Atelier d’échanges et de réflexion sur les propositions de sortie de crise : Le discours nationaliste d’IBK

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Face à l’impasse dans la sortie de crise que connaît notre pays, le Regroupement politique qui soutenait la candidature du président du Rassemblement pour le Mali (RPM), Ibrahim Boubacar dit IBK, est monté sur ses grands chevaux le samedi 23 juin dernier au CICB. Dans un discours nationaliste, IBK privilégiera l’intervention militaire de nos forces armées et de sécurité pour libérer le nord de notre pays des mains du MNLA, d’Ançardine et des autres bandits armés. Il en appellera également à une concertation nationale pour débattre de la crise. Nous vous proposons ici l’intégralité de son discours.

Ibrahim Boubacar Keita

Bismilahi, rahamani, rahimi! Allahouma Sali Allah Seydina Mohamed Wa Salim!
Chers tous, en grades et qualités, c’est un truisme que de vous dire notre bonheur de vous accueillir en ces lieux aujourd’hui. Votre importante participation est le témoignage éloquent de votre profonde préoccupation par rapport à ce que notre peuple et notre nation vivent depuis bientôt trois mois.
Votre présence est également une précieuse confirmation de la réalité d’un besoin, la nécessité urgente d’un dialogue inclusif entre hommes et femmes de toutes les composantes de notre nation aujourd’hui meurtrie dans son tréfonds. En effet, notre pays traverse actuellement, la crise la plus profonde depuis son accession à la souveraineté internationale le 22 septembre 1960:
– Effondrement des institutions à la suite du coup d’état du 22 mars 2012, paralysie du jeu politique et incertitudes pesantes quant à l’avenir immédiat du pays;
– Désorganisation et démoralisation des forces armées et de sécurité;
– Partition de facto des trois régions du Nord, soumises à la loi ignoble de groupes terroristes qui commettent les pires exactions à l’encontre de nos frères et sœurs de Kidal, Gao et Tombouctou;
– Crise humanitaire se traduisant par le déplacement de centaines de milliers de personnes à l’intérieur même du pays et dans les pays voisins: Algérie, Niger, Burkina Faso, Mauritanie;
– Marasme économique, difficultés financières, de plus en plus pesantes, du fait de la suspension des aides extérieures;
– Aggravation de l’affaiblissement diplomatique déjà perceptible depuis près d’une décennie; etc. ….
L’amplitude de la crise actuelle fait que les Maliens ne peuvent absolument pas faire l’économie de l’analyse de la situation ayant conduit à l’effondrement de la Troisième République.  Du reste, lors de sa session inaugurale, à Abidjan, le 7 juin 2012, nos amis de la communauté internationale, regroupés au sein du Groupe de soutien et de suivi sur la situation au Mali, qui a été mis en place par le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union  Africaine, ont bien compris la nécessité pour les Maliens de se réapproprier le destin du Mali.
Il nous faut connaître les causes de la crise globale affectant présentement notre pays afin de forger les solutions appropriées. Pour cela, il faut que les Maliens se parlent, qu’ils établissent ensemble le diagnostic de la crise actuelle, qu’ils en identifient les causes afin de pouvoir dégager les voies et moyens d’une sortie de crise susceptible de relever le pays. C’est seulement à travers cette catharsis collective que les maliens pourront forger les outils de la reconstruction de leur unité nationale.
La voie pour sortir du chaos multidimensionnel actuel est étroite. Soyons clairs: la solution réside, avant tout, en nous-mêmes. Nos hommes de foi n’ont jamais cessé de nous alerter. Ainsi, les évêques du Mali dans leur historique adresse à la Nation malienne à la veille des élections générales de 2007: «De nouveaux comportements, inhabituels chez nous, apparaissent dans l’espace politique. Celui-ci devient le champ de guerres de tranchées ou des armes de ‘’destruction ciblées’’ sont utilisées: soupçons, procès d’intention, dénigrement, calomnies, diffamations… ». Ou encore, «plus que jamais, à l’heure actuelle faire preuve de discernement, face aux situations et aux événements que nous vivons est, pour nous tous, une exigence de dignité et de vérité’ ».
