqué avec les Américains la concrétisation opérationnelle de certains engagements. Le ministre a, par ailleurs, dévoilé le calendrier des pays du champ qui se déplaceront en décembre à Bruxelles pour rencontrer l’UE, et annoncé l’élargissement de l’espace au Burkina-Faso, au Nigeria et au Tchad, en précisant qu’une rencontre aura lieu ce même mois de décembre avec les pays de l’UMA (Union Maghreb Arabe) notamment la Libye, le Maroc et la Tunisie.
Le chef de la diplomatie malienne fera remarquer que sa démarche est impactée par des évènements imprévus survenus en Libye qui ont eu pour conséquence la prolifération des armes et l’afflux massif d’ex-membres des forces gouvernementales pour compliquer, voire perturber le cours normal des politiques des pays concernés. Pour finir, il a affirmé que l’Etat ne cédera à aucune intimidation, n’acceptera ni instrumentalisation ni récupération de la situation et ne tolérera aucune action de subversion.
Gaoussou Madani