Les politiciens, policards et politicaillons qui peuplent l’arène malienne avaient aiguisé leurs couteaux, leurs fourchettes et leurs cuillères dans l’espoir que Dioncounda partage le gâteau national à hauteur de souhait. Beaucoup sortent brédouilles du festin annoncé. Petite revue de détails…
Après la bastonnade de première classe qu’il a subie en mai, Dioncounda Traoré est revenu de Paris avec une cicatrice kilométrique sur le front mais toujours le même radieux sourire au coin des lèvres. En voilà un qui rendra grâces aux médecins français mais aussi…au contribuable malien puisqu’entre un séjour à l’hôpital et une convalescence à l’hôtel Pullman, il y a de quoi épuiser un an d’impôts du PMU Mali ou des Grangs Greniers du Bonheur.
En vérité, Dioncounda ne manque pas de courage. Il faut, en effet, un courage indien pour revenir tout seul, sans escorte de la CEDEAO ni de l’ONU, dans un pays dont les citoyens manient si fort le bâton et le caillou. Les amis de Dioncounda, espérant transformer en fonds de commerce politique sa légitime rancune contre ses agresseurs, ont commencé à bâtir des plans sur la comète, pardon!, sur la planète Mars. Oubliant qu’avant eux, l’astrophycisien Cheick Modibo Diarra avait conquis l’amitié des Martiens. A l’entendement des amis politiques de Dioncounda, ce dernier, remis en selle par la communauté internationale et le relatif retrait des militaires de la scène, allait vite prendre sa revanche : débarquer sans sommation Cheick Modibo de la primature, chasser de leurs strapontins tous les disciples de l’héritier de Da Monzon, reprendre la réalité du pouvoir, redistribuer prébendes et rentes aux politiciens blanchis sous le harnais.Dans l’attente de ce festin grandiose, l’Adema, ancienne gloire des compétitions électorales organisées sous le règne du “Vieux Commando”, a fait parvenir à Dioncounda une liste de 35 ministrables (excusez du peu !).Sur la fameuse liste figuraient, bien entendu, tous les barons du parti, lesquels se croient nés pour gouverner et tombent dans le chômage dès qu’ils sont priés de débarrasser leurs fauteuils ministériels ou directoriaux. Le PDES, lui, a soudain cessé de pleurer la chute du“Vieux Commando” pour retrouver de l’appétit à l’annonce d’un gouvernement d’union nationale: il a remis à qui de droit une liste de ministrables longue comme un patte d’autruche. Les autres partis politiques ne furent pas en reste : certains ont proposé des vieux de la vieille; d’autres, pour faire oublier leur compagnonnage avec le “Vieux Commando”, ont proposé des jeunes loups aux dents longues. Les associations, y compris islamiques, étaient également de la fête: même celles dont les militants tiendraient sous un hangar ou dans un “koroboroboutiki” ont proposé des noms…
Premier coup de massue asséné à cette petite foule de dignitaires politiques: Dioncounda fait lire un communiqué qui reconduit le Premier ministre dans ses fonctions. Beaucoup en ont passé des nuits blanches: ils se voyaient déjà plastronner dans les salons lambrissés de la primature, entourés de liasses et de laquais. Et puis, suprême injure, le Premier ministre n’a même pas daigné démissionner avant d’être reconduit, ce qui signifie que Dioncounda fut obligé d’avaliser un fait accompli.
Deuxième coup de massue administré à notre foule des mendiants de postes: au lieu de les faire émarger sur le quota de 5 ministres qui lui était réservé, qu’a fait le bon et brave Dioncounda ? Il a préféré faire la cour à ceux qui ne le portent pas dans leur coeur. Il a remis un ministère (celui des transports) à l’armée, quoique cette dernière disposât déjà de 6 départements juteux. Il a ensuite remis un ministère (celui du travail) au Coren, bien que ce Collectif des Ressortissants du Nord ne lui ait rien demandé. Il a offert un ministère (celui des postes) à la Copam, un regroupement qui tenait coûte que coûte à lui ôter le pain de la bouche à travers la Convention nationale dont vous vous souvenez sûrement. Il a enfin donné un ministère (celui des affaires étrangères) à son allié de l’UDD. A l’Adema même, son parti d’origine, Dioncounda n’a remis qu’un maroquin alors qu’il sait l’état de famine générale qui règne dans cette formation.
