A l’heure actuelle, le débat qui retient l’attention à l’ADEMA-PASJ est celui du retour de l’ancien locataire de Koulouba, Alpha Oumar Konaré. Mais ce retour de Konaré que le parti de tendance à utiliser comme un épouvantail cache mal un autre. Il s’agit de celui de Soumeylou Boubèye Maïga qui tarde à transformer son association convergence 2007 en parti politique.
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Cependant si l’on se réfère à certains faits et gestes passés ou en cours dans la Ruche, on est en droit de se demander si le chemin de retour des deux complices ne serait pas semé d’embûches. Or, selon Soumeylou, Alpha et moi, “nous nous projetons en quelque sorte dans l’avenir”. Un projet qui pourrait se réaliser aussi hors de l’ADEMA-PASJ…
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LE PEUPLE ADEMA TRANCHE
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En novembre 2005, l’ADEMA tient une conférence nationale et décide de transformer son soutien politique au président sortant en alliance électorale. Ces deux événements précipitent le débat sur la présidentielle, le consensus s’effrite peu à peu et finit par mourir. L’échiquier politique se présente sous la forme de deux blocs antagonistes.
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Le premier est l’ADP (Alliance pour la Démocratie et le Progrès) qui soutient ATT, le deuxième est le FDR qui promet de chasser le président du pouvoir.
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Cependant, si l’ADEMA s’abstient de présenter un candidat à la présidentielle, cette décision sera constestée. Et à la tête des contestateurs le premier vice-président Soumeylou Boubèye Maïga. Pour faire échec au projet de son parti, Boubèye va créer Convergence 2007 et déclare qu’il est candidat.
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Le Comité Exécutif se fâche. Il soumet à l’exclusion du parti, par la 8ème Conférence Nationale le cas de Soumeylou et quatre camarades du CE. La proposition d’exclusion est adoptée. Dans les coulisses, on apprend que si Konaré a engueulé Boubèye en lui disant de laisser ATT faire ses deux mandats, par contre, il n’a pas approuvé l’exclusion de son ancien élève du parti.
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Alors, Soumeylou, le désormais ex-1er vice-président, s’énerve parce qu’il ne pouvait penser un jour qu’il sera exclu de l’ADEMA. Afin de faire chanter ou faire pression sur ATT, Boubèye se retrouve parmi les fondateurs du FDR. Ses amis durcissent le ton et affirment que leur idole doit transformer son association en parti politique et annoncer sa candidature à la présidentielle.
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SOUMEYLOU DESILLUSIONNE
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Au finish, ATT bat ses adversaires et même dans leurs fiefs supposés dont Boubèye à Gao. L’ex-Directeur des services de renseignement malien arrive 6ème sur 8 candidats en lice. Il se voit ainsi stoppé dans son projet de légitimer sa rébellion au sein de l’ADEMA. Il doit être parvenu à la conclusion que dans la Ruche, on ne l’aime pas, mais on le craint, chacun croyant qu’il a un petit dossier sur ou contre lui. Même s’il en avait, il les garderait pour ses archives, lui qui a cessé de jouer le rôle de gardien de temple depuis 2002. A croire que l’homme se retrouve dans le précipice politique.
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Alors question : Après l’humiliation de la présidentielle, Boubèye sera-t-il plus prompt à rebondir de bon pied que les autres alliés du FDR ?
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A cette question des analystes répondent par l’affirmative. Pour eux, avec le travail de patron des espions mené avec brio pendant 7 ans qui fait de lui un calculateur froid qui a été de tous les combats politiques et syndicaux, il n’est pas évident que Soumeylou acceptera de jouer un rôle de second. Ne parlons pas non plus de l’hypothèse pour lui de demander à faire valoir ses droits à la retraite avec ses 54 ans. Parce que l’homme est ambitieux.
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SA PRESENCE GENE AU FDR
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Après avoir joué le rôle de faiseur de rois dans ce Mali démocratique, Soumeylou veut lui-même monter sur le trône. Dans ce cas, il lui faut un cadre structuré où il peut jouer son avenir politique. Il sait que Convergence n’est pas l’organisation qui pourrait lui permettre d’atteindre son but. Et le fait qu’il n’ait pas jusqu’ici transformé cette association en parti politique crée un climat de suspicion au sein du FDR, au point que les autres ont tendance de se méfier de lui.
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En tout cas, au front, on a tendance à prendre Soumeylou pour une “taupe” plus qu’un allié. C’est dire que l’homme souffrira longtemps dans ce pays à cause de son passé de chef des espions, parce que chacun le prend pour un flic. Il n’a donc pas sa place au FDR. Mais s’il doit quitter, où irait-il ?
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LE DUO A L’ADEMA ?
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Aujourd’hui, à l’ADEMA, on parle de plus en plus du retour de l’ancien président du CE et de la République, Alpha Oumar Konaré qui est en fin de mandat à la tête de la commission de l’Union Africaine (UA). Avec ce retour, ils sont nombreux également à parier sur la possibilité pour Soumeylou de regagner l’ADEMA.
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Pour mémoire, Soumeylou a usé de son influence de conseiller spécial d’ATT sous la Transition de 14 mois pour dégager un terrain propice à l’émergence de la stature présidentielle de Konaré. Cela se comprend si l’on sait que Boubèye est un ancien élève de Alpha. Mais, tout porte à croire qu’il voue à son ancien prof du lycée de l’admiration, puisque les deux hommes, avant l’ADEMA, militaient au PMT (Parti Malien du Travail). Une admiration qui s’est transformée par la suite en complicité quand Konaré accéda au pouvoir en 1992. Au point que lorsque l’ancien président quittait le pouvoir à 2002, son ancien chef de Cabinet à Koulouba était cité parmi les dauphins.