Chers prélats maliens, ô combien votre harangue: «Et si nous réhabilitions la politique?» reste ardemment d’actualité! Il faut aller au fond de nous-mêmes pour trouver les clés de la renaissance. Il nous faut mener une introspection rigoureuse de nos propres personnes. Chacun doit regarder en soi-même, au plus profond de son âme afin de déterminer les raisons profondes qui nous ont conduits à la situation actuelle. Il n’y a pas de salut en dehors de la Vérité. Il n’y aura pas de rédemption tant que nous resterons accrochés aux comportements qui jurent avec les Commandements Divins et la trame profonde de l’histoire de notre pays.
Il s’agit de s’élever au dessus de soi-même, de devenir un Peuple adulte conscient des immenses défis auquel il est confronté et déterminé à les relever afin que le Mali s’affranchisse définitivement de la gangue de la misère, de l’obscurantisme et de la médiocrité. La maïeutique collective à laquelle nous invitons notre Peuple est la condition sine qua non pour que le Mali soit en paix avec lui-même et avec le reste du Monde. Allah kan’antô faden sagoyala ! Allah kan’antô faden sagoyala !  Allah kan’antô faden sagoyala !
J’invite les Autorités du pays à organiser, sans tarder, un grand Débat national permettant des discussions approfondies entre toutes les composantes de la nation malienne. Ces discussions devront permettre de remettre le pays en marche en mettant fin à la confusion et la torpeur politiques qui paralysent présentement l’énergie’ du Peuple malien. L’Histoire a changé de rythme. Elle annonce, elle impose de grands changements. Nous serons les Acteurs de ces Changements.
Il faut absolument sortir de la gangue de la mal-gouvernance structurelle dont notre pays a été victime au cours des années écoulées. Cette Mal-gouvernance qui s’est traduite par une démocratie factice synonyme de Misère, de Pauvreté, d’Abandon de l’Ecole, de dilution de nos Valeurs, de propagation de la Corruption, de blanchiment d’argent, trafic de drogue… le tout  couronné par la perte de souveraineté  sur le Nord de notre pays .. Soyons Audacieux dans la Pensée et Courageux dans l’Action.
Il nous faut reconstruire le Mali, bâtir un Mali nouveau, réconcilié avec lui-même, avec son histoire, ses valeurs traditionnelles positives. Un Mali respectueux du passé mais résolument tourné vers l’Avenir et déterminé à écrire une nouvelle page de l’histoire de l’Afrique.
Mesdames et Messieurs,
Nous voulons que le Mali redevienne un pays libre, maître de sa destinée et porteur d’espérances pour les peuples d’Afrique et du Monde. Membre fondateur de la CEDEAO et de tous les grands regroupements d’unité et d’intégration, le Mali coopérera avec ses voisins, dans le cadre du respect de sa souveraineté, pour forger une solution à la crise actuelle. La reconquête du Nord de notre pays sera avant tout l’œuvre de nos soldats. Le Mali accueillera, sans complexes, sans faiblesses, l’aide de ses voisins et de la communauté internationale pour faire face aux dimensions régionales de la crise actuelle. Le Mali n’a pas de complexes vis-à-vis de l’aide internationale.
Bien avant son accession à la souveraineté internationale, notre pays, dans un formidable élan de solidarité fraternelle, s’est porté au secours des peuples en lutte pour leur indépendance. Les combattants du FLN algérien étaient présents dans le nord du pays. Le président Bouteflika aime s’en souvenir. Avant leur internement dans le bagne de Robben-Island, le Mali a accueilli Nelson Mandela et Oliver  Tambo et apporté son soutien matériel, politique, diplomatique et moral à la lutte de l’ANC.
