Après l’échec du ‘’Biprem’’ contre IBK : ATT peut-il se frotter les mains ?
Amadou Toumani Touré
Exilé depuis 2012 et sa démission conformément à l’Accord-cadre entre la Cédéao et ses tombeurs, l’ancien président de la République n’a peut-être aucune raison de craindre encore un sort de détenu au cas où il se résolvait à rentrer au bercail. En plus des hésitations à activer sa procédure en souffrance au niveau de la commission parlementaire ad hoc y afférente, la question d’une éventuelle poursuite de l’Homme du 26 Mars est en partie tranchée par le traitement réservé au dossier de même nature porté par le Bloc d’Intervention Populaire pour la Réunification Entière du Mali.
Sous la houlette d’anciens compagnons du putschiste en détention à Sélingué, le Général-Capitaine Amadou H. Sanogo, les auteurs de la plainte ont pris soin de l’acheminer directement à la Haute cour de justice, soulevant ainsi un lièvre sans précédent dans l’opinion : des associations de soutien à IBK en passant par les partis politiques de la majorité ou leurs ramifications, le camp présidentiel est monté sur ses grands chevaux pour étouffer dans l’œuf une initiative perçu comme vicieuse manœuvre de déstabilisation du régime.
Mais, que leur démarche tienne d’une totale ignorance de la procédure en la matière ou d’une malicieuse provocation, elle aura produit un retentissement, une frénésie de réprobations qui met en exergue toute la fragilité du système IBK manifestement loin d’être irréprochable avec les nombreux scandales à rebondissements depuis son avènement. Mais de là à être poursuivable pour haute trahison… En tout cas, ceci expliquant peut-être cela, il aura suffi de la petite tempête pour secouer vigoureusement le cocotier et inciter les tenants du pouvoir à un lever de boucliers sans précédent pour un jeu qui n’en valait pas du tout la chandelle. D’autant que la procédure et les voies appropriées en la matière ont été piétinées et ignorées sur toute la ligne par les auteurs de la plainte.
En clair, un mouvement malien, fut-il l’émanation d’anciens putschistes, ne peut avoir qualité ni être investie de la légitimité à la dimension de pareilles prétentions.
En la matière, il revient plutôt à la représentation populaire, en vertu notamment de la loi sur la Haute cour de justice de la procédure suivie devant elle, de déclencher le mécanisme d’une poursuite pour haute trahison contre un président de la République. Qu’il soit en exercice ou hors de fonction, c’est le président de l’institution parlementaire qui en informe l’assemblée nationale où une commission parlementaire ad hoc est constituée sans délai pour produire un rapport et édifier le pouvoir législatif sur l’opportunité ou non de retenir des charges contre l’intéressé.
Les charges retenues par le ‘’BIPREM’’ contre le président de la République, quoi qu’il en soit, n’ont pu prospérer parce que le document, selon l’appréciation de la Haute cour de justice où il a été classé sous la mention sans suite, pèche surtout dans la forme.
En plus de n’être adressé à personne et en dehors de la signature de son président, il ne comporte ni date ni numéro d’expédition.
Qu’à cela ne tienne, la démarche de Bloc d’Intervention Pour la Réunification Entière du Mali aura été utile d’avoir donné une indication et anticipé sur l’aboutissement que pourrait connaître une démarche similaire : la poursuite de l’ancien président ATT pour le même chef d’inculpation. Exilé à Dakar depuis sa démission suite au putsch du 22 Mars 2012, le prédécesseur d’IBK se trouve sous la menace d’une poursuite pour haute trahison depuis décembre 2013 après que le premier gouvernement d’IBK en a pris l’initiative en informant par l’opinion par un long réquisitoire livré par le porte-parole du gouvernement. Il s’agit d’un acte d’accusation en bonne et due forme décliné dans les actes constitutifs différents ci-après : violation de serment de chef suprême des armées pour avoir facilité la pénétration e l’installation de forces étrangères sur le territoire national, destruction volontaire de l’outil de défense nationale et démoralisation des troupes par des promotions complaisantes, dissimulation des objets, matériels ou renseignements susceptibles d’exploitation pour au profit de la défense nationale. Comme il est loisible de le constater, les chefs d’inculpation sont totalement différents de ceux que le ‘’BIPREM’’ a retenus contre IBK récriminé quant à lui pour «gestion douteuse de l’argent public».
Pour bizarre que cela puisse paraitre, les deux plaintes ont des lacunes en commun, en l’occurrence la violation de la procédure applicable à la haute trahison selon l’arsenal législatif malien. La loi 97-001 est pour le moins implicite sur la question. Pour les cas d’inculpation d’un président de la République pour haute trahison, l’Assemblée nationale est saisie par son président. La formulation peut paraitre certes floue parce que le texte ne précise pas par qui l’inculpation est déclenchée, mais l’équivoque est aussitôt levée à l’alinéa suivant de la même loi qui marque une nette différente d’avec la procédure relative aux ministres pour crimes et délits commis dans l’exercice de leur fonction.
Dans la seconde alternative, en effet, la dispose clairement que le dossier est transmis à l’Assemblée nationale par le Procureur général près la Cour suprême.
Or cette dernière procédure applicable aux ministres est celle que les hautes autorités maliennes ont choisie dans la poursuite de l’ancien président. En définitive, si le BIPREM n’a pas qualité pour saisir la haute cour de justice, on peut s’interroger si le Gouvernement a également qualité pour saisir l’Assemblée nationale d’une procédure qui relève de ses prérogatives immanentes en vertu même de la séparation des pouvoirs.
Au demeurant, en vertu des liens de subordination entre le gouvernement et un chef de l’Etat en exercice, il n’est point envisageable qu’une procédure de haute trahison contre le second émane du premier.
C’est probablement pour tous ces vices que le dossier contre ATT n’arrive pas pour l’heure à se relever des fuites dont le rapport y afférent a été l’objet à l’étape préliminaire.
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