Dans son message à la nation, à la veille du 61e anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, Alassane Dramane Ouattara, a annoncé avoir accordé « la grâce » à neuf détenus arrêtés lors des troubles et violences électorales d’octobre 2020 et la mise en « liberté provisoire de 69 inculpés ». Ce geste d’apaisement du chef de l’Etat était très attendu par de nombreux ivoiriens. Notamment parmi les plus célèbres d’entre eux : les anciens présidents Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié. Et le cas de Guillaume Soro ? Peut-on véritablement aller à une réconciliation en Côte d’Ivoire sans l’ancien président de l’Assemblée nationale et non moins ancien PM ?
Laurent Gbagbo est revenu au pays après une décennie d’absence. Un retour au bercail rendu possible grâce à la confirmation de son acquittement en appel à la Cour Pénale internationale (CPI), où il était poursuivi depuis 2011, pour des violences post-électorales. Il a déjà rencontré le président ADO avec lequel, il a été question de dialogue et de réconciliation mais surtout de libération de prisonniers politiques. Auparavent, l’ancien président Bédié et ADO s’étaient plusieurs fois rencontrés pour les mêmes causes. Tous ces leaders politiques affirment haut et fort qu’ils souhaitent la réconciliation de tous les Ivoiriens dans un cadre de dialogue inclusif et constructif. Ce qui est bel et bien possible. Sinon nécessaire !
Mais le triptyque dialogue-réconciliation-libération de prisonniers, s’il doit aboutir à quelque chose de pérenne, il doit nécessairement avoir un caractère inclusif. ADO doit alors abandonner sa hache de guerre contre son allié politique (devenu son principal rival) pour que le pays d’Houphouët-Boigny puisse redevenir ce havre de paix qu’il était naguère. Toutefois, la seule décrispation politique entre le pouvoir et ses opposants ne suffit pas.
Il faudra aussi se pencher sur le sort des victimes des différents troubles (surtout ceux causés lors de la crise post-électorale de 2010) en trouvant des mécanismes de satisfaction durables. Puisqu’il faut éviter de provoquer des frustrations.
Réussir ce difficile exercice politico-judiciaire aiderait indubitablement à la construction d’une vraie réconciliation entre tous les Ivoiriens. ADO, dans un contexte d’apaisement général, devrait donc prendre des dispositions pour immédiatement faire cesser la délivrance de mandats d’arrestation par les juges. Ceux déjà délivrés doivent être suspendus. En garant de l’unité nationale en Côte d’Ivoire, le Chef de l’Etat devrait aussi gracier l’ensemble des prisonniers politiques ou initier une loi d’amnistie.
Cette loi aurait toutes les chances d’aboutir parce que sa famille politique détient actuellement la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Qu’il se mette alors au boulot !
Gaoussou Madani Traoré