Le Mali a envoyé des instructeurs militaires en Tanzanie pour former les combattants de la liberté: ceux de la SWAPO, du FRELIMO, de la ZANU … Le Mali est résolument ancré dans la Terre Africaine. Il participera à tous les combats visant le progrès de l’Afrique et des Africains.  Le Mali n’a aucun complexe vis-à-vis de la solidarité régionale. Comme tous les Etats membres de notre organisation commune, la CEDEAO, le Mali souhaite, tout simplement, que l’on respecte sa souveraineté à décider ce qui est bon pour l’intérêt de son peuple. Nous respectons la souveraineté de chacun des pays frères. Nous demandons la réciproque.
Mesdames et Messieurs,
Nous Voulons que les Femmes et les Hommes du Mali redeviennent fiers d’appartenir à une Nation qui a écrit les plus belles pages de l’histoire de l’Afrique à travers les Empires du Ghana, Mali, Songhaï… Gao, Tombouctou portent encore les empreintes indélébiles de la quintessence des civilisations négro-africaines et arabo-berbères, civilisations qui ont rayonné au-delà des frontières du Continent.
Oui, nous devons reconquérir notre passé pour féconder le Présent et bâtir l ‘ Avenir du Mali. Pour être digne de l’héritage de nos ancêtres, il faut être capable de le reconquérir à nouveau. La Terre nourricière du Mali contient toutes les semences de la Renaissance de notre Nation. Chaque Malien porte en lui le souffle de la Grandeur que le Seigneur de Tout l’Univers a insuffle en chaque être humain.
Les Maliennes et les Maliens peuvent relever les défis gigantesques qui assaillent notre présent. Il nous suffit tout simplement de nous donner la main, d’inscrire notre Action dans une Ambition collective forte pour transformer le Mali et le placer dans le peloton de tête des Nations modernes. Nous allons reconquérir Tombouctou, Gao, Kidal et ressouder le tissu de la Fraternité, de la Réconciliation et de l’Unité de la Nation Malienne. Nous rétablirons l’Intégrité Territoriale du Mali pour que tous les fils de la Nation, toutes les composantes des communautés du Nord, puissent jouir de la Paix et de la Prospérité.
Nous restaurerons la Vérité et la Justice afin qu’Unis dans un vaste élan de Solidarité, les communautés du Nord du Mali puissent œuvrer dans l’harmonie à l’avènement d’une société fraternelle tournée vers le triomphe du Bien Commun. Soyons au «rendez-vous de l’histoire, dans la Dignité retrouvée». Renforçons «nos rangs » pour le Salut Public. Forgeons ensemble un Mali nouveau, réconcilié avec lui- même et en Paix avec ses voisins et le Monde.
C’est en raison de tout ce qui précède que ma conviction est forte que ce qui unit est infiniment plus important et plus conforme aux exigences du temps que nos égos surdimensionnés. Aucun de nous ne vaut plus que le Mali. Alors, qu’attendons-nous pour nous mettre ensemble au chevet du seul qui compte: notre cher, très cher Mali.
Nul ne fera le Mali sans nous! Nul n’aime le Mali plus que nous! Nul ne connait notre pays mieux que nous! L’histoire nous jugera sans complaisance.
Serons-nous capables de nous dépasser, de nous surpasser pour nous hisser enfin à la hauteur de cette forte interpellation historique? Nous le pouvons et le devons car nous subissons dans notre chair et dans nos âmes le martyre de nos pères et mères, de nos frères et sœurs, de nos enfants fouettés à longueur de journée pour avoir osé fumer, ou pire s’aimer. De telles monstruosités doivent-elles persister? Il nous appartient collectivement de répondre à cette forte interpellation dès aujourd’hui ici, en contribuant à baliser et à tracer les chemins d’un demain meilleur
Je vous remercie.

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