Roue libre – Bagadadji : dans l’antre de l’impunité

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Selon le candidat RPM aux législatives en commune II, Aboubacar Niaré dit Binké, il y a aujourd’hui trois catégories d’hommes politiques qui veulent accéder à l’Assemblée nationale. Il y a d’abord ceux qui veulent venir pour se couvrir parce que demain s’ils ne sont pas à Bagadadji, le lendemain ils iront en taule. Il y a ensuite ceux qui ne font pas la politique mais qui crèvent de faim et qui ne laisseront échapper pour rien au monde une telle occasion de faire fortune. Il y a enfin ceux qui ont quelque moyen, qui refusent qu’on parle à leur place et qui sont plus ou moins animés du désir sincère de se rendre utiles à leurs concitoyens.rn

En ce qui concerne la première catégorie, Dioncounda Traoré, le président de l’ADEMA a déjà donné le ton : «si nous ne soutenons pas ATT, nous aurons la gendarmerie nationale, la police, la sécurité d’Etat, la justice et l’administration à nos trousses». Même si un tel mea culpa a choqué les consciences, Dioncounda sait ce qu’il dit. Après dix ans de gestion du pouvoir et pour éviter de rendre compte et de rendre gorge, les responsables de l’ADEMA doivent se mettre à l’abri de la chasse aux sorcières.

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Il en est ainsi de la ruée sur l’hémicycle pour les opérateurs économiques véreux, les escrocs internationaux, les responsables politiques et administratifs corrompus, bref pour tous ceux qui traînent une casserole et des dossiers sales. Aussi Bagadadji est-il devenu le refuge des sangsues du peuple, un repaire de brigands. L’immunité conférant l’impunité, les députés se rendent complices des exactions de leurs collègues.

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C’est aussi un eldorado pour ceux qui cherchent à faire fortune. Ici l’or brille pour tout le monde, désormais c’est la ruée vers l’ouest lointain. Cette année pas moins de mille candidats postulent pour 147 places. Avec tous ces avantages mirobolants que confère la fonction de député, avouons que le jeu en vaut la chandelle. Avec 500 000 francs de représentation parlementaire et 10 millions de francs de frais d’installation, il y a de quoi se mettre définitivement à l’abri du besoin. Mais le problème est de savoir si ce n’est pas une rapine voire une «escroquerie légale» organisée dans le dos du pauvre contribuable malien qui assiste impuissant à l’accumulation insensée de ses propres richesses par des prébendiers qui n’ont guère souci de son sort.

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La cupidité légendaire des élus de la nation transforme l’Assemblée en un conclave de Harpagon et de Mor Lam qui à force de s’en mettre plein les poches finissent par avoir leur ventre derrière eux. Un ventre qui finira bien un jour par les mettre dans un trou car l’histoire retiendra que dans un pays de misère généralisée, seuls quelques vautours rodaient autour de la charogne. Pauvre Aboubacar Traoré qui ne peut adoucir cet appétit pantagruélique et qui défend tant bien que mal ses maigres sous. Nul, à commencer par la Cour constitutionnelle, ne semble pouvoir arrêter la dérive.

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Une forte odeur d’argent, le luxe et le lucre ont suscité bien des vocations. Tout le monde accoure désormais vers la nouvelle terre promise. A commencer par les chefs des partis politiques qui craignent le spectre du chômage. S’ils peuvent contribuer à relever le niveau du débat à cause de leur formation politique, l’arrivée de néophytes risque de transformer Bagadadji en dépotoirs pour médiocrités. Or l’honorabilité, ça se paye au prix fort en ce sens qu’à défaut d’avoir une tête bien pleine, il faut au moins avoir une tête bien faite. Déjà, certains candidats dans leur hâte à s’installer confortablement dans leur nouveau statut de privilégiés nous abreuvent de discours cousus de fil blanc. Ils nous promettent  le paradis mais une fois installés, ils ignorent superbement leur base. A les entendre parler, on dirait qu’ils se lancent à la conquête de la mairie de leur commune.

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Quand on veut être député, il faut éviter de prendre des vessies pour des lanternes. Bagadadji ne peut être un fourre-tout.

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Mamadou Lamine DOUMBIA

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