Troisième coup de massue asséné à la classe politique: Dioncounda a laissé, sans mot dire, le Premier ministre reconduire 18 de ses 24 ministres sortants alors que de nombreux partis, malgré l’ouverture promise, sont restés le bec dans l’eau: PDES, Parena et consorts. Et ce n’est pas tout ! Voyant que le président a perdu dents et griffes depuis sa mémorable bastonnade, Cheick Modibo n’a même pas jugé utile de soumettre à sa signature le décret par lequel il a nommé conseillers, avec rang de ministres, trois de ses anciens ministres…
A présent que la table est servie et que le festin commence, la presse, naguère très critique envers le chef du gouvernement, ne dit plus un mot de ses torts. A croire qu’il est subitement devenu aussi irréprochable que les imams du Haut Conseil Islamique qui le soutiennent ! Car, c’est un fait, l’imam Mahmoud Dicko et le Chérif de Nioro, principaux leaders du Haut Conseil, n’ont mobilisé leurs troupes que pour montrer leurs muscles à Dioncounda et lui donner un avant-goût de ce qui l’attendait si jamais il s’avisait de renvoyer le Premier ministre. Bien sûr, les imams non plus ne crachent pas sur la soupe.Remarquez que pour la première fois dans l’histoire du Mali, un ministère chargé du culte a été créé et confié à un cadre du Haut Conseil Islamique. Cet organisme conduisait déjà les destinées de la CENI et il est désormais si certain de sa puissance qu’il n’hésite pas à demander le limogeage du directeur de l’ORTM au seul motif que celui-ci a voulu limiter le nombre d’oulémas venus annoncer sur les antennes que la lune a été aperçue !
A notre avis, la stratégie de Dioncounda ne manque pas de clarté. Agé de 70 ans et ayant, après 40 ans de militantisme, atteint le sommet (Koulouba), il n’a plus rien à perdre ni à gagner en politique. Mieux vaut donc pour lui d’assurer ses acquis en se réconciliant, sur le dos de ses anciens amis du FDR, avec ses anciens ennemis (Copam, Cnrdre et autres). Nul ne sait quand la transition finira; or tant qu’elle durera, son président fera la pluie et le beau temps avec, à la clé, une caisse noire qui ne connaît pas la crise, un parc automobile fourni à souhait, la fanfare nationale et les motards de la gendarmerie à chaque déplacement. A sa place, auriez-vous agi autrement ? Je ne le crois pas. Dioncounda sait qu’il a gagné par un inespéré coup du sort ce qu’il aurait pu perdre lors des élections avortées d’avril 2012. Il sait aussi que sans la CEDEAO, il n’aurait eu aucune chance de s’asseoir dans un fauteuil où le capitaine Amadou Sanogo se sentait fort à l’aise. Surtout, Dioncounda sait que s’il perd son fauteuil chèrement conquis, il devra, pour survivre, reprendre la bonne vieille craie en vue d’enseigner les mathématiques aux enfants. Pour qui connaît le salaire d’un enseignant comparé aux privilèges d’un président de la République (ou du moins son tiers, le reste étant aux mains d’Ansar Dine), on ne peut en vouloir à l’ex-président du parlement de renégocier ses amitiés. Bref, pour rouler le FDR et compagnie dans la farine, Dioncounda a adopté la dévise suivante: “Sauvez-moi de mes amis; je m’occupe de mes ennemis!”. Après tout, Dioncounda n’ignore pas qu’entre deux maux, le sage choisit toujours le moindre: ses ex-ennemis de l’armée et de la Copam agissent à coups de bâtons alors que ses ex-amis du FDR ne savent faire que des grimaces…
Tiékorobani
Le chien aboie, la caravane passe.
Dioncouda est un professeur d’université donc ça n’est certainement pas aux enfants qu’il va enseigner les Mathématiques comme vous êtes entrain de le dire!!!!
Et puis quel est le lien entre cet article et les objectifs du Mali?
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