Le Président de la République peut-il dissoudre l’Assemblée nationale ? Un faux débat politico-juridique

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Me Kassoum Tapo
Me Kassoum Tapo

Le nouveau Président de la République n’est pas encore investi que certains se demandent déjà ce qu’il attend pour dissoudre cette Assemblée nationale “illégitime”. Mais en a-t-il seulement le pouvoir sur le plan purement juridique ?

L’article 42 de la Constitution du 25 Février 1992 (qui régit encore pour l’essentiel nos Institutions depuis le retour à l’ordre constitutionnel normal) dispose textuellement : “Le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et du président de l’Assemblée nationale, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale”.  Ce droit de dissolution appartient théoriquement au nouveau Président de la République qui est indiscutablement, au regard même des conditions de son élection à une majorité plus que confortable, la plus légitime des Institutions actuelles de la République. Mais ce droit est-il applicable dans le contexte encore transitionnel que nous connaissons? Il est permis d’en douter.

En effet, si la légitimité de l’Assemblée Nationale de transition peut être contestée en ce sens que le mandat qu’elle détenait du peuple est épuisé depuis très exactement un an maintenant (Août 2012), sa légalité en revanche ne saurait être discutée puisque son mandat a été prolongé régulièrement par une loi. Vouloir remettre en cause aujourd’hui la légalité de la prorogation du mandat de l ‘Assemblée Nationale pourrait s’avérer être un jeu dangereux qui remettrait en cause bien des acquis législatifs de la transition en commençant par la loi électorale modifiée qui nous aura permis d’organiser les présentes élections présidentielles. Ou encore, que dire de la légalité de la feuille de route du Gouvernement de transition dont l’adoption par l’Assemblée Nationale, unanimement saluée par les Maliens et la communauté internationale tout entière, nous aura permis d’entrevoir le bout du tunnel. Alors, si la légalité de la prorogation du mandat de l’Assemblée Nationale n’est pas discutable, le Président de la République ne peut donc la dissoudre puisque la loi dispose que le mandat des députés de la législature 2007-2012 est prorogé jusqu’à l’élection de nouveaux députés. Le texte initialement soumis à l’Assemblée prévoyait une prorogation jusqu’à la fin de la transition, il a été amendé, ce qui paraît aujourd’hui a posteriori fort opportun puisqu’il tranche définitivement le débat qui aurait pu s’installer de savoir si cette élection présidentielle ne mettait pas fin à la transition. La réponse à cette question, quelle qu’elle soit, n’a donc aucune incidence sur la validité du mandat des députés jusqu’aux prochaines élections législatives. Par ailleurs, sur le plan juridique, la dissolution  de l’Assemblée Nationale ne présente aucun intérêt puisqu’elle conduit à l’organisation des élections législatives impérativement dans un délai minimum de 21 jours ou de 40 jours maximum à compter de la dissolution. Alors, n’est-ce pas plus simple de convoquer le collège électoral  dans ces délais si l’objectif recherché est la mise en place d’une nouvelle Assemblée? Ceci aurait en plus l’avantage pour le Président de la République d’éviter tous les inconvénients politiques d’une dissolution.

Des élections législatives immédiates
La vraie question qui se pose est donc  l’opportunité d’organiser immédiatement des élections législatives. La tentation peut être grande d’aller dans ce sens notamment pour ceux qui croient à l’effet d’entraînement de l’élection présidentielle. C’est bien possible, mais je ne pense pas que cela soit politiquement une bonne chose dans le contexte malien de sortie de crise. En outre, il n’est pas évident que les Maliens qui ont voté en majorité pour IBK intuitu personae parce qu’ils croient qu’il est l’Homme de la situation ne reviennent à leur parti d’origine lors des élections législatives ou communales.

En effet, il ne faut pas perdre de vue que le Président IBK arrive au pouvoir plébiscité comme l’Homme du 18juin, comme le Gal DE GAULLE,  c’est le grand homme  d’Etat  perçu par le peuple comme le sauveur de la Nation qui est porté au pouvoir par le peuple et non par tel ou tel parti politique. Aujourd’hui Président de tous les Maliens , espoir de tout un peuple qui se remet debout, le Président IBK élu avec près de 80% des suffrages des Maliens, ne doit pas être à la recherche d’une majorité “politique” qui risque fort de se révéler n’être qu’un conglomérat  d’opportunistes qui, hier encore, lui déniaient simplement ses qualités de républicain et de démocrate. Comme le Gal DE GAULLE, il doit se mettre au dessus des partis politiques. Il doit rassembler et réconcilier les Maliens, thème fondamental du programme qu’il a proposé aux Maliens et sur la base duquel il a été plébiscité. On pouvait craindre le pire à l’issue de l’élection présidentielle, mais grâce à la maturité du peuple et le sens élevé du devoir et de la responsabilité des acteurs politiques majeurs, DIEU nous a préservés d’une crise postélectorale. Faut-il donc prendre le risque de nous en créer inutilement? Je pense sincèrement  que non. Je pense sincèrement qu’il faut prendre le temps de corriger les insuffisances du processus électoral qui ne seront plus tolérables pour les élections législatives et communales à venir. Il faut donner l’opportunité aux milliers de Maliens notamment aux jeunes qui n’ont pas pu s’exprimer lors de cette élection présidentielle d’exercer leur droit de citoyen. Dans un peu plus d’un semestre seulement, les mandats de nos conseillers municipaux arriveront à terme.

N’est-il pas économiquement et politiquement plus judicieux de coupler les élections communales avec les législatives ? Je suis d’autant à l’aise en prenant cette position que j’avais déjà fait la proposition lors du débat sur la feuille de route. Ce semestre suffisant pour corriger toutes les insuffisances du processus électoral, si on s’y attelle tout de suite, pourrait être aussi le temps du débat politique. Enfin un vrai débat politique pour sortir de l’unanimisme et de l’opportunisme qui sont les vraies plaies de notre démocratie. Tous les partis politiques auront à se déterminer clairement: qui opte pour l’opposition, qui accompagne le Président de la République? Et le peuple souverain se déterminera en toute connaissance de cause. Alors seulement on pourra véritablement parler de majorité et d’opposition réellement démocratiques. On aura dans tous les cas évité les risques liés à une improvisation politique( j’ai à l ‘esprit la dissolution de commodité improvisée par le Président Chirac et qui a conduit à la cohabitation avec Jospin), ou encore un conflit politique inutile entre le nouveau Président et les partis politiques représentés à l Assemblée Nationale actuelle qui, compte tenu de son caractère transitionnel et de son manque de légitimité par rapport au nouveau Président, n’ a en principe d’ autre  choix que d’accompagner celui-ci et le nouveau Gouvernement  de mission  qu’il sera amené à mettre en place pour le prochain semestre.

Le budget d’Etat 2014 sera voté en Octobre prochain lors de la session budgétaire, ce qui sera un signal fort de  stabilité et une garantie de la continuité de l’Etat aux yeux de nos partenaires. La loi électorale sera relue pour corriger les insuffisances du processus électoral révélées lors de l’élection présidentielle. Les conventions internationales nécessaires pour l’accompagnement de nos partenaires seront ratifiées…Cette Assemblée nationale qui a efficacement et honorablement accompagné la transition saura, à n’en pas douter, se montrer à hauteur de mission.

Que Dieu inspire le nouveau Président et bénisse notre beau Pays.
Atlanta  USA , le 19Août 2013

Bâtonnier Kassoum TAPO      

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7 COMMENTAIRES

  1. Que ce vilain Tapo ferme sa gueule, l’Assemblée Nationale doit être dissoute à quelques heures de la prestation de serment d’IBK, cette AN ne represente plus les maliens et n’a pas sa raison d’être. Que Tapo revise ses leçons avant de venir nous raconter des histoires. Le vent a changé de direction et les opportunistes n’ont plus de place. Le président IBK a toute la latitude de dissoudre l’AN et cela est sans conséquence. On ne plus les protégés d’ATT à Bagadadji. Le peuple ne se reconnaît plus à travers cette assemblée taillée sur mesure avec la bénédiction de l’exédé sexuel qu’est ATT pour barrer la route à IBK mais Dieu ne dort jamais, la verité a rattrapé en 3 mois le mensonge qui courait depuis plus de 20 ans. Tapo, tu dois rendre compte au peuple malien, le FDR doit rendre compte également au peuple pour ses agissements inutiles et umiliantes pour des vrais maliens. Ferme tes fesses!!!!

  2. Tout comme il faut reconnaitre que les 40% ne st pas représentatifs du poids du RPM qui gravite autour de 9%. Il ne faut pas retomber ds les travers que le Mali a connus avec ATT qui avait les pleins pouvoirs et les a utilisés pour mener le pays ds le gouffre!

  3. IBK Mali Président.
    C est officiel, IBK est élu président de la république du mali pour les cinq ans a venir, la cour constitutionnelle a proclame les résultats définitifs. Les maliens l ont voulu ainsi en votant massivement IBK. Un plébiscite, congratulation IBK! Plein succès mon Président.
    Après les formules protocolaires, nous donnons ici notre modeste contribution pour la bonne marche du pays pour les cinq ans prochain. Elle est au nombre de cinq points:
    1. Dissoudre tous les groupes armes ( MNLA, HCUA, MAA, Ganda Izo etc.) y compris les associations qui causent plus de mal que de bien tels que: AEEM, Yerewolo Ton…des le lendemain de la prestation de serment.
    2. Recenser physiquement tous les fonctionnaires d état, la Guinée et la cote d ivoire l ont fait et en cote d ivoire 8 000 faux fonctionnaires fut détectes. Je ne doute qu au le ressaut sera concluant.
    3. Éradiquer les petites corruptions plus particulièrement sécuriser nos documents officiels (passeport, carte d identité). L e passeport et la carte d identité malienne est l objet de plusieurs trafics. Ble Goude et Al Senouci ( ex bra droit de Kadafi) avaient pièces maliennes.
    4. Revisser tous les contrats minier et exiger que les propriétaires miniers forment les jeunes maliennes pour assurer la relève.
    5 Lancer une grande campagne de recrutement des jeunes dans la fonction publique et secteurs prives pour des arrangements fiscaux. ex: si chaque magasin de quincaillerie recrute ne saurai ce que un comptable, on ne verra plus aucun sortant CAP et BT en comptabilité au mali. L état Sénégalais a recruter 5500 jeunes cette année. Nous restons convaincu que seul le travail anoblie l homme.
    Bonne chance! excellence Ibrahim Boubacar Keita, mais sache qu on sera la pour dire ce qui a marcher et ce qui ne l a pas car “la crique n est jamais mortelle au contraire, elle participe au renouvellement de la vie” disait Sery BAILLY.
    Mohamed Mama TRAORE
    Réseau Africain pour la Promotion de l Ethique (RAPE)

    • Des groupes à dissoudre, il ne faut pas oublier les Frères Musulmans de Sabati 2012 qui sont autant dangereux pour la démocratie et la stabilité du Mali.
      D’autre part, je suis entièrement d’accord avec Me Tapo

  4. Voilà un article très constructif.
    Certes, il y a beaucoup de choses à faire, mais avant tout, il faut faire des ÉCONOMIES, le Mali en à fortement besoin. Bravo, Kassoum !

  5. Le mandat de l’actuel parlement a expire’!!! Le resultat final de l’election presidentielle est une indication que la carte politique du Mali a change’! L’ADEMA QUI EST LA FORCE DOMINANTE DANS L’ACTUEL PARLEMENT, N’A OBTENU QUE 9% A’ L’ELECTION PRESIDENTIELLE.
    LE FDR NE VEUT PAS D’ELECTION MAINTENANT PARCE QU’IL DOMINE L’ACTUEL PARLEMENT. LEUR STRATEGIE EST CONNUE!!! IL FAUT IMPERATIVEMENT ALLER AUX ELECTIONS LEGISLATIVES POUR PERMETTRE AU VAILLANT PEUPLE MALIEN DE CHOISIR SES REPRESENTANTS ET REDONNER UNE LEGITIMITE’ AU PARLEMENT DE NOTRE FASO!!!
    TONTON TAPO, BIENVENU DANS MON PAYS DADOPTION, LES USA! JE VOUS CONSEILLE DE VOUS REPOSER ET CESSER DE PARLER DE POLITIQUE MALIENNE POUR QUELQUES SEMAINES!!! VOUS DIREZ A’ VOTRE NIECE (MON EPOUSE DIA DE SENOU), KO AN YAFARA MOPTI FOULAW KA FANGA MA!! (RIRE)!!! QU’ATT RAMENE TANTIE LOBO AU MALI. LE RESTE NE NOUS INTERESSE PAS!!!

    • Ne vous trompez pas de calcul: ce n’est pas ADEMA qui a eu 9%, mais Dra Dembélé. Pour les législatives ne vous pressez-pas, c’est ds qq semaines et il est possible que les résultats ns donnent une autre configuration de l’AN dont IBK doit tenir compte

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