Assemblée nationale : Le grand oral

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LE GRAND ORAL
Assemblée nationale

Le Premier ministre a présenté  hier sa Déclaration de politique générale devant les députés. Moussa Mara y aborde tous les aspects de la vie de la nation

 

Le Premier ministre Moussa Mara a dévoilé hier, soit quelque deux semaines après son entrée en fonction, sa Déclaration de politique générale devant la représentation nationale. C’est un texte dont la lecture a nécessité près de deux heures trente minutes qui a été présenté aux élus de la nation. Le chef du gouvernement y aborde tous les aspects de la vie de la nation.

Moussa Mara présente sa déclaration comme un programme destiné à sortir le Mali de la crise, à lui permettre de croire de nouveau à son destin et à rendre les Maliennes et les Maliens heureux.

« En me présentant devant vous, honorables députés, pour détailler les actions que nous entendons mener dans les mois et années à venir, je mesure le poids de l’histoire, qui fait de cet instant, première déclaration de politique générale d’après crise, l’une des étapes majeures de la restauration de la démocratie malienne et du redressement du pays, après les élections générales réussies de l’année dernière qui ont vu Ibrahim Boubacar Keïta, bénéficier de la confiance de nos compatriotes ; confiance confirmée par une majorité confortable à l’Assemblée nationale».

Il a remercié au passage tous « les amis du Mali, la France, le Tchad, la CEDEAO, l’Union africaine, la Communauté internationale grâce auxquels nous avons évité le pire. Même si, j’aurais préféré nous remercier nous-mêmes, nous Armée, nous Gendarmerie, nous Garde, nous citoyens capables de se sacrifier pour la collectivité contribuant à l’édification d’une nation forte ».

Le Premier ministre nous engage à nous employer pour que le Mali n’ait plus jamais besoin de quelqu’un d’autre pour se protéger, se défendre et assurer sa sécurité. Il nous convie donc au sursaut national.

Moussa Mara promet des actions publiques orientées par une vision soutenue par des objectifs clairs et basée sur des initiatives précises dans le cadre du projet présidentiel, choisi par une bonne majorité des Maliens. Nous devons tracer la voie vers l’émergence.

Le chef du gouvernement prévient : « c’est une évidence que de rappeler qu’aucune Nation ne peut se développer tant que le tissu économique, social, voire politique, est gangrené par les maux que sont la corruption et l’impunité ».

INTENSIFICATION DE LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION. Il admet que « la corruption a atteint un état critique qui a fait dire aux plus pessimistes qu’elle est incurable au Mali ». « La corruption est au cœur des préoccupations du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta. Décréter l’année 2014 « année de la lutte contre la corruption », ne procède pas de « l’effet d’annonce », mais bien « d’un engagement que mon gouvernement mettra en œuvre de façon systématique et dans la durée. ».

Parallèlement, le gouvernement s’engage à mettre en place toutes les activités prévues depuis 2009. Parmi celles-ci, figure une politique soutenue de revalorisation salariale dont les effets se feront sentir dès cette année, a-t-il annoncé.

Il confirme en outre une intensification de la lutte contre la corruption et la délinquance financière avec la soumission prochaine au débat et au vote du projet de loi sur l’enrichissement illicite qui est sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Le gouvernement va s’attacher à dynamiser notre Administration qui s’est affaissée depuis quelques décennies. « Aujourd’hui, plus que jamais, l’opportunité nous est offerte, vous honorables députés et nous de l’exécutif, d’apporter des solutions idoines à ce drame».

Pour le Premier ministre, « est menacé de crise, un pays qui ne suit pas l’identification précise et détaillée de ses propres populations, ne peut distinguer le vrai du faux, le vivant du mort, le propriétaire de l’imposteur, le titulaire de l’usurpateur ». Moussa Mara promet d’éradiquer cette menace « en faisant en sorte que d’ici la fin de l’année 2015, le dispositif du RAVEC soit la base du système d’état-civil en individualisant chaque citoyen et en assurant un seul recensement biométrique, donc infalsifiable, de chaque Malien». « Je vous promets que dans deux ans, on ne doutera plus des documents administratifs Maliens !! », s’est-il ainsi engagé.

Il a par ailleurs invité à la réhabilitation du pouvoir judiciaire. Ainsi la justice jouera son rôle dans le vaste chantier du retour à l’Etat de droit affirmé par le chef de l’Etat. La décentralisation sera, elle, approfondie. Les élections communales auront lieu dans dernier trimestre 2014. Suivront des réflexions sur l’organisation territoriale avec la perspective d’une augmentation éventuelle du nombre de régions combinée ou non avec la suppression des cercles. L’un des objectifs étant de faire correspondre notre organisation du territoire avec les acceptions des populations pour assurer une cohérence plus grande entre le pays officiel et le pays réel. Il est aussi prévu l’approfondissement des instruments de la démocratie participative par la création d’un mécanisme institutionnel de dialogue entre l’Etat et les organisations de la Société civile, l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme de renforcement des compétences techniques des élus et la mise en œuvre d’une charte du débat public.

Pour le chef du gouvernement, une révision constitutionnelle est nécessaire, après plus de 20 ans de pratique démocratique. La matière existe. La révision interviendra suffisamment tôt au cours du mandat du président pour ne pas subir les aspérités et autres interprétations liées aux perspectives d’élections, a-t-il assuré.

Notre pays doit tendre vers de grands et forts partis politiques, ancrés dans la société, légitimes, dotés de structures, de doctrines, de programmes qui les situent au-dessus des contingences humaines. Avec une majorité qui gouverne et une opposition protégée et mise dans ses droits pour s’opposer librement. Le projet de statut de l’opposition sera ainsi examiné pour être revu selon les exigences démocratiques, assure le chef du gouvernement qui annonce en outre une administration permanente des élections et un bannissement de la transhumance politique.

Le Premier ministre a salué le retour de notre pays sur la scène internationale. Le gouvernement travaillera sans relâche à la promotion d’une diplomatie de développement, en vue d’une mobilisation accrue des soutiens extérieurs au profit de l’économie nationale, notamment le secteur privé, pourvoyeur de richesses et d’emplois pour notre jeunesse.

 

UNE ARMEE FONCTIONNELLE. Sur un autre plan, estime le Premier ministre, « il n’est pas nécessaire de rappeler que le Mali a besoin d’un outil de défense et de sécurité à la dimension des menaces auxquelles il fait face. ». Aussi la priorité est de définir et de mettre en place une politique de défense et de sécurité. Le processus est en cours.

Pour Moussa Mara, « la politique de défense aide à définir clairement la réponse armée et non armée car la défense n’est pas seulement militaire, elle est aussi civile, mobilise tous les moyens de la nation et met à profit de manière optimale le territoire pour constituer un dispositif global assurant la sécurité aux frontières, l’intégrité de notre territoire et la sécurité intérieure. Elle intègre une dimension régionale, africaine et internationale qui est significative. ».

Dans cette perspective, un accent particulier sera mis sur le développement de la coopération bilatérale, régionale et multilatérale pour garantir la sécurité sans laquelle il n’y aura ni paix ni développement.

Le chef du gouvernement considère de ce point de vue le Groupe des 5 pour le Sahel comme une amorce crédible de cette construction qu’il convient de consolider. Au sein de cet ensemble, le Mali fera sa part du travail. Pour le Premier ministre, « nous devons avoir une armée fonctionnelle, réactive, équipée en fonction des menaces qui sont asymétriques, pour pouvoir faire face aux dangers. Nous avons besoin d’une armée agile car l’ennemi l’est ».

« La réforme du secteur de la sécurité coûtera cher et même très cher », a-t-il averti. Plus immédiatement, le gouvernement fait face à la situation au nord. « D’ici là, je vous informe que nos forces armées et de sécurité montent progressivement en puissance. Nous disposons d’environ 8300 hommes et de plus de 1000 véhicules sur le théâtre des opérations au Nord. Nous travaillons en partenariat avec l’opération Serval et la MINUSMA en vue de surmonter les énormes difficultés de sécurisation du territoire ».

La résolution de cette situation est une des priorités du gouvernement qui va œuvrer sur le chantier de la réconciliation nationale. « Nous sommes conscients qu’il ne saurait y avoir de solution militaire aux problèmes de rébellion et que seul un accord politique pourrait nous permettre de pacifier le front irrédentiste, établir une frontière nette entre ceux qui s’inscrivent dans la paix et la réconciliation nationale et ceux qui demeurent des terroristes, narco trafiquants et adeptes des pratiques néfastes à combattre inlassablement et de manière implacable », a clarifié Moussa Mara.

L’école constitue une autre priorité. La qualité des produits de notre système éducatif est insuffisante pour le pays et pour ses enfants, a jugé le PM qui a invité à prendre à bras le corps le changement dans le secteur de l’éducation, courageusement, lucidement, dans la durée. Ne dévions pas de nos objectifs, a-t-il recommandé en annonçant des actions dans tous les ordres d’enseignement et plusieurs mesures dont un plan décennal. Ces réformes courageuses nous permettront de réussir si chacun s’y engage. L’Etat, lui, ne ménagera aucun effort pour y parvenir. « Nous nous engageons à maintenir l’effort public déployé pour le secteur et qui se traduit par l’affectation d’environ 40% des ressources publiques à l’éducation », a précisé Moussa Mara.

Tout ceci, a-t-il ajouté, ne doit pas nous faire oublier que nous devons combattre la pauvreté. Il nous faut travailler pour faire de notre pays, un Mali émergent En vue de maintenir la stabilité du cadre macro-économique, le gouvernement a mis en place ou mettra en place à brève échéance, des mesures parmi lesquelles, l’amélioration de la gestion de la trésorerie et la qualité de la dépense publique.

La construction des infrastructures se poursuivra. D’autres actions verront le jour dans le domaine de l’énergie pour une augmentation de la capacité de la production énergétique. L’ambition de faire du Mali une puissance agricole reste d’actualité. L’Etat veillera également à la gestion rationnelle des ressources naturelles. Notre industrie mérite d’être soutenue.

La presse sera soutenue, a-t-il indiqué en rappelant la création en cours d’une grande école de journalisme. La presse écrite publique est concernée avec la dotation de l’Agence malienne de publicité (AMAP) d’une nouvelle imprimerie moderne. Le chef du gouvernement promet un accompagnement à la presse privée, important outil d’ancrage démocratique, pour qu’elle se renforce par la professionnalisation et l’auto régulation avec à terme la mise en place de grands groupes de presse privés, donnant à ce secteur une crédibilité nécessaire aujourd’hui.

Moussa Mara a abordé d’autres sujets comme le développement de l’internet, la politique de la ville, la transition démographie, énergétique, numérique, qui feront le Mali émergent.

Les autres aspects évoqués sont le développement social, la santé, l’hydraulique, l’emploi des jeunes, la promotion des personnes handicapées.

Moussa Mara entend faire une politique de résultats. De ce point de vue, les ministres seront évalués sur leurs actions.

En conclusion, le chef du gouvernement a demandé à l’ensemble de nos compatriotes de se serrer la ceinture, de s’engager pour le pays, afin que tous ensemble, nous tirions ce pays de la mauvaise passe. Unis, comme le disent si bien nos nombreux adages, rien ne peut être au-dessus de nos forces.

Après cette déclaration, Moussa Mara a annoncé qu’il engageait la responsabilité de son gouvernement devant la représentation nationale. Le débat sur la DPG aura lieu vendredi et sera sanctionné par un vote.

L’intégralité de la Déclaration de politique générale du Premier ministre est disponible dans les pages intérieures du journal.

A. LAM

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1 commentaire

  1. Moussa Mara: Nouveau Pape canonisé “Sursaut National” ou bonimenteur?

    Moussa Mara, nouveau premier ministre du Mali, expert-comptable diplômé de formation française, cet “ingénieur des chiffres et des métiers de l’audit” très vite devenu politicien local à Hamdalaye, un quartier de la rive gauche de Bamako, s’essaye aux destinées de la nation en distribuant de manière désordonnée des médailles de “leadership” à qui il veut.

    “un grand serviteur de l’Etat qui a dédié sa vie professionnelle à son pays et a développé des qualités de leadership”

    Disait-il d’Issiaka Sidibé lors de sa déclaration de politique générale, le beau père du fiston national depuis peu bombardé président de l’assemblée nationale du Mali.
    Je ne sais pas pour vous mais je n’ai pas connaissance de ces “qualités de leadership développés” chez l’honorable Issiaka Sidibé qui n’a même pas daigné nous dire quand est-ce que qu’il fut diplômé de l’ENA du Mali dans son CV de présentation à la nation.

    Une fine barbe négligée sur un visage lucide, le ton nonchalant et le regard félin, Moussa Mara égraine des promesses aux maliens à coup de déclarations tonitruantes promettant ciel et terre au travers de
    “La politique qui va rendre les Maliennes et les Maliens heureux.”

    Poursuit-il et ce n’est pas fini.

    “La politique qui va effacer des yeux et des mémoires de nos compatriotes les affres de la honte, de la peur, du désespoir, de l’inquiétude sur l’avenir du pays. La politique qui va redonner à notre pays sa dignité et sa fierté.”

    Et je vous jure qu’il était en pleine forme et le meilleur c’est son “sursaut national” qu’il va “réussir” en ces termes:

    “Le sursaut national est plus que nécessaire. Tous ensemble, chacun en ce qui le concerne. Nous avons la charge d’amorcer, d’organiser et d’encourager ce sursaut. Sous l’égide du Président Ibrahim Boubacar KEITA, nous allons nous y employer et réussir.”

    J’ai retenu mon souffle et j’ai ouvert mes yeux pour voir comment il va y parvenir.

    Côté investissement je n’ai pas noté grand chose, un programme d’investissements et une politique macroéconomique nettement moins ambitieux non seulement par rapport au PDES d’ATT mais aussi et surtout par rapport aux programmes économiques en cours dans la majorité de nos pays voisins.

    Moussa Mara parle de 15 lycées très insuffisants pour accueillir les suppléments d’enfants maliens en fin de cycles de l’enseignement fondamental.

    Il est resté évasif sur les efforts d’investissements dans l’enseignement fondamental (il songe plutôt à l’enseignement préscolaire, aux jardins d’enfants et oublie l’enseignement fondamental en tout cas en terme d’investissements concrets) alors qu’il veut orienter les enfants maliens vers les “sciences et les techniques”.

    Cela demande des ateliers, des laboratoires des bibliothèques qu’il faut construire mais combien et comment?

    Mystère de Dieu et mystère de Mara.

    Idem pour les politiques sanitaires, agricoles, industrielles qu’il compte mener où les investissements concrets sont noyés dans des objectifs généraux sans moyen de voir clair dans les priorités en terme de construction d’hôpitaux, d’aménagements sylvo-agrico-pastoraux (combien d’hectares faut-il aménager où et quand) et d’aménagements de zones industrielles (combien, où et quand).

    Pour financer sa politique, Mara écorche les pourcentages du budget d’état (40% pour l’éducation, 15% pour l’agriculture, pour la santé il ne donne aucun pourcentage).

    Mais il oublie gentiment de nous dire le montant de ce budget d’état (qui est de 1559 milliards en dépenses pour 2014) et celui du budget spécial d’investissement.

    Pour la défense et la sécurité il promet 4% de la richesse nationale qui vaut selon lui 240 milliards contre 175 milliards aujourd’hui consacrés par le budget d’état à la défense nationale.

    Ces 240 milliards représentent actuellement 15% du budget d’état de 2014.

    Donc 40% éducation, 15% agriculture, 15% défense nationale sans compter la santé, la diplomatie, l’environnement, l’administration, la justice, l’eau et l’énergie, l’entretien luxueux des institutions du pays notamment la présidence de la république, etc.

    À ce rythme nous risquons vite de dépasser les 100% du budget national, c’est à dire que la moyenne de la politique de financement de Mara va dépasser le total de la capacité financière de l’état malien.

    Alors en bon ingénieur du chiffre, il veut inventer une réforme fiscale mais sans daigner nous dire combien il compte accroître les recettes publiques avec la fiscalité intérieure et de celles issues de la fiscalité de frontières compte tenu des contraintes et engagements communautaires du Mali.

    Il est courageux Mara, il est même très courageux et il continue et là le meilleur est ce qui suit.

    Il sort de son chapeau, oh plutôt de son bonnet, ces fameux “Diaspora Bonds”.

    J’ai pris ma tête dans les deux mains et j’ai prié le bon Dieu pour que ce ne soit pas une “Diaspora Bombe”!

    Car Mara veut se lancer sur le financement d’un État corrompu (qu’il reconnaît “malade”) et dépensier par les marchés financiers en créant incognito une obligation d’état (c’est à dire un titre de dette publique) destinée aux maliens de l’extérieur.

    En clair, il veut solliciter l’argent des expatriés maliens à travers un emprunt public pour financer les investissements publics.

    Le problème est que la rentabilité et la sécurité des fonds investis par l’état malien ne sont pas encore garanties car le niveau de corruption, de laisser aller, de gaspillage de nos ressources publiques diminuent considérablement la rentabilité économique de nos projets d’investissements et sapent du coup la solvabilité de l’état malien.

    Alors si la loi contre la corruption annoncée par Mara peut à elle seule garantir cette solvabilité de l’état malien pour sécuriser les fonds empruntés aux travailleurs immigrés sans mesures concrètes de redynamisation de la justice sociale, de l’efficience et de l’efficacité des actions publiques, nous seront là pour voir cela sinon nous sommes dubitatifs pour le moment.

    Car pour faire passer un État “malade” à un “athlète” comme le veut super coach Moussa Mara, (le “special one” de la gouvernance en Afrique) il faut du COURAGE, du TRAVAIL et de la RIGUEUR alors que ces mots ne sont pas prononcés plus de deux fois dans le long discours de Mara devant la représentation nationale.

    Wa salam!

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