Le troisième jour de la grande rencontre a été consacré à l’agrégation des propositions et des recommandations faites lors des deux premiers jours en atelier. Chacun des quatre groupes a retenu les meilleures idées, à même d’apporter un changement qualitatif dans la gouvernance de notre pays. Ces différentes synthèses permettront de nourrir le rapport général des travaux, dont le contenu servira d’éclairer notre chemin vers le Mali auquel tous les citoyens aspirent
Durée de la Transition : Les avis varient entre six mois et cinq ans
Les travaux de l’atelier 1 des Assises nationales de la refondation (ANR) ont porté sur la synthèse des recommandations sorties des débats menés pendant les deux premiers. À propos des reformes politiques et institutionnelles, il y a une multitude de propositions
Il faut rappeler que les participants à cet atelier ont planché sur quatre thématiques : «Questions politiques et institutionnelles-gouvernance électorale», «défense et sécurité-souveraineté-lutte contre le terrorisme-questions géostratégiques et géopolitiques », « justice et droits de l’Homme-gouvernance-transition numérique-médias» et «politique étrangères-coopération internationale-Maliens établis à l’extérieur-intégration africaine ».
La matinée d’hier a été essentiellement consacrée à la validation des recommandations relatives la première thématique. Unanimement, il a été recommandé l’élaboration d’une nouvelle Constitution, mieux adaptée à l’évolution politique et sociale du pays. Par contre, les avis ont divergé sur la durée de la Transition. Les délais avancés varient entre six mois et cinq ans. Argument mis en avant par de nombreux participants: Il faut accorder le temps nécessaire aux autorités pour réaliser les réformes institutionnelles structurantes permettant des élections crédibles, équitables et transparentes.
Sur la question de la gouvernance électorale, la principale recommandation faite est la mise en place d’un Organe unique indépendant de gestion des élections. Ledit organe doit avoir un statut constitutionnel et être investi de tous les pouvoirs en matière électorale. Les participants ont retenu le mode de scrutin proportionnel et l’échelon région comme la circonscription électorale pour l’élection des députés. En outre, il a été recommandé la confection de la carte biométrique pour toutes les élections. Les participants ont insisté sur la réduction du nombre de partis politiques en durcissant les critères de création de parti politique et de leur financement.
La réduction du financement public et l’élaboration de critères rigoureux de son attribution ont été particulièrement recommandées. Ils ont souhaité la relecture de la charte des partis politiques. Quant au statut de l’opposition, nombre de participants se sont prononcé en faveur de son maintien. Cependant, ont-ils précisé, le «chef de file ne doit pas être érigé au rang d’institution de la République».
Enfin, les participants ont recommandé la fin de la «transhumance», c’est-à-dire la désaffiliation politique des élus en cours de mandat.
La suppression de la Haute Cour de la justice et du Conseil économique, social et culturel figure parmi les recommandations faites concernant les institutions constitutionnelles. Les participants ont également recommandé le bicaméralisme par la mise en place d’un Sénat, et le transfert des attributions en matière électorale de certaines compétences de la Cour constitutionnelle à l’Organe unique de gestion des élections.
S’y ajoute la mise en place d’une Cour des comptes conformément aux engagements communautaires du Mali. Sur le choix du régime politique, les avis sont partagés entre le régime présidentiel et le régime semi-présidentiel. Toutefois, les délégués sont d’accord sur la réduction des pouvoirs du président de la République.
Nombre d’entre eux ont demandé l’élaboration d’un mécanisme constitutionnel de destitution du président de la République en cas de crise grave et/ou de non respect de son serment. Ils ont aussi souhaité la relecture du mode de désignation des membres de la Cour constitutionnelle.
Issa DEMBÉLÉ
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Questions sociales : L’environnement et l’emploi préoccupent
Les discussions d’hier de l’atelier 3 ont été aussi consacrées à la présentation des synthèses des propositions et recommandations formulées sur les trois thématiques débattues les jours d’avant : «Dialogue social : Enjeux, défis et perspectives-réformes sociales- fonction publique- formation- emploi des jeunes- entreprenariat » ; «Santé et affaires sociales-questions humanitaires-réfugiés et déplacés internes » et «développement durable-environnement-assainissement».
À propos de la thématiques «développement durable-environnement- assainissement», les recommandations phares portent sur l’élaboration et la mise en œuvre d’un Programme de reboisement, la promotion d’un programme national d’éducation relative à l’environnement à travers l’élaboration et l’enseignement des programmes d’éducation environnementale dans tous les ordres d’enseignement.
Sensibiliser les acteurs de l’environnement sur les dangers de la transition écologique, la raréfaction des ressources, la multiplication des risques sanitaires environnementaux et la perte accélérée des biodiversités. S’y ajoute l’intensification des campagnes de reboisement en optant pour des plantations sécurisées.
S’agissant de la thématique «Enjeux, défis et perspectives-réformes sociales- fonction publique-formation- emploi des jeunes- entreprenariat », les participants ont recommandé de créer un centre de formation et de réinsertion des enfants de la rue et les talibés, insérer dans les programmes de formation des écoles coraniques la formation professionnelle et technique, de procéder à l’enrôlement biométrique de tous les fonctionnaires de l’État et des collectivités ainsi que les Forces armées et de sécurité, afin d’en connaitre exactement le nombre et lutter contre la fraude, revoir les avantages accordés aux hauts cadres, institutionnaliser la redévabilité aux responsables dans la gestion des affaires publiques.
La dématérialisation des procédures et l’instauration des boites à suggestions dans tous les services publics, la création d’un système de dénonciation en ligne, la dépolitisation des nominations à travers un appel à candidatures pour les postes de directeurs nationaux et assimilés sont autres recommandations importantes retenues dans les synthèses de l’atelier 3.
Aboubacar TRAORÉ
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Paix, réconciliation et cohésion sociale : Révision de l’accord et démobilisation des ex-combattants
Le groupe n°2 a procédé, hier, à la synthèse des travaux qui se sont déroulés sur les thématiques 6, 8 et 9 portant, respectivement sur : «développement rural, questions économiques et financières…» ; «administration du territoire-réorganisation territoriale/détermination des circonscriptions électorales…» et «paix, réconciliation et cohésion sociale».
Sur cette dernière question, les participants ont demandé d’accélérer l’effectivité du processus de Démobilisation, Désarmement et Réinsertion (DDR), en mettant l’accent sur la démobilisation des ex-combattants et non la récupération des armes. Ils ont aussi opté pour la révision de l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du processus d’Alger. Mais aussi de publier « l’additif » de ce document et d’accélérer sa mise en œuvre.
Les délégués ont, en outre, sollicité l’instauration de la semaine du dialogue, ainsi que l’élaboration des modules de formation sur nos valeurs sociétales et fondamentales qui seront enseignées dans les différentes écoles de formation. S’y ajoutent l’organisation des colonies de vacances pour favoriser le brassage entre les jeunes des différentes régions du pays, la lutte contre la corruption et l’impunité ainsi que la promotion de la justice transitionnelle comme instrument de gestion des conflits.
S’agissant de la thématique 8, les participants ont demandé la relecture des textes de la décentralisation, des textes sur les élections, notamment la charte des partis politiques, le code électoral, l’augmentation de la contribution de l’État dans le financement des collectivités territoriales et l’opérationnalisation des transferts des compétences des ressources financières et humaines de l’État aux collectivités.
Les délégués ont aussi demandé de procéder à la «dépolitisation» de l’administration publique et au maillage du territoire par la présence de la sécurité, de l’administration et des services sociaux de base. S’y ajoute la simplification de la procédure d’obtention et de délivrance des cartes Nina en nationalisant leur confection.
Concernant la thématique 6, les participants ont sollicité l’élaboration d’une véritable politique économique et financière avec une stratégie permettant de réaliser un taux de croissance moyenne du PIB supérieur à 10% durant les 30 prochaines années.
Ils ont aussi demandé d’améliorer l’efficacité et l’efficience de la dépense en renforçant la mise en œuvre et l’élaboration périodique des budgets programmes, d’auditer tous les permis miniers notamment ceux dont les bénéficiaires ne respectent pas les textes sur la protection de l’environnement.
L’augmentation de la participation de l’État aux capitales des sociétés minières et la mise en place d’un système de contrôle des fonds de souveraineté font également partie des recommandations.
Bembablin DOUMBIA
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Arts, culture, tourisme, sport, jeunesse,éducation :Des recommandations à foison
Arts, culture, tourisme, sport, jeunesse, éducation civique, construction civique, éducation, questions scolaires, universitaires et recherches scientifiques sont les thématiques soumises à l’appréciation de l’atelier 4 présidé par l’historien Pr Jean Bosco Konaré. Ainsi, les deux premiers jours de travaux ont été sanctionnés par beaucoup de recommandations.
Concernant l’art, les participants à ce groupe ont soutenu, entre autres, la création d’un village pour les artisans, le développement de l’artisanat, la création d’un fonds de développement de l’artisanat ; la valorisation du tissu artisanal ; la création des emplois dans le domaine de l’artisanat, la mise en place d’une politique pour monétiser les arts.
L’organisation des semaines sportives et culturelles au niveau local, régional et national, la création d’un fonds cinématographique ainsi que la réhabilitation des monuments et sites touristiques sont quelques recommandations faites pour la promotion de la culture dans notre pays. Parmi les recommandations sur le plan du tourisme, on peut retenir l’encouragement des métiers du tourisme, l’identification de tous les lieux touristiques, le renforcement des écoles hôtelières dans notre pays. S’agissant du sport, les participants ont plaidé pour la valorisation des entraîneurs locaux à la tête de nos équipes nationales, l’augmentation des espaces sportifs ainsi que la création des lycées pour sport et l’éthique, etc.
Concernant le volet jeunesse, plusieurs rénovations ont été proposées dont l’assurance du financement des projets de développement pour les jeunes, surtout en milieu rural et la restauration du mouvement des pionniers à tous les niveaux. Quant au domaine de l’éducation, il a fait l’objet de débats houleux à cause de la présence massive des spécialistes dans la salle. De nombreuses recommandations ont été formulées à ce niveau.
Il s’agit, entre autres, de l’organisation des États généraux pour l’éducation, l’élaboration d’un plan de formation et de carrière des enseignants, l’introduction de l’éducation civique au baccalauréat, l’uniformisation des approches éducatives ; le recrutement des arabophones ; la promotion et la valorisation de l’enseignement dans nos langues nationales avec l’introduction de l’écriture en N’ko , la recherche de solution à la problématique de l’article 39 , la moralisation des conditions d’ouverture des établissements privés.
Parlant de l’éducation civique, les délégués ont demandé l’institution du Service national des jeunes et le service militaire. Il a aussi été proposé l’instauration d’une Journée de citoyenneté et une Semaine d’éducation civique et d’éveil patriotique.
Oumar DIAKITÉ