C’est contraints et forcés par les circonstances que les députés Parena et Sadi, pour ne pas rester orphelins à Bagadadji, ont décidé de former le même groupe parlementaire. Mais certains oiseaux de mauvais augure estiment que cet attelage bizarre va se noyer au milieu du guet. Entre le Parena et le Sadi, disent-ils, c’est comme la distance entre le ciel et la terre même s’ils s’affirment tous de l’opposition.rn
Les Bambaras disent que tous les usagers d’une même pirogue sont animés de la même intention : traverser la rivière sains et saufs. Avant de poursuivre qu’il ne faut pas s’embarquer dans la même pirogue avec un âne. Pour la simple raison qu’à la moindre alerte maître Aliboron risque de vous faire couler à pic. Ces deux adages valent leur pesant d’or car ils s’appliquent parfaitement à l’étrange alliance conclue entre le Parena et Sadi à l’hémicycle pour former un groupe parlementaire.
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Par la force des choses, en effet, et pour que leurs élus ne soient pas considérés comme des objets flottants non identifiés (OFNI) à Bagadadji, ces deux formations politiques ont été obligées de se donner la main. Pour le meilleur et pour le pire ? La seconde hypothèse paraît plus que probable. Depuis quand a-t-on vu le loup et l’agneau paître dans la même prairie ? Depuis quand rassemble-t-on dans le même enclos la chèvre et le chou ? En principe, quand l’ange arrive, la bête s’en va. Ils ne se jettent jamais dans les bras l’un et l’autre, car le second risque de donner au premier le baiser de Judas.
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On peut aisément imaginer que le président Tiébilé Dramé a été obligé de se jeter dans les bras du diable parce qu’il n’en pouvait plus . Mais d’aucuns susurrent déjà, après la levée de boucliers suscitée par l’exclusion de ses deux formations politiques du bureau de l’Assemblée, que l‘accord conclu entre le Parena et le Sadi ne fera pas long feu. On ne peut leur donner carrément tort. D’abord entre ces deux formations politiques, il y a une différence d’approche pragmatique pour ne pas dire dogmatique. Sur les problèmes brûlants de l’heure, elles ont toujours eu des appréciations divergentes. Le Parena a toujours navigué dans les rouages de la majorité présidentielle alors que Sadi, à travers son secrétaire général Oumar Mariko, s’est toujours montré aux antipodes du pouvoir. C’est à cause de la trahison d’ATT que le parti du bélier blanc a viré à 180° à gauche.
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Et même dans ce cas, Tiébilé et ses camarades ne veulent pas apparaître comme des boutefeux. En fait, le point commun entre Tiébilé Dramé et Oumar Mariko est que tous deux furent des anciens leaders estudiantins porteurs de banderoles, poseurs de barricades et rompus au maquis de la clandestinité. Ils sont tous deux de grands acteurs de la révolution de mars 1991 et ont sué eau et sang pour l’avènement de la démocratie au Mali. Toute la comparaison s’arrête là.
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Du reste, Oumar Mariko, qui se dit le défenseur des pauvres et des déshérités, a fustigé tous les régimes, de Moussa à ATT en passant par Alpha Oumar Konaré. La présence de la Sadi au gouvernement ne se justifie que par la pondération de son président Cheick Oumar Sissoko. De l’autre côté, quel que soit le camp dans lequel il se trouve, le Parena a toujours tenu au respect des droits démocratiques des partis politiques. Alors membre de la mouvance présidentielle, ce parti a défendu par deux fois le RPM exclu du bureau de l’Assemblée sur la base d’un complot tramé par des anciens alliés d’Espoir 2002, en l’occurrence le CNID et le MPR de connivence avec l’Adéma. Le Parena à l’époque avait même refusé le poste qu’on lui avait proposé.
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Aujourd’hui, après un premier couac commis par des députés qui voulaient se faire loger à meilleure enseigne avec Abdrahamane Sylla, le colistier d’IBK en Commune IV, le RPM veut lui rendre la monnaie de sa pièce. Malgré l’insistance du Parena, IBK et ses élus ne veulent pas figurer dans le bureau de l’Assemblée nationale. C’est une décision souveraine émanant du bureau politique national du parti des tisserands. Même en politique, il n’est pas trop tard pour bien faire. Cette décision, en même temps qu’elle renforce le Front pour la République et la Démocratie (FDR), confirme davantage son ancrage dans l’opposition.
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Mais on ne peut comprendre comment les députés du RPM ont pris par-dessus la tête des dirigeants du parti, la lourde responsabilité de figurer dans le bureau de l’Assemblée. Là-dessus d’aucuns pensent qu’il y a anguille sous roche parce que le parti des tisserands a été associé à toutes les tractations menées par l’Adéma et l’URD pour la formation de ce bureau. Quant au couple infernal Parena-Sadi, les oracles disent qu’il ne durera pas le temps d’une rose : l’espace d’un matin.
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Mamadou Lamine Doumbia
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