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C’est pourquoi, d’aucuns n’hésitent pas à dire que si Konaré devait revenir, il ne laisserait pas à la touche celui qui a joué les triples rôles de penseur, d’organisateur et d’activiste du parti de l’Abeille. Aussi, Soumeylou n’avait-il pas dit à Jeune Afrique n°1952, Alpha et moi, “nous nous projetons en quelque sorte dans l’avenir ?”.
rn On peut être tenté de croire que l’heure serait venu de mettre à exécution ce projet au moment où Konaré est libre de tous engagements nationaux (c’est-à-dire à la tête du Mali) et africains (il n’a pas accepté de chercher un second mandat à la présidence de la commission de l’UA).
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Si le projet devait être exécuté au sein de l’ADEMA, Soumeylou pourrait profiter de la décision d’Alpha de refonder la grande famille ADEMA pour signer son retour, comme d’autres militants et cadres qui sont maintenant hors du parti. Cela pourrait lui permettre d’échapper à une pression. Il ne sera pas obligé d’écrire pour demander son intégration en présentant ses excuses au parti.
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Dans ce cas, il avouera sa faute et le parti l’amnestiera. Et il ne pourrait plus se taper la poitrine devant les militants. Sinon on voit difficilement le CE écrire à Soumeylou pour lui dire de revenir. Dioncounda Traoré et camarades savent qu’en prenant un tel acte, ils signeraient leur propre mort politique. Puisque Boubèye se retournerait contre eux. Parce que les faits auraient démontré que c’est lui qui avait raison contre le CE.
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LE TANDEM DANS UN AUTRE PROJET ?
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Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’orgueil ne serait pas le seul obstacle au retour de Soumeylou à l’ADEMA. En tout cas, avec tout ce qui a accompagné comme bruit la nomination de Tiémoko Sangaré au gouvernement, on est en droit de se demander si Boubèye serait prêt à vivre la même situation.
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En effet, certains ont vu d’un mauvais oeil à l’ADEMA le nomination comme ministre de M. Sangaré. Selon eux, le CE a eu tort de se permettre un tel acte, puisque Tiémoko Sangaré, en quittant l’ADEMA pour le MIRIA en 1994, avait tout fait pour que le PASJ disparaisse. Mais, ce même parti fait de lui ministre au grand dam de certains qui ont tout fait pour que la mort de l’ADEMA n’eût pas lieu.
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Comme si cela ne suffisait pas, Alpha est attendu de pied ferme par certains dans la Ruche. On accuse Konaré de n’avoir pas jusqu’ici rendu compte de sa gestion alors qu’il était en mission du parti à la tête du pays, encore moins mis pied au siège du parti depuis son départ de Koulouba en 2002. Il se contente de recevoir les Adémistes chez lui à Souleymanebougou. Chaque fois qu’il y a des événements, il envoie au parti ses contributions financières. Comme ce fut le cas lors des dernières législatives.
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C’est dire que si Alpha et Soumeylou se projettent en quelque sorte dans l’avenir, le cadre idéal pour ce faire pourrait se situer hors de l’ADEMA. Les deux hommes disent dans les confidences que le parti a cessé de jouer son rôle historique et qu’il faut sa refondation. Or, la manière de procéder à cette refondation est susceptible de buter sur une forte opposition au sein de la Ruche.
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Pour la simple raison que Konaré et son complice ne sont pas exempts de toutes critiques dans les différentes cassures à l’ADEMA. Et tout forcing pourrait déboucher sur un bras de fer s’il se trouvait que le récépissé du parti n’est pas à leurs seuls noms. Car, certains auront envie de sauvegarder l’ADEMA pour des raisons historiques ou propres à eux. Parce que ceux qui ont le plus profité de l’ADEMA sont généralement les premiers à lui créer des problèmes.
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Alors, si l’on n’y prend garde, Alpha et Boubèye pourraient, contre toute attente, réussir les retrouvailles de la grande famille ADEMA mais hors de la Ruche. Il leur suffira de lancer le projet de rassembler tous ceux qui sont décus contre les directions nationales de l’ADEMA et de ses rejetons (MIRIA, RPM, URD) pour qu’une autre force prenne corps.
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Or, des crocodiles du marigot politique malien militant dans d’autres partis sans avenir sûr, n’attendent que les bouleversements pour se repositionner. La nouvelle force politique peut être parrainée par Konaré mais sans qu’il en soit le président actif. Qui sait si le nom d’ATT ne serait pas utilisé comme fonds de commerce pour réussir le projet politique ?
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Dans tous les cas, des questions se posent par rapport aux relations futures entre les deux hommes. Question: le tandem Alpha-Boubèye marchera-t-il avec succès comme par le passé? Soumeylou serait-il prêt à jouer le rôle de pion dans l’éventuel jeu politique de Konaré quand on sait que l’ex- directeur des services de renseignements ambitionne de devenir le Poutine malien? Aussi, les affinités entre le beau fils Tiébilé Dramé et le beau père Konaré ne serait-il pas de nature à empêcher Alpha et Soumeylou de se projeter en quelque sorte dans l’avenir?
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Oumar SIDIBE
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