Burkina Faso : Le peuple a eu raison de son dictateur

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Il convient de rappeler à nos lectrices et lecteurs qu’ à la faveur d’un coup d’Etat sanglant contre le président Thomas Sankara, le capitaine Blaise Compaoré s’est confortablement installé à la tête de l’Etat burkinabé. C’était un jeudi 15 octobre 1987. Pour justifier son forfait sanglant, Compaoré a déclaré sur les antennes de la télévision nationale que «le camarade Sankara s’était trompé» et qu’il était emporté par «la mégalomanie».

Blaise - procès
Le président burkinabè et médiateur dans la crise malienne, Blaise Compaoré.

En lieu et place de la révolution, Blaise a entrepris ce qu’il avait appelé «la Rectification». La suite n’échappa à personne : à la tête du «Front populaire», Blaise s’est livré à une véritable chasse aux sorciers assassinant ainsi la quasi-totalité des fidèles compagnons de Thomas Sankara. Entre autres, les peuples d’Afrique et du reste du monde ont appris avec tumeur au cœur et au cerveau l’assassinat crapuleux de camarades comme le commandant Jean Baptiste Boukari Lingany, le capitaine Henri Zongo, Norbert Zongo du Journal du Jeudi. Comme pour dire que pour se maintenir au trône sans partage, Compaoré a opté pour la répression sanglante de toutes les velléités de contestation fusent-elles légitimes et légales.

Pendant 27 longues années de dictature militaro-politique aveugle, Blase a taché sa main du sang du peuple laborieux du Faso. Conscient des graves crimes qu’il a commis, au cours de son régime sans partage, Blaise Compaoré ne pouvait pas ne pas chercher à s’éterniser au pouvoir pour éviter le tribunal de l’histoire. Mais c’était sans se rassurer que la roue de cette même histoire ne cesse de tourner. C’était aussi sans compter sur la combativité du peuple travailleur du Burkina Faso.

Pour s’accrocher encore et toujours, Compaoré a voulu tripatouiller pour la énième fois la constitution du pays des Hommes intègres par la tentative de modification du fameux article 37 de ladite constitution.

Pour éviter les tracasseries d’un éventuel référendum sur la question, l’Assemblée du Faso, à la solde du président assassin, a voulu légitimer ladite modification de la loi fondamentale, tout juste pour permettre à Blaise de se maintenir au trône au-delà de 2015 qui consacre la fin de son mandat, de son régime.

Mais là où le bât blesse d’abord, c’est que les députés ont foulé au pied la volonté de leurs électeurs, de voir Blaise garder intacte la constitution du pays. Que des gens qui se disent «élus» décident de se rencontrer pour assouvir le désir d’un homme pendant que le pays était au bord de l’implosion, c’est tout simplement insultant, déshonorant pour ce vaillant peuple.

Blaise Compaoré n’a pas compris que depuis la mutinerie de 2011 contre lui, la peur qu’il avait installée dans les cœurs des Burkinabès s’était volatilisée outre mesure. Il n’avait pas fait la bonne lecture des nouvelles donnes du climat politique marqué par les démissions en cascade de bien de cadres et militants de son parti la CDP (Convention démocratique du peuple). Nous disions dans notre parution n°478 que «Blaise doit se rendre à l’évidence qu’il n’est plus possible de tuer impunément aujourd’hui son peuple».

L’attitude des «députés» du Faso de faire passer en force la modification de l’article 37 de la Constitution a mis le feu aux poudres. Les événements se sont précipités à telle allure que le pouvoir ne pouvait pas ne pas échapper à Blaise. La marche arrière consacrée par son adresse à la Nation du 30 octobre n’a rien arrangé. Le stratège des assassinats était cette-fois contraint d’abandonner le pouvoir et du coup le pays des Hommes intègres. Le 31 octobre 2014, le peuple du Faso a eu raison de son dictateur.

Au moment où nous mettions sous presse, c’était la confusion totale à propos des déclarations contradictoires des militaires quant à la gestion de la transition. Aux dernières nouvelles, c’est le lieutenant-colonel Isac Zida qui doit diriger cette transition. On sait une seule chose à ce niveau : c’est que ce lieutenant-colonel était jusqu’à la chute de Blaise un des éléments clés de la Garde présidentielle.

On pourrait se demander comment ce lieutenant-colonel peut-il être l’homme du peuple. La seule certitude qu’il faut noter à la lumière des derniers développements des événements au Faso, c’est que toute la classe politique, tous les dirigeants d’Afrique doivent se rendre à l’évidence que les coups d’Etat peuvent désormais être réalisés par les masses laborieuses sans armes. Révolu donc le temps des répressions policières. Cela est de plus en plus évident quand on sait que la Cour pénale internationale (CPI) est là pour demander des comptes à tout dirigeant civil ou militaire qui tachera ses mains du sang de son peuple.

Blaise Compaoré est tombé. Il reste à lui demander des comptes partout où il ira car, il a trop fait saigner son peuple en assassinant crapuleusement de valeureux fils du pays. Compaoré doit se rendre à l’évidence que l’assassinant crapuleux de Thomas Sankara et compagnons ne peut rester impuni.

Et si demain Blaise rejoignait le box des accusés de la CPI aux côtés des Laurent Gbagbo qu’il avait lui-même un moment souhaité voir à la barre de la CPI ! Un fois encore, la roue de l’histoire tourne et tournera toujours.

Ainsi, le lieutenant-colonel Isac Zida autoproclamé à la tête de la transition ne doit pas oublier un seul instant qu’il doit absolument se plier à la volonté populaire sans laquelle Blaise ferait toute sa vie au trône assis sur du sang des frères du Faso. Aussi et enfin, les autres criminels tapis dans l’ombre de Blaise doivent savoir que leurs crimes ne peuvent rester impunis.

En attendant, souhaitons au peuple travailleur du Burkina Faso d’autres victoires encore plus éclatantes et lui demandons du coup de ne pas baisser la garde pour que cette victoire ne soit pas regrettée un jour. Il doit veiller à ce que la grande montagne n’accouche pas d’une souris au museau empoisonné.

Fodé KEITA

 

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