Pour une sortie médiatique de candidat à la présidentielle, ç’aura été le plus grand gâchis de l’inlassable effort qu’abattent les militants RPM pour porter haut son flambeau. En effet, vendredi soir, sur ‘La Chaîne du Continent’, IBK n’a pas seulement raté l’occasion « de convaincre ». En versant dans les approches et démarche intellectuelles au ras des pâquerettes, le Tisserand en chef a également compromis tout le capital d’estime dont il est crédité dans l’opinion malienne.rn
Les observateurs objectifs de la capitale sont unanimes là-dessus : Ibrahim Boubacar Keïta, le candidat du Rassemblement Pour le Mali, tout puissant président de l’Assemblée Nationale, était bel et bien méconnaissable. Tout au long d’une présence insipide sur le plateau de ‘Africable’, il a donné l’air d’être trop prisonnier d’un respect, aux pieds de la lettre, des recommandations de quelques conseillers. Le candidat était-il tenu de sacrifier à une exhibition de ses avantages comparatifs en maîtrise de langue de Molière ? Ce faisant, IBK aura gagné l’épreuve en privilégiant la forme et l’accessoire aux dépens du fond et de l’essentiel.
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– Malhonnêteté, mythomanie et inconséquence
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Difficile de concevoir, en tout état de cause, qu’un homme d’État de sa trempe, du haut d’une expérience de six (6) longues années de primature et presque qu’autant de présidence du Parlement, ne puisse dégager une vision claire des multiples sujets abordés avec ses interlocuteurs. C’est pourtant l’amère impression que la plupart des Bamakois gardent de cet entretien entre le candidat RPM et les confrères de la chaîne continentale. Durant plus d’une heure d’horloge, les téléspectateurs n’ont eu droit qu’à des vérités tronquées, des réponses biaisées, des approches orientées, peu objectives ou approximatives, lorsque les questions ne sont tout simplement esquivées au détour de sautes d’humeur ou d’accès de nervosité.
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Le consensus, un phénomène dont il a jadis tant magnifié les vertus, a mérité le qualificatif de fait accompli et de figure imposée, pour n’avoir jamais fait l’objet, selon IBK, d’une concertation et d’une acceptation par les composantes de la scène politique. Toujours enclins à conduire l’opinion sur des fausses pistes, l’illustre interlocuteur de Adame Sissoko et de Sékou Tangara a osé également soutenir, sans ciller, que son parti était majoritaire à l’entrée de la troisième législature avec 46 députés. Et IBK de s’appuyer sur cette vérité tronquée pour dénoncer une « incongruité démocratique », « un camouflet subi par le fait majoritaire ». Toutes choses qui justifieraient son retrait des instances dirigeantes du Parlement, a-t-il poursuivi.
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Nul besoin de dépoussiérer les archives du Parlement malien pour déceler les contrevérités qui sous-tendent une telle déduction de son président. Et pour cause : non seulement IBK n’y détenait une majorité relative que grâce à l’apport de ses partenaires de Espoir 2002 (Cnid, Mpr, etc), mais en plus son parti, le RPM, ne ravissait point la vedette à l’Adéma en représentativité intrinsèque. Par contre, la vérité et l’objectivité subissent un camouflet beaucoup plus évident dans sa perception de préoccupations collectives comme les demandes en soins de santé, éducation, entre autres besoins.
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Pour le premier domaine, le candidat du RPM, concédant du bout des lèvres les acquis les plus irréfutables, n’en atténue pas moins la portée et la paternité. Il a par exemple laissé entendre, allusion faite aux jalons antérieurement posés par ses gouvernements à lui, que le «Mali ne s’est pas construit un seul jour». Il tient cependant les autorités actuelles pour les seules et uniques responsables d’une dérive éducative perceptible sur le bas niveau des apprenants, mais dont les origines devraient sans doute remonter aux années de braise que l’école malienne a connues sous l’ancien président de l’Adéma-PASJ. Celui-ci n’en est pour autant pas suffisamment gêné pour se passer de railleries envers les journalistes maliens, des produits pour la plupart des mêmes années blanches et à demi-teinte ayant caractérisé son séjour à la Primature.
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– Des affirmations au ras des pâquerettes
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De toute évidence, le principal challenger d’ATT s’est mis en évidence beaucoup plus à travers les dénonciations et protestations que par les propositions concrètes pour lesquelles il étaient sollicité par ‘Africable’. Et lorsqu’il ne manque totalement d’inspiration – malgré les longues années d’expérience régalienne – il a recours à d’incroyables astuces pour esquiver des sujets, occulter certaines évidences.
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Interrogé sur ses solutions au secteur du tourisme, le candidat RPM n’avait pour toute réponse qu’une masturbation intellectuelle sur un concept qu’il considère comme le label distinctif de sa formation politique : ‘humanisme soudanais’. Idem pour les équations liées au chômage des jeunes, un phénomène dénoncé une allure déclamatoire sur ses affiches – « je dis non ! » -, mais contre lequel il ne dispose point de remède plus originale que la formation et la mise à niveau des diplômés sans emploi. Mais tout en admettant que les dimensions de la problématique sont mondiales, il estime que les responsables nationaux ont montré des limites dans le domaine.
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C’est le même manque d’objectivité, de rationalisme et de courage intellectuel qu’exhalent les impressions d’IBK sur la problématique cotonnière au Mali. Feignant sans doute d’ignorer les réels syndromes d’un secteur manifestement tributaire du marché mondial, l’ancien chef du Gouvernement les attribue exclusivement à une mauvaise utilisation des intrants et aux « trafics en tous genres ». Mais le comble, c’est lorsqu’il a recours à des arguments au ras des pâquerettes pour expliquer les péripéties ayant jalonné son accession au perchoir qu’il occupe depuis Octobre 2002. Aussi scandaleux que cela puisse paraître, on apprend, à travers les développements du candidat RPM, que la démocratie malienne est si bananière que la présidence d’une haute institution comme l’Assemblée Nationale peut être octroyée par la rue.
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Rappelant en effet le recours à des badauds pour scander son nom dans l’enceinte du Parlement, à l’époque, IBK estime devoir ses prérogatives de premier responsable de l’Assemblée à cette entité sociale qui n’était ni élue ni électrice à l’installation de la 3ème législature. Le perchoir n’a jamais fait l’objet d’une négociation avec quiconque, a laissé entendre le successeur de Ali N. Diallo qui jure en mettant le doigt au feu avoir été imposé à ses collègues députés par des commerçants ayant pressenti le complot qui se tramait dans son dos. Et d’insister du même coup sur les conséquences imprévisibles d’un scénario où le perchoir de l’AN ne lui était pas revenu. Venant d’un challenger de son acabit, ces propos sont d’autant plus graves et inquiétants qu’on ne sait s’il faut les mettre au compte d’une bourde, d’une perte de sérénité ou d’une alerte sur la possibilité de conquérir Koulouba par les badauds de la rue.
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A. Keïta
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