Mise en accusation de l’ancien président ATT : Un dossier est classé sans suite.

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Après moult reports aussi intrigants qu’injustifiés, les deux dossiers sulfureux de la 5 ème législature ont été tour à tour vidés en plénière publique à l’Assemblée nationale. Il s’agit de la procédure de haute trahison engagée contre ATT et de la dramatique aventure de 2014 à Kidal. Chacune de ces deux affaires a été l’objet d’une commission parlementaire ad hoc : l’une pour examiner la demande de poursuite de l’ancien président, l’autre pour édifier la représentation nationale sur la responsabilité des acteurs dont le rôle a été déterminant dans la tentative ratée de reconquérir le sanctuaire de la rébellion touareg. Les deux cas ont été sanctionnés chacune de conclusions sur lesquelles les élus du Peuple  ont planché, la semaine dernière, aux ultimes de la session budgétaire. Le feuilleton a été ouvert avec la question ATT, un dossier auquel la commission ad hoc correspondante a consacré plusieurs dizaines de pages dont lecture a été faite en plénière quelques heures auparavant. Du contenu du document, il ne ressort rien de plus que les conclusions ayant fuité par le passé, à savoir que l’ancien président de la République est hors de cause dans le torrent de chefs d’inculpation qu’ont fait pleuvoir sur sa tête l’exécutif et le pouvoir judiciaire représenté pour la Cour suprême.

Aucun indice tangible ne permet de déboucher sur une responsabilité pénale de l’ancien chef de l’Etat quant aux multiples fautes énumérées dans l’acte d’accusation : violation de serment, complicité dans la pénétration et l’installation de forces étrangères au Mali, subtilisation de documents et d’informations secrètes susceptibles de les circonscrire, nomination d’officiers moins méritants au détriment de plus compétents, etc.

Il va sans dire que le projet de résolution présenté aux députés abonde également dans le sens que le rapport, contraignant du coup l’hémicycle à délibérer sur une disculpation au lieu de la mise en accusation demandée par l’exécutif. Elle n’a certes pas fait l’unanimité, mais en recueillant plus d’une centaine de suffrages favorables, la résolution sur le cas ATT a pris les allures d’un cinglant désaveu pour le pouvoir exécutif pourtant fort de sa majorité écrasante à l’hémicycle.

Il faut dire que l’Exécutif, sous l’égide du président IBK, aurait pu s’épargner une déconvenue aussi gênante si la procédure, déclenchée sur un coup de tête soit par légèreté nuisible, avait reposé sur une procédure un  tant soit  respectueux du cheminement en adéquation avec l’esprit des textes en vigueur sur la ”haute trahison” au Mali. Au fait, en examinant attentivement la loi y afférente, il est loisible de comprendre que le déclenchement de la mise en accusation est une prérogative immanente au pouvoir  législatif et ne saurait de ce fait émaner de la Cour suprême ni du gouvernement dont les incriminations publiques ont été entonnées à la manière d’un perroquet par la plus haute juridiction de la République.

Mais en désavouant l’exécutif – par une fin de non-recevoir à sa demande de mise en accusation – les députés n’en couvrent pas moins les graves lacunes d’une démarche apparemment engagée aux fins de recourir à un bouc-émissaire pour cacher l’incapacité des pouvoirs à faire face à la crise malienne.  Considérée sous cet angle, la tournure prise par le dossier ne résulte ni d’une mansuétude gracieusement accordée à ATT, ni d’une volonté de réconciliation nationale mise en avant par certains soutiens du président en exercice, l’initiateur principal de la procédure.

Le second dossier soumis à l’examen des députés n’est pas fondamentalement dissociable du premier, d’autant qu’il concerne un drame tout aussi passible de responsabilités pénales, à en juger par les proportions de pertes en vies humaines et l’enlisement de la crise septentrionale depuis l’aventure périlleuse de Moussa Mara à Kidal. C’est sur instigation de Soumeylou Boubèye Maïga, le ministre de la Défense emporté par les vagues dudit événement, qu’une commission ad hoc de clarification a été mise sur pied par les parlementaires. Sous la houlette du député Niamé Keïta, l’équipe a également présenté ses conclusions à travers un document d’une soixantaine de pages essentiellement constitués d’auditions de divers acteurs ayant joué une partition dans l’expédition militaire ratée. Hormis le Directeur général de la Sécurité d’Etat qui a rechigné à se présenter, tous les maillons de la chaine ont effectué des dépositions auprès de la commission parlementaire. Faute d’en cerner l’ensemble des contours, la commission ad hoc sur le dossier de Kidal en a finalement conclu une affaire beaucoup plus complexe où la disculpation de l’ancien ministre de la Défense Soumeylou B. Maïga n’accable pas forcément Moussa Mara. On n’imagine qu’un tel paradoxe tient au fait qu’un chef du Gouvernement n’est qu’un maillon très peu signifiant dans la chaine de décision, quoiqu’il ait tenté d’en tirer une gloriole et se soit complu dans le rôle de marionnette du chef suprême des Armées.

Au motif que la complexité de l’affaire requiert de la retenue, il en a résulté, en définitive, une large disproportion entre la résolution et les graves révélations contenues dans le rapport présenté aux députés sous forme de procès-verbal. Après moult réserves émises par certains parlementaires et à coups d’amendements, la plénière a décidé d’abonder dans le même sens que la commission ad hoc : retourner la patate chaude à l’Exécutif. En clair, en se contentant d’inviter les autorités compétentes à déclencher une enquête judiciaire pour situer les responsabilités dans la sulfureuse aventure de Kidal,  les députés refusent clairement de lui coller le seul visage de Moussa Mara.

 

 

Mise en accusation de l’ancien président ATT :

Un dossier est classé sans suite.

 

En 2014, le gouvernement malien a annoncé son intention de poursuivre l’ancien président  pour haute trahison dans le cadre de sa responsabilité dans la crise malienne et la situation au nord du pays. Après plusieurs renvois, l’Assemblée nationale a finalement statué sur le dossier. C’était lors d’une séance plénière, le Vendredi 16 Décembre dans la salle Aoua Keita sous la présidence d’Issaka Sidibé.

La commission ad-hoc chargé de la mise en accusation a, dans sa résolution, s’est prononcée dans le sens d’une fin de non-recevoir à la demande introduite par le gouvernement par le biais de la Cour suprême. Principal motif évoqué : une absence criarde de preuves matérielles à laquelle les députés ont massivement adhéré par un vote à la majorité absolue.

Faut-il le rappeler que c’est de la constitution malienne que découle les compétences de la haute cour de justice pour juger les présidents, les ministres mise en accusation par l’assemblée nationale dans l’exercice de leur fonction. Quant au contenu de haute trahison il reste flou dans l’arsenal législatif malien tout comme tout comme la procédure qui lui est applicable. C’est ainsi qu’il est revenu au Procureur général près la Cour suprême de saisir le président l’Assemblée nationale par une correspondance qui énonce les faits susceptibles d’être retenus contre Amadou Toumani Touré. La procédure contre ATT est ainsi partie comme sur un chapeau de roue avant de perdre en allure au fil du temps.

On retient de la lecture des chefs d’inculpation par le rapporteur de la commission Bréhima Beridogo qu’il est reproché ATT une violation de son serment de président de la République et de chef suprême des Armées, une participation à une entreprise de déstabilisation du territoire national en n’opposant aucune résistance à la pénétration et l’installation de forces étrangères, etc. Ce n’est pas tout, il est également pris pour responsable de la destruction et de la détérioration volontaire de l’outil de défense nationale ainsi qu’une démoralisation de l’armée par les nominations de complaisance d’officiers et de soldats incompétents et au patriotisme douteux à des postes de responsabilité au détriment des plus méritants. Toutes choses ayant entrainé  une frustration qui nuit à la défense nationale et malgré une grogne des troupes constamment  rapportée et décriée par la presse. A ce chapelet d’accusations s’étend également des présomptions de participation de l’ancien chef de l’Etat à la destruction, soustraction et enlèvement d’objets, de matériels et de renseignements qui lui étaient confiés et dont la connaissance pourrait conduire à la découverte d’un secret de la défense nationale, entre autres.  Autant d’infractions prévues et punies par le code pénal malien, souligne l’acte d’accusation.

Mais, l’analyse de ces infractions est juridiquement délicate et politiquement complexes, a soutenu la commission ad hoc face aux députés, expliquant que lesdites infractions n’ont pas d’assises juridiques solides et que les preuves sont difficiles à établir. Aucun texte malien n’est explicite sur le crime de haute trahison. Lequel reste une infraction politique, martèle le projet de résolution présenté aux parlementaires, tandis que le droit pénal requiert la production de preuves matérielles pour assoir la culpabilité d’une personne.

La commission ad hoc, au bout d’un examen approfondi du dossier et des auditions de nombreuses personnes ressources, n’a pu réunir en définitive suffisamment d’éléments constitutifs des infractions assimilées au crime de haute trahison par l’accusation. Elle a choisi par conséquent de ne pas donner une suite favorable à la demande du gouvernement et de la Cour suprême.

Au finish, pour une des rares fois, opposition et majorité ont navigué dans le même bateau. Pour les honorable Mamadou Diarrasouba et Mamadou Lamine Wagué, le Mali a besoin aujourd’hui de pardonner pour avancer. L’honorable Amadou Cissé, qui a servi ATT en tant que ministre de l’énergie et des mines, dira que « l’homme qui est ATT aime trop le Mali pour le trahir. Seule voix discordante affichée, le député Kalilou Ouattara pour qui «il ne revient pas aux députés de chercher des preuves, mais de mettre ATT entre les mains de la justice », qui a tout loisir de le juger ou de l’acquitter.  En absence de preuves matérielles le dossier est classé sans suite par 104 voix, 5 votes défavorables et 6 abstentions.

Face aux journalistes, le 1e vice-président de l’hémicycle, Moussa Timbiné, a soutenu que le choix de classer sans suite la mise en accusation du président ATT devrait consolider le processus de paix et de réconciliation en cours et cela en dehors de toute pression des autorités. Quant à Hamane Touré dit Serpent, président de l’association citoyen de soutien à Amadou Touré, il se dit ému et fier de tous les amis d’ATT. Il en a profité pour féliciter l’Assemblée et le président IBK, en soulignant au passage qu’ATT signera son retour au Mali dès que les conditions seront réunies, pour qu’ensemble on se batte pour la paix et la réconciliation dans le pays.

 

Haute trahison : Fini le débat sur ATT !

Durant plus de 3 ans l’opinion croyait un moment qu’une comparution de l’ancien Chef d’Etat devant la HCJ était inévitable. L’évolution des événements à pourtant démontré qu’il était plutôt indiqué de savoir garder raison garder face à la sensibilité du sujet. Pour preuve, l’ancien chef de l’Etat vient d’être blanchi par la commission parlementaire ad hoc, faute de preuves tangibles. L’annonce est tombée la nuit du vendredi, depuis l’hémicycle où les partisans d’ATT ont afflué pour la circonstance.

Le Parlement a été saisi du dossier de Haute Trahison contre l’ex locataire de Koulouba depuis fin 2014. L’affaire a aussitôt suscité de l’intérêt au plus haut plan de la mais elle a dû subir longtemps durant les vicissitudes du temps et des reports successifs lors des différentes sessions parlementaires. Au demeurant, la fuite intervenue début 2015 avait bien montré qu’il n’y avait aucun péril en la demeure. L’ex homme fort du Mali, en exil voulu au Sénégal, venait d’être blanchi une première fois, faute de preuves suffisantes. Depuis, la commission ad hoc est restée silencieuse même si le détenteur du perchoir, Issaka Sidibé, a haussé le ton pour le manquement. Finalement cette nuit du 16 Décembre 2016 verra la fin du feuilleton politique avec l’issue sans appel du vote des députés.

On dénombre en effet 104 voix pour et 5 suffrages contre l’abandon de poursuites judiciaires contre l’ancien Président, tandis que 6 abstentions ont été recueillis pour 2 bulletins nuls.

Le débat est du coup définitivement clos sur la responsabilité judiciaire du tombeur de Moussa Traoré dans la crise ayant affecté le Mali. Et pour cause , pas mal de parlementaires reconduits en 2013 n’étaient pas en mesure de résister à l’épée de Damoclès de la HCJ. Même l’actuel successeur du désormais ancien accusé (exilé à Dakar ) ne pouvait y échapper.

Bien qu’apparemment blanc comme neige, il a quand même été la seconde personnalité du pays , quand le Général Amadou Toumani Touré était à la tête du Mali. C’est peut-être la raison pour laquelle ATT s’est toujours dit prêt à répondre face à la justice de son pays.

Aussi, n’oublions pas que le père de la démocratie avait voulu s’exprimer avant de quitter le Mali dans la foulée du ridicule putsch de 2012. Il en avait été empêché par la junte de Kati, qui eux sont bien devant les juges après le périple Sikassois qui a finalement été reporté après tant de suspensions.

Finalement, c’est bien ATT qui est « libre » et blanchi alors que son tombeur de Sanogo a des charges avérées et aura du mal à se tirer d’affaire. Reste à savoir ce qu’il en sera du retour d’ATT car la CEDEAO fut à l’origine de son exil dakarois et devrait songer à que statuer rapidement sur la question.  En attendant ce sont les acteurs du Mouvement Citoyen et la famille du PDES qui peuvent laisser éclater leur joie au bout de tant de rebondissements.

Idrissa KEÏTA

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