S’il est exact que la lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest n’est pas exclusivement une affaire des pays sahéliens et que les pays côtiers doivent aussi y participer, on doit aussi se rendre à l’évidence que cette lutte que mènent depuis des années les pays sahéliens (une décennie pour les cas du Mali et du Nigéria), ne pourrait se gagner sans un engagement total et sincère de tous. En raison de cette réalité, aucune initiative mettant en synergie l’ensemble des forces de défense et de sécurité des pays concernés ne doit être écartée.
La force française antiterroriste Barkhane et le G5 Sahel (regroupant quasiment l’ensemble des pays du Sahel) n’ont pu lutter efficacement contre le fléau terroriste qui s’est, au contraire, propagé dans toute l’Afrique de l’Ouest. De sorte que des pays africains de l’ouest ont décidé, depuis 2017, de fédérer leurs efforts militaires pour l’éradication du terrorisme dans leur espace. D’où « L’Initiative d’Accra ». A l’origine, elle concernait quatre pays : Benin, Côte d’Ivoire, Ghana et Burkina (seul pays sahélien), mais elle est ouverte aux autres pays de l’Afrique de l’Ouest. L’Initiative vise le partage d’informations et de renseignements, dans la discrétion, la formation du personnel de sécurité et de renseignement et la conduite d’opérations militaires conjointes transfrontalières.
Le 22 novembre 2022 à Accra, trois Chefs d’Etat et deux Premiers ministres se sont retrouvés en sommet pour discuter de l’Initiative d’Accra. Ce sont les présidents du Ghana, Nana Akufo Ado, du Bénin, Patrice Talon et du Togo, Faure Gnassingbé. Les Premiers ministres de la Côte d’Ivoire, Patrick Achi et du Burkina, Me Apollinaire Joachim Kyelem de Tembèla s’étaient joints à eux. Mais le Mali et le Niger (pays observateurs) étaient les grands absents. Alors qu’avec le Burkina, ces deux pays sahéliens constituent l’épicentre des actes terroristes. N’est-ce pas, selon un adage malien, « faire le baptême d’un enfant en l’absence de ses parents ? » (En Bamanankan : « Ka N’Den Koundi Ka N’Dew Tigui Tô ». Si un tel usage n’est pas conforme aux normes établies, alors « l’Initiative d’Accra est loin d’être une alternative crédible pour lutter contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest, sans le Mali et le Niger. Ne va-t-elle pas subir le même sort que Barkhane et le G5 Sahel ?
En tout état de cause, une quantité de doutes plaident pour son échec, en l’occurrence lorsque l’on sait que des pays occidentaux comme la France, les USA et même l’UE sont derrière cette « Initiative d’Accra ». Lesquels ont promis des aides financières et logistiques au même moment où de nombreux Africains de l’Ouest estiment que la lutte contre le terrorisme doit se faire uniquement avec que des moyens financiers et matériels africains. Sans aucune ingérence de quelque puissance que ce soit.
Mais aussi, lorsque l’on sait que les autorités maliennes affirment mordicus détenir des preuves d’accointance des mouvements terroristes avec les forces francaises Barkhane qui étaient déployées dans leur pays, cela n’est-il pas une raison suffisante pour douter de la réussite de « l’Initiative d’Accra ?
Gaoussou Madani Traoré