Aussitôt élu président de l’Assemblée nationale, Issaka Sidibé a montré qu’il est un profane dans la conduite des débats parlementaires. Ses premiers pas se sont avérés catastrophiques et moult bévues ont émaillé l’apprentissage de Isaac qui est pourtant un habitué de la salle Modibo Kéïta après une première expérience à l’hémicycle (2002-2007).
Issaka Sidibé s’est lancé à corps perdu dans une fonction pour laquelle il aurait du prendre quelques heures de cours.
Par complexe ou par suffisance, il n’a pas voulu se faire enseigner ses nouvelles fonctions. La conséquence a été impardonnable : lors des premières séances qu’il a présidées, le nouveau président de l’Assemblée a alterné erreurs et bourdes au sujet de la procédure généralement appliquée au sein de l’hémicycle.
Ainsi, lors du vote du règlement intérieur, mardi dernier, le président de l’Assemblée s’est mainte fois planté dans son office. Mais, cela s’est naturellement avéré laborieux pour quelqu’un qui fait ses premiers pas dans la fonction de président de l’AN.
Première bourde : Plus d’une fois, des députés ont du intervenir pour arrêter le président dans son « ignorance ». C’est le cas notamment au moment de la lecture des amendements du règlement intérieur par la commission ad hoc. Si certains de ces amendements n’ont fait l’objet d’aucune contradiction, d’autres, par contre, ont soulevé de vives protestations de la part de certains députés, notamment de l’opposition. Dans une telle situation, il semble que la voie à suivre est celle du suffrage des députés. Mais, ce n’est pas le sens dans lequel partait, ce jour, le président Sidibé, qui a cru que le vote devait se faire après épuisement de tous les amendements. Mais, c’était une entorse grave à la procédure. A ce sujet, les travaux ont connu un temps d’arrêt de plusieurs minutes, avec l’intervention de l’honorable Yaya Sangaré. L’élu de Yanfolila a, en effet, indiqué au président (presqu’avec insistance) que face à une telle situation, quand il y a un avis pour et un avis contre, même au sujet d’un amendement, «le vote s’impose». Face à la pertinence des observations du député, le président Sidibé, n’a eu d’autre choix que de se plier.
Deuxième bourde : Il y a une autre bourde qui a échappé curieusement à l’attention de tout le monde, mais qui a été détectée grâce à la vigilance de l’honorable Mamadou Hawa Gassama, député élu à Yélimané. Il s’agit notamment du marteau en bois que le président de l’Assemblée nationale garde toujours auprès de lui et qu’il doit cogner sur le bureau chaque fois qu’il estime qu’une loi a été votée , ou qu’ une question a été tranchée. Pendant une bonne partie de l’audience, le président Sidibé n’utilisait pas cet outil. Il faisait compter les suffrages avant de déclarer verbalement la tendance qui a obtenu la majorité des suffrages. Il a fallu l’intervention au pupitre de l’honorable Gassama pour que tous découvrent ce grossier et monumental oubli.
«Monsieur le président, le marteau que vous avez auprès de vous, c’est pour que vous l’utilisiez chaque fois que vous estimez que la loi s’est exprimée », lui a sagement fait remarquer l’élu de Yélimané.
Troisième bourde : Puis, il y a eu aussi, le moment de la désignation des scrutateurs, c’est-à-dire ceux qui doivent compter les suffrages lors des votes à mains levées. Au sein de la salle Modibo Keita, les députés sont assis selon trois rangées. Au moment du vote, le décompte est fait en fonction d’un scrutateur par rangée. Et le total est fait ensuite. A ce niveau aussi, le président Sidibé s’est fourvoyé en prenant la chose trop à la légère. Il a, en effet, demandé deux scrutateurs au tout premier vote. Mais des élus ont volé tout de suite à son secours pour lui dire qu’au lieu de deux, c’est plutôt trois scrutateurs qu’il fallait désigner, pour une meilleure facilitation du décompte des suffrages et pour rester conforme à une tradition bien ancrée au sein de l’Assemblée nationale.
Comme on le voit, on peut apprendre auprès de plus petit que soi. Mais, c’est une chose dont le président Sidibé n’a pas voulu tenir compte, pour des raisons que lui seul connaît.
C’est là qu’il faut tirer le chapeau au doyen Abdramane Niang. En tant que président du bureau d’âge qui a conduit le vote pour la désignation du nouveau président de l’Assemblée, il n’a pas hésité chaque fois qu’il ne se retrouve pas dans la procédure, à solliciter l’assistance du Secrétaire général, Dr Madou Diallo. Lequel lui a tout de suite indiqué la conduite à tenir. Savoir qu’on ne sait pas tout, c’est déjà le début de la sagesse, dit l’autre.
Oumar Diamoye