Candidatures indépendant entre les partis politiques et la société civile : Le choc des intérêts

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Un candidat indépendant (ne répondant à aucun parti politique) peut prétendre au poste de Président de la République. Mais cette « doctrine » n’enchante pas beaucoup les citoyens, car elle représenterait un danger pour la démocratie malienne. Pourquoi ne pas alors mettre des « garde-fous » pour l’élection présidentielle, surtout que le débat sur la candidature indépendante doit faire aujourd’hui réfléchir plus d’un ?

Dans la réalité, l’indépendant n’a pas de bilan à défendre auprès de sa base, car il n’en a pas. L’obligation de résultats n’est donc pas une nécessité pour lui. Pour mettre fin à cette tendance d’indépendant, des tirs croisés se dessinent à l’horizon entre les partis politiques et la société civile. Mais, loin des intérêts de chapelle, la question mérite que les démocrates y accordent une attention qui pourrait apporter un plus à l’animation de la vie politique qui est jusque-là monopolisée par les partis politiques.

La peur bleue des partis politiques Le refus des candidatures indépendantes est l’une des rares questions qui fait l’unanimité au sein de la classe politique, toutes tendances confondues. Ceux qui « lâchent un peu de lest » disent qu’on pourrait les accepter pour les élections municipales qui sont des élections de proximité. Par contre, ceux qui ne souhaitent même pas céder sur la question sont sans détour : « Ceux qui veulent faire de la politique n’ont qu’à créer leur parti pour la faire à visage découvert afin de recevoir, comme nous, des coups qu’on nous assène de part et d’autre ». Ils ont raison parce qu’ils ont la caution de la loi. En effet, la Constitution stipule : « Les partis et formations politiques se créent librement. Ils concourent à l’animation de la vie politique, à l’information et à l’éducation du peuple ainsi qu’à l’expression du suffrage. Ils mènent librement leurs activités dans le respect des lois… ». Est-ce là une insuffisance de la loi qui oblige tout citoyen à appartenir à un parti ou formation politique avant de prétendre à l’éligibilité ou une simple précaution pour protéger les partis politiques ? Encore faut-il que les partis fassent un bon usage de leur monopole et comblent les attentes des populations… Certes, la question de candidatures indépendantes se pose aujourd’hui avec acuité. Mais les partis politiques ont montré leurs limites concernant les missions qui leur sont assignées. En fait, les responsables politiques justifient leur refus des candidatures indépendantes parce qu’elles pourraient « tuer » les partis politiques qui sont déjà fragiles. Mais leurs inquiétudes sont approfondies par d’autres raisons fondées sur la suspicion. En effet, la revendication de ces candidatures est l’apanage de structures bien connues de la société civile et que certains taxent d’appartenance à un parti clandestin. Mais ces structures et leurs leaders bénéficiant d’une certaine crédibilité au sein de l’opinion publique, ces candidatures indépendantes diminueront les chances des candidats des partis politiques.                                                

Cependant, ce semblant de convergence d’intérêts des partis politiques n’exclut pas non plus une suspicion entre eux. En effet, le parti au pouvoir pourrait utiliser cette opportunité pour gagner davantage les élections. Par exemple, des députés qui s’étaient fait élire sous la bannière d’autres partis parce que n’ayant pas été retenus sur les listes du parti au pouvoir y sont retournés après leur élection. Alors, s’il y a des candidatures indépendantes, les « déçus » n’ont plus besoin d’une nouvelle étiquette politique (qui pourrait leur valoir des inimitiés) pour se présenter à l’élection de leur choix. Aussi, l’opposition gagnerait à travers les candidatures indépendantes parce que tous les candidats n’iront pas vers le parti au pouvoir, car certains défendront les mêmes points de vue.              

Un mal nécessaire                               

Pour les partis politiques, les candidatures indépendantes ne présentent que des inconvénients, bien que la loi stipule que tous les Maliens, sans distinction, ont le droit de participer à la gestion des affaires de l’Etat et de la société. A ce titre, ils sont électeurs et éligibles dans les conditions prévues par la loi. Mais pour pouvoir jouir de la Constitution, faut-il pour autant forcer tous les Maliens à appartenir à un parti ? Pourquoi ne doit-on pas élire un candidat indépendant à la Présidence de la République ? En effet, le Président de la République est de loin le titre le plus important de la Nation. Aussi, les partis politiques veulent de nos jours continuer à exercer un monopole sur l’animation politique nationale : c’est de bonne guerre.                                          

Après plus de deux décennies de démocratie, le Mali compte plus d’une centaine de partis politiques auquel incombe l’animation de la vie politique. Mais ils n’ont jamais pu faire converger la moitié de l’électorat vers une élection. Au-delà de l’éducation politique qui n’est pas assurée, l’image que certains politiciens laissent voir de leur « profession » n’a été que du discrédit. Si les partis politiques sont sûrs de leurs forces et n’ont rien à se reprocher, qu’il soit néanmoins permis au peuple malien d’avoir d’autres choix : cela éviterait d’avoir les mêmes députés à l’Assemblée depuis 1992.        Depuis des années, la question de candidatures indépendantes est posée et doit donc être résolue tôt ou tard parce que malgré leur monopole, les partis politiques ont montré leurs forces et faiblesses. Mais vingt années après, ils refusent toujours de faire leur mea-culpa sur leur manque de véritable contribution à l’avancée démocratique. Quant aux partis d’opposition, leurs faiblesses ont pour responsables le pouvoir et la société civile.

Paul N’guessan

 

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