Séance de questions orales hier à l'Assemblée nationale : Les honorables Mariko, Goro et Haïdara dénoncent la collusion du Gouvernement avec certains milieux d'affaires

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L’honorable Oumar Mariko du groupe parlementaire PARENA-SADI franchira-t-il le Rubicon en déposant, dans les jours à venir, une motion de censure contre le Gouvernement par rapport à ce qu’il appelle «une gestion catastrophique du dossier Huicoma»? Nul ne saurait en présager. Le député élu à Kolondiéba était très remonté dans sa question orale adressée au ministre Ahmadou Abdoulaye Diallo de l’Industrie, des Investissements et du Commerce sur la politique de  privatisation des entreprises maliennes et particulièrement dans le sulfureux dossier de Huicoma «bradée», selon lui, à Aliou Tomota. Les honorables Ilias Goro et  El Hadj Baba Haïdara ont  également secoué le gouvernement dans le domaine de l’entrepreneuriat. Tous ont laissé entendre  que le Gouvernement semble complaisant vis-à-vis de certaines entreprises.  

La séance plénière de l’Assemblée nationale d’hier 1er juillet 2010 avait à son menu trois questions orales, des délibérations sur plusieurs projets et propositions de loi et des communications.

     La séance présidée par le président de l’institution, le Pr Dioncounda Traoré, a commencé avec la question orale du député de l’opposition, président du Groupe parlementaire PARENA-SADI, Dr. Oumar Mariko, adressée au ministre de  l’Industrie, des Investissements et du Commerce, Ahmadou Abdoulaye Diallo.

Pour l’élu du parti SADI à Kolondiéba, le Gouvernement malien a pris l’option de privatiser toutes les sociétés nationales dont HUICOMA, la CMDT et dernièrement la SOTELMA.  «L’option de la privatisation est argumentée par une prétendue meilleure capacité de gestion des entreprises par les opérateurs privés, capables de financer, d’investir et donc de développer la production. Nous nous sommes toujours opposés aux privatisations…», a-t-il déclaré. Avant de souligner qu’il apparaît clairement que la privatisation d’une société nationale n’apporte aucune plus value au Mali.

      Et l’honorable Mariko de bondir sur ses questions au ministre Diallo : «Quelle conclusion en tirez-vous, monsieur le ministre? Et pourquoi persistez-vous? Les processus de privatisations seraient-ils des stratégies pour transférer des ressources publiques sur des comptes privés détenus par des opérateurs privés mais également des décideurs politiques?»

A ce niveau, Oumar Mariko n’est pas passé par quatre chemins pour pointer du doigt le dossier de HUICOMA en demandant quel est l’intérêt pour l’Etat malien d’avoir  bradé cette société qui n’était pas en faillite au Groupe Tomota qui ne respecte pas ses engagements contractuels. «Quel est l’intérêt pour l’Etat de laisser au Groupe Tomota une entreprise dont la production ne fait que chuter depuis la privatisation? Quel est l’intérêt pour l’Etat que des centaines de familles se retrouvent dans les conditions les plus démunies», a-t-il poursuivi.

Pour l’honorable Mariko, il y a une collusion évidente  entre le Gouvernement et plusieurs opérateurs économiques dont  le Groupe Tomota. Il ira jusqu’à dire que le ministre Ahmadou Abdoulaye Diallo s’est fait, lors des discussions concernant HUICOMA et la CMDT, le porte-parole de Tomota. «Gouvernement Tomota», a-t-il proclamé à plusieurs reprises pour enfoncer le clou sur ce qu’il a appelé le drame destravailleurs abusivement  licenciés par le repreneur de HUICOMA en 2003, avec plus de 9 millairds F CFA.

    Un repreneur qui n’était pas, selon lui, qualifié à être adjudicataire de cette fine fleur de l’agroalimentaire du Mali qu’est HUICOMA. Car, Tomota évoluait dans la papeterie et, de ce fait, devrait être disqualifié par rapport à des entreprises comme Dagris dont l’offre était d’un montant de plus de 6 milliards avec d’autres engagements financiers. Des engagements relatifs aux créances dues par Huicoma à la CMDT. L’élu de Kolondiéba n’a pas hésité à qualifier le PDES du chef de l’Etat comme étant le «Programme de Destruction de l’Economie Sociale»

      Le ministre de l’Industrie, des Investissements et du Commerce, Ahmadou Abdoulaye Diallo, a refuté les accusations de collusion  portées par le député en rappelant en détails le processus de privatisation de la société des Huileries Cotonnières du Mali (HUICOMA).

        «La procédure s’était déroulée dans les règles de l’art à travers des appels d’offres en bonne et due forme. Il y avait en 2002, un premier appel d’offres infructueux, suite à des difficultés financière de l’adjudicataire. Ensuite, après un nouvel appel d’offres, 3 offres étaient recevables avec des prétentions financières différentes. Parmi ces trois offrants, c’est au finish les conditions proposées par le Groupe Tomota de reprendre la société à plus de 9 milliards F CFA qui ont été jugées satisfaisantes. et Concernant les travailleurs, le protocole d’accord avait stipulé que dans les 18 mois après la cession, le Groupe Tomota ne devait pas procéder à des licenciements économiques. Ce qui a été respecté», a-t-il expliqué. Le ministre Diallo a reconnu la situation de détresse que vivent les travailleurs licenciés de Huicoma qui sobservent un sit-in depuis quelques mois à la Bourse du Travail.

     Il a exprimé toute la compassion du Gouvernement à leur endroit, avant de signaler qu’il ne comprend pas pourquoi ces travailleurs demeurent là, alors qu’ils ont tous été payés. Ils ont reçu leurs salaires des mois de janvier à mai, les indemnités de réinsertion et les indémnités de négocier. Concernant les salaires, le ministre dira que normalement ils n’en avaient pas droit, puisque, selon les textes sans avoir travaillé l’on ne peut prétendre à aucun salaire.

  Le secteur du BTP mal géré par le  Gouvernement?

La dernière question orale de la plénière d’hier est celle de l’honorable El Hadj Baba Haïdara, élu à Tombouctou, adressée au ministre de l’Economie et des Finances, représenté par le ministre chargé du Budget, Lassine Bouaré.Elle a porté sur le secteur des entreprises de Bâtiment et Travaux Publics (BTP). Selon ce député du Groupe parlementaire ACM, «quand le bâtiment va , tout va! Le BTP est le secteur dans lequel l’Etat s’endette et investit le plus. Le montant des investissements inscrit au budget d’Etat 2010 pour les travaux est 446 957 000 000 F CFA, soit 40,71% du budget total dont la moitié provient du budget national. Cette importante somme obtenue par les impôts des Maliens et des prêts remboursables est à 90 % attribuée aux entreprises étrangères, faute de décision ou de courage politique».

 Il a cité des exemples de pays voisins où les entreprises privées sont soutenues par l’Etat avant de dégainer : «Le protectionnisme pratiqué par d’autres Etats chez eux pourtant signataires de conventions, et les subventions apportées à leurs entreprises privées relève-il d’un combat déloyal ou du courage et d’une volonté de promouvoir leur industrie? pouvez-vous Monsieur le ministre me dire les dispositions que le Mali compte mettre en place pour la promotion et la création de grandes entreprises? Pourquoi continuer à pénaliser les entreprises avec l’application de la caution de soumission? Frais qui ne profite qu’aux banques».

Parlant de l’attestation de crédit, l’honorable Haïdara dit Sandy a indiqué que, dès l’instant où le soumissionnaire donne la preuve que son banquier l’accompagne pour les cautions de bonne exécution, d’avance de démarrage et de retenue de garantie, les conditions financières prévues par la loi sont remplies. «Pourquoi alors cette attestation de crédit? Est-ce pour couvrir les retards insoutenables dans les paiements des décomptes par l’Etat ou pour disqualifier les entreprises nationales…». Bref, pour le député élu à Tombouctou, le Gouvernement favorise des entreprises étrangères au détriment des entreprises nationales. Pis, l’Etat ne fait rien pour encourager les entreprises surtout celles du BTP.

Le ministre Lassine Bouaré a battu en brèche ces accusations en déclarant que l’exécutif fait tout ce qui est en son possible pour les soutenir. Car, l’Etat est conscient que ces entreprises créent plus d’emplois. «La concurrence dans le monde des affaires est un facteur qui favorise les performances des entreprises. Cette concurrence n’est pas déloyale. Au contraire…», a souligné le ministre Bouaré. 

Orange -Mali se soucie-t-il du développement du pays?

La deuxième question orale, est celle de l’honorable Ilias Goro, élu indépendant à Douentza. Il était face à la ministre de la Communication et des nouvelles technologies, Mme Diarra Mariam Flantié Diallo à propos de ses insatisfactions dans les activités de la société Orange au Mali. «Orange se soucie-t-il du développement harmonieux de notre pays ou de son seul profit? A ce jour, quel est le nombre exact d’abonnés d’Orange-Mali? Quel est le montant total d’argent que cette société gagne par jour? ne craignez-vous pas que, dans un bref délai tout l’argent du Mali ira dans les caisses de cette société? Quelle est la durée de la licence accordée à Orange par l’Etat malien? Pourquoi la commune rurale de Mondoro n’est-elle pas encore couverte par Orange?». Ce sont là quelques unes des préoccupations exposées à la ministre.

Mme Diarra Mariam Flantié Diallo a rassuré les élus de la nation sur la bonne santé du secteur de la téléphonie au Mali. Orange Mali emploie directement, a-t-elle précisé, 387 agents maliens et a créé 30 000 emplois indirects. Le chffre d’affaires de la société est  de 168 millairds F CFA.

Depuis son installation au Mali, Ikatel devenu Orange a fait progressé la télédensité à 40 % aujourd’hui, avec en ce jour 5 millions d’abonnés sur toute l’étendue du territoire national. Elle a invité les populations de Mondoro (Cercle de Douentza) à la patience pour, dans un bref délai, bénéficicier du programme d’extension de la couverture par le réseau de téléphonie d’Orange.

                                           Bruno D SEGBEDJI

 

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