Adoption du nouveau code de la famille : ATT a réussi son premier test grandeur nature

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Le nouveau Code des personnes et de la famille, avec ses 1143 articles répartis en 9 livres , a fait l’objet d’intenses débats entre les députés lors de la séance du 3 août 2009. Le ministre de la Justice , Garde des Sceaux a défendu à son corps défendant le texte. Puis, il sera adopté par les députés mais rejeté par le peuple. Alors, en sage et soucieux de préserver la quiétude, Amadou Toumani Touré, président de la République , renvoie le code pour une relecture. C’était lors de son discours du 27 Août 2009.  C’est à cet exercice que nos honorables députés se sont soumis et ont finalement adopté un code ce vendredi 2 décembre 2011. Qui, certainement aura l’adhésion totale du peuple afin qu’il soit promulgué par le Président ATT dans les jours à venir.

                Le Mali se trouve à nos jours devant le défi d’harmoniser les textes de lois avec toutes les conventions internationales, régionales et sous-régionales qu’il a ratifiées. C’est une des raisons principales qui pousse depuis plus d’une décennie les autorités à s’afférer pour la relecture du code des personnes et de la famille. Alors, en sa qualité de soldat de la démocratie, le Général Président vient de réussir son 1er test grandeur nature en attendant la réforme de la Constitution et l’organisation de la présidentielle dans cinq (5) mois.

                Le Code du Mariage et de la Tutelle actuellement en vigueur au Mali a été adopté en 1962. A à peu près un demi siècle de pratique, ce Code a montré ses limites suite à l’évolution sociale de notre pays dans un contexte de mondialisation. Le Mali se trouve alors devant le défi d’harmoniser les textes de lois avec toutes les conventions internationales, régionales et sous-régionales qu’il a ratifiées. Pour preuve, le cas de la succession au Mali nous laisse devant un vide juridique régi selon la coutume des parties en présence. Ce qui, à n’en pas douter, pose d’énormes problèmes aux services administratifs chargés de la question.

                Le besoin de résoudre les nombreux problèmes non traités par le Code du Mariage et de la Tutelle et la nécessité d’harmoniser certains articles dudit Code avec la réalité du moment en conformité avec les engagements du pays, ont conduit à la conception et à la validation d’un code appelé Code des Personnes et de la Famille. Ce travail de conception dure depuis plus d’une décennie et pour la cause, il réunit à chaque fois toutes les parties prenantes de la société malienne.

LA RELECTURE

                Elle est intervenue après que le Président de la République ait reçu en audience les Chefs des Institutions de la République , eu des consultations avec les Représentants des familles fondatrices de Bamako, du Haut conseil islamique, des Eglises catholique et protestante, du Conseil national de la société civile, et du Barreau. C’est ainsi qu’il décida d’envoyer le code à une deuxième lecture par la nécessité de sauvegarder "la quiétude et la paix sociale". L’objectif de cette démarche est d’obtenir l’adhésion et la compréhension de l’ensemble du peuple.

                Soulignons qu’en prenant cette décision, le Chef de l’Etat ne remettait pas en cause la pertinence du code. Plutôt le contraire. Alors, il soutenait que sur les 1143 articles du code, seuls 10 posent problème. A cet effet, il déclarait être solidaire des députés qui avaient voté le texte.

                Enfin, voici quelques passages de la dernière mouture du code adopté. Un document qui nous vient de la cellule de communication de l’Assemblée nationale.

                Ce rapport est signé par l’honorable Me Amidou Diabaté en sa qualité de rapporteur et par la présidente l’honorable Mme Camara Saoudatou Dembélé. 

INTRODUCTION

                La commission des Lois Constitutionnelles, de la Législation , de la Justice et des Institutions de la République a été saisie pour l’examen au fond du code des personnes et de la famille renvoyé en seconde lecture à l’Assemblée Nationale par le Président de la République.

                Le code des personnes et de la famille fut adopté par l’Assemblée Nationale en séance plénière le 03 Août 2009.

                Dans le délai de promulgation le Président de la République décida de le renvoyer en seconde lecture pour que soient pris en compte les points de vues d’une partie importante, voire majoritaire de la population malienne, en l’occurrence toutes les organisations islamiques, sur les thèmes : les personnes, le mariage, la filiation, la parenté et l’alliance, la minorité, la tutelle et l’émancipation, et enfin les successions.

                La commission des lois après avoir désigné son rapporteur mit en place une commission ad hoc composée de représentants du Haut conseil islamique et de députés. Cette commission travailla pendant trois mois sous la présidence du Président de l’Assemblée Nationale pour appréhender correctement les points sur lesquels la relecture était demandée. Après des échanges féconds avec le haut conseil islamique qui ont permis de s’entendre sur la formulation des amendements souhaités, la commission procéda ensuite à l’écoute des personnes ressources et des représentants du Gouvernement sur les points en discussion.

                Enfin, un atelier de deux jours fut organisé les 15 et 16 Novembre 2011 à l’Assemblée Nationale sous la présidence du Président de l’Assemblée Nationale qui regroupa les organisations de la société civile, les organisations féminines et les représentants de toutes les confessions religieuses (musulmane, catholique et évangélique protestante), les représentants de l’Assemblée Nationale et du Gouvernement, dans le souci de parvenir à un large consensus sur les points en discussion.

                On ne le soulignera jamais assez que le projet de texte qui vous est aujourd’hui soumis en seconde lecture est le résultat de discussions, d’échanges, de propositions, de contre-propositions, en un mot de concessions réciproques de la part de tous les acteurs sociaux qui y ont participé, dont nous saluons ici l’esprit de compromis. C’est grâce à leurs efforts de compréhension et de tolérance qu’il a pu se dessiner un large consensus autour des amendements soumis en guise de seconde lecture, l’objectif poursuivi par chacun étant de garantir à notre corps social la cohésion et la paix.

                C’est à l’issue de cet exercice que la commission élabora ce rapport composé de cinq parties. Il s’agit du contexte de la relecture, les propositions d’amendement, la synthèse des écoutes, les recommandations et la conclusion.

LES AMENDEMENTS

                Il faut noter qu’en tout et pour tout, ce sont quarante neuf (49) articles sur les 1143 qui ont été touchés par la relecture.

                Les modifications ont pris en charge surtout la religion et la coutume dans les dispositions qui garantissent le respect de la personne humaine et de sa dignité, pour mieux asseoir la notion des droits de la personne humaine dans le contexte culturel et religieux du pays.

                Ainsi, les amendements ont concerné respectivement. Dans le livre I, des Personnes ; dans le livre II, du Mariage ; du livre IV, de la Filiation ; du livre V, de la Parenté et de l’Alliance ; du livre VI ; de la Minorité , de la Tutelle , de l’Emancipation et des Majeurs Protégés par la loi ; du livre VII, des Successions. Alors, ce sont les livres III, VIII et IX qui n’ont pas fait l’objet d’amendement. Comment parvenir à un résultat tangible et plausible ?

LA SYNTHESE DES ECOUTES

                Après plusieurs mois de travail avec le Haut conseil Islamique, une formulation adéquate des amendements à soumettre à la seconde lecture était élaborée.

                La commission procéda à l’écoute de certaines personnes ressources, des associations féminines, des autres associations de la société civile, l’église catholique et l’église évangélique protestante, le SYLIMA, et enfin le comité de plaidoyer.

                Par la suite, toutes ces associations furent conviées à l’atelier des 15 et 16 Novembre 2011 tenu à la salle Awa Kéïta de l’Assemblée Nationale.

                Qu’il s’agisse du WILDAF, du REFAMP ou du groupe PIVOT Droits et Citoyenneté des Femmes (GP-DCF), de la CAFO , et de l’AJM, les associations ont exprimé beaucoup de réserves sur les amendements proposés. Elles ont même eu à faire de nouvelles propositions de rédaction dont certaines furent bien accueillies notamment en matière de mariage religieux.

                Pour l’essentiel les différentes parties entendues ont adhéré à la légalisation du mariage religieux tout en demandant que soient prises les mesures d’accompagnement nécessaires de nature à fiabiliser le processus.

                Les personnes ressources comme les associations ont en revanche émis quelques réserves sur l’omission de l’affirmation des droits de la femme et de l’enfant tels qu’exprimés par les traités et accords internationaux. Elles ont aussi marqué leur opposition à l’idée de soustraire de la liste des mariages prohibés : le mariage entre la femme et le frère de son mari vivant, le mariage entre l’homme et l’ancienne épouse de ses oncles paternels et maternels et le mariage entre l’adoptant et l’adopté.

                La question de l’adoption filiation a fortement divisé les parties. Si le Haut Conseil Islamique y est resté absolument opposé, les autres confessions religieuse et les associations ont insisté sur la nécessité de garder l’adoption des enfants abandonnés et des enfants dont les parents sont inconnus.

                Au total, les écoutes ont permis d’entendre les différents points de vue afin de pouvoir adopter les solutions du juste milieu.

LES RECOMMANDATIONS

                La commission des lois constitutionnelles, de la législation de la justice et des institutions de la République recommande parallèlement à l’adoption du présent texte :

– L’adoption d’un statut des ministres du culte habilités à célébrer le mariage religieux, dans la concertation entre les pouvoirs publics, le haut conseil islamique, l’église catholique et l’église évangélique protestante ;

– La mise en place par les pouvoirs publics en concertation avec les différents ordres religieux d’une structure d’accueil d’aide et d’assistance à l’éducation des enfants abandonnés et des enfants sans parents connus qui contribuerait à la moralisation des processus d’adoption ;

– Une large sensibilisation des populations et des organisations de la société civile pour une meilleure compréhension et un meilleur accueil du texte.

CONCLUSION

                La commission des Lois Constitutionnelles, de la Législation de la Justice et des Institutions de la République , sous réserve de la prise en compte des recommandations formulées, invite notre auguste Assemblées à adopter les propositions d’amendement au code des personnes et de la famille, renvoyé pour une seconde lecture.

Fait à Bamako, le 1er décembre 2011

Rapporteur : Me Hamidou Diabaté

La Présidente : L’honorable Mme Camara Saoudatou Dembélé.

                Quoi qu’il en soit, avec le vote et l’adoption de ce code, en attendant sa promulgation par le Général Président, le Mali s’est mis dans une nouvelle disposition. Sans être totalement en phase avec le monde occidental, il sort du carcan de l’archaïsme. Contre vents et marrées, le Président Touré a réussi son 1er test grandeur nature des réformes en cours. Même si pour certains, ce Code adopté par l’Assemblée nationale ce 2 décembre 2011 est plus ancré à nos us et coutumes. Ce qui est d’ailleurs normal car le français Portalis ne disait-il pas ceci que le législateur : "ne doit point perdre de vue que les lois sont faites pour les Hommes et non les hommes pour les lois ; qu’elles doivent être adaptées au caractère, aux habitudes, à la situation du peuple pour lequel elles sont faites".

Moussa SOW

Stagiaire

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