Le débat est constant dans le milieu politique sur les scénarios de la succession d’ATT : Va-t-il, comme en 1992, rester neutre et laisser le jeu se faire ? Va-t-il, comme Alpha Oumar Konaré, en 2002, imposer son poulain au peuple malien ? Essayera-t-il de jouer les prolongations ?
Le baron de l’URD qui se confie est formel : « ATT n’était pas en vacances en Libye. Il est allé voir Kadhafi pour ramasser de l’argent, beaucoup d’argent. Et ce pactole sera bientôt distribué aux députés pour préparer le référendum. Cette manœuvre cache une intention : convaincre les parlementaires de voter un amendement constitutionnel ayant pour but d’harmoniser les mandats de tous les élus et donc de trois ans en ce qui concerne les maires. Il gagnera ainsi trois ans. »
Au-delà de la grosse suspicion qui transparaît dans ces propos, il faut voir une évidence : à 21 mois de la fin du régime Amadou Toumani Touré selon la Constitution en vigueur, les intentions futures du candidat inquiètent plus de gens qu’on ne le pense. Et certains membres de son proche entourage sont aussi discrets que des perroquets. Ils parlent sans arrêt de la nécessité de laisser le général « terminer son œuvre ». A ce rythme, on n’est pas loin de la comparaison avec Pharaon, mais cela relève de la flagornerie et de l’opportunisme.
Notre prémisse du jour colle uniquement aux propos entendus de la bouche même du principal concerné : il ne touchera pas à la durée des mandats présidentiels et ne se sent nullement concerné par les appels dans ce sens. Pour lui, ceux qui le poussent à tripatouiller la loi fondamentale ont pour unique souci la sauvegarde leurs propres intérêts et privilèges. Alors, qui pourrait être, pour ATT, le candidat idéal, l’élu idéal, dans l’hypothèse où tout se passe normalement ?
« Le portrait robot que le général dresse de son successeur est un autre ATT, un clone de lui-même » analyse un habitué de Koulouba. « Il veut quelqu’un qui ne viendra pas saper son héritage et ternir son image, l’accuser de tous les maux, bref il ne veut pas de quelqu’un qui viendrait lui chercher noise, c’est clair ! Il a beaucoup souffert des attaques qu’il croit injustes et sans fondements pendant la transition. Il n’a pas aimé le déchainement des barons de l’ADEMA qui accusaient la Transition des pires péchés. Il a cependant noté qu’en dix ans de pouvoir, Alpha Oumar Konaré ne l’a jamais attaqué personnellement. Et, depuis 2002, il n’a jamais prononcé un mot de travers et en public sur Alpha et sa famille. Bref, Amadou Toumani Touré, s’il doit se mêler activement de sa succession, balancera en faveur d’un candidat modéré, dosé et diplomate, une personne qui lui garantira paix et tranquillité. Mais, de toutes les manières, il fera quelque chose. Les enjeux de 2012 ne sont pas ceux de 1992 et il jouera un rôle important dans la succession. »
Donc, qui sera son dauphin ? Ou, l-a-t-il déjà choisi mais se tait sur son identité ? Notre interlocuteur, après le portrait-robot, ne veut citer aucun nom mais il est formel sur un point : « En 2002, le général était convaincu que Modibo Sidibé présentait toutes les chances d’un présidentiable. Au fil du temps, malgré toute l’aide et la liberté de mouvement accordées l’actuel Premier ministre, il a compris que Modibo ne passe pas face aux Maliens. Son protégé qui fut aussi celui d’Alpha ne sera jamais un politicien professionnel capable de dépassement et d’abnégation pour se mettre au service du Mali. » Sauf revirement de dernière minute, il est presque certain qu’ATT ne battra pas campagne pour le général Modibo Sidibé.
Une autre hypothèse évoquée par certains observateurs est la continuité du triumvirat de 1992, à savoir ATT, Soumana Sacko et Alpha Oumar Konaré. Il ne reste plus que Soumana Sacko qui n’a pas accédé aux délices de Koulouba. Est-ce un scénario plausible ? Notre interlocuteur esquisse un sourire qui en dit long avant de se confier : « Quand ATT nommait Zou, les deux hommes ne s’étaient jamais rencontrés auparavant. C’est par les médias et radio trottoir qu’ATT a connu Zou et savait que ce dernier avait la capacité de redresser le pays pour une transition politique et économique réussie. Depuis, lors quand Zou était fonctionnaire international, il rendait des visites de courtoisie au président. Mais, honnêtement, Sacko n’est pas de nature à rassurer le président et son entourage. Avec Zou, ceux qui se rempli les poches finiront tous à Tessalit et les Maliens ont peur ! » Il reconnaît cependant le besoin urgent pour le Mali d’avoir à sa tête un homme à poigne, capable de ramener le sérieux et le respect du bien collectif dans les mentalités.
Au sujet des leaders des grands partis, rien n’indique aussi qu’ATT ait fait son choix ou penche pour l’un des ténors à savoir : Dioncounda Traoré (ADEMA), Ibrahim Boubacar Keïta (RPM) et Soumaïla Cissé (URD). A leur sujet, notre source se veut formelle : « Aucun d’eux ne pourra y aller seul. Il faut absolument un regroupement et une force dissuasive pour peser sur la balance et contraindre le pouvoir actuel à se soumettre à la loi des urnes ! »
Au fond, les jeux de coulisses et les susceptibilités personnelles d’ATT pèseront dans la balance. Et le candidat qui sortira vainqueur, s’il n’est pas le poulain d’ATT pourrait être celui qui a compris qu’il faut un arrangement entre gentlemen avec le locataire de Koulouba